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Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Titel: Histoire De France 1724-1759 Volume 18 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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Le traître, c'est le roi.
    C'est à lui désormais que remonte la haine, et sa tête dès lors est en jeu.
    Dès 1750, il le prévit, dit: «Je serai tué.» Autant qu'il put, il évita Paris, fit le chemin de la Révolte .
    C'est alors qu'en ses lettres fort sombres, l'homme aux mille projets, Duverney, fait entendre qu'on ne peut plus s'appuyer que sur la noblesse élevée exprès, qu'il faut créer l' École militaire , la pépinière des défenseurs du roi. Il y faut de vrais nobles qui prouvent au moins quatre quartiers. Adélaïde, tremblant toujours pour la vie de son père, prit cela fort à cœur. On en vint jusqu'à l'ordonnance gothique de 1760: «qu'on n'approchera plus du roi sans prouver qu'on est noble depuis 1400.»
    Tant on a peur du peuple! Le roi aimait si peu à le voir, à le rencontrer, qu'il évitait même Fontainebleau; il fit faire un chemin exprès pour ne plus traverser cette petite ville de cour.
    En fermant le Palais, il avait lâché tout un monde d'oisifs et de parleurs, de gens ulcérés, ruinés. Plus de procès privés. Mais aux Pas-Perdus, aux cafés, au» coins de rues, sur chaque borne, commence le grand procès du roi.
    Deux légendes terribles, mêlées de faux, de vrai, entraient dans ce procès, menaient droit à 93:
    1 o Le Pacte de famine . Le roi certainement n'eutpoint l'idée, le plan arrêté d'affamer le peuple, de l'irriter, de l'armer contre lui. Mais il était marchand, il avait intérêt (avec Bourret et autres) dans le trafic des blés, et, comme tout marchand, aimait à vendre cher.
    2 o Le Parc-aux-Cerfs . Plus les vivres sont chers, mieux le roi vend son blé, disait-on, plus il a de filles à bon marché. On supposait que cet homme (fort usé, surtout par la table) avait besoin d'un immense sérail, de grands troupeaux de filles. Pas moins de dix-huit cents, dit ridiculement Soulavie.
    Voici la vérité: Le roi ayant Madame aux fameux cabinets (déc. 1753), n'étant plus tout à fait chez lui, fut obligé de mettre sa ménagerie féminine (les modèles et la perruquière, etc.) aux combles de Versailles. Ces grisettes effrontées et folâtres faisaient plus de bruit que des rats. La Pompadour, avec une décence, une pudeur vraiment dignes d'elle, imagina une chose très-noble, un couvent de jeunes veuves, veuves d'officiers morts pour le roi! ( Argenson ) qui serviraient à ses plaisirs.
    Et elle eût fait cette infamie, si son neveu Lugeac et le valet Lebel, qui auraient trop perdu, n'eussent préparé une petite maison , bien petite, secrète, honteuse, qu'on acheta dans le quartier nommé le Parc-aux-Cerfs (25 novembre 1756).
    Mais le roi aimait peu les rues désertes, surtout aux nuits d'hiver. En février 1756, du Parc-aux-Cerfs on lui mena jusque dans sa propre chambre à coucher une petite vierge de quinze ans. Amenée brusquement sans qu'on eût pris la peine de la corrompre et de l'endoctriner,la pauvre enfant eut peur, horreur, se défendit.
    Le roi avait quarante-sept ans. Ses excès de vin, de mangeaille, lui avaient fait un teint de plomb. La bouche crapuleuse dénonçait plus que le vice, le goût du vil, l'argot des petites canailles, qu'il aimait à parler. Il le portait chez ses filles, si fières, leur donnant en cette langue des sobriquets étranges ( Loque , ou petit chiffon, Coche , etc.). On peut juger par là des égards qu'il avait pour des enfants vendues.
    Il n'était pas cruel, mais mortellement sec, hautain, impertinent. Et il eût cassé ses jouets. C'était un personnage funèbre au fond, il parlait volontiers d'enterrement, et si on lui disait: «Un tel a une jambe cassée,» il se mettait à rire. Sa face était d'un croque-mort. Dans ses portraits d'alors, l'œil gris, terne, vitreux, fait peur. C'est d'un animal à sang froid. Méchant? Non, mais impitoyable. C'est le néant, le vide, un vide insatiable, et par là très-sauvage. Devant ce monsieur blême, l'enfant eut peur, se sentit une proie. Il n'eut nulle bonté, nulle douceur, s'acharna en chasseur à ce pauvre gibier humain. Cela dura longtemps, et tant qu'il enrhuma ( Arg. , février 1756, IV, 266). Tout fut entendu et public. La cour tâcha de rire; Paris fut indigné. Et les mères cachaient leurs enfants.
    Beaucoup, en Europe et en France, disaient: «On le tuera.»
    Dans la cour du Palais, quand il revint, les poissardes disaient (et redirent): «Il y aura une saignée.»
    Et d'autres: «Il faut une saignée en France.»
    D'autres allaient plus loin, disaient: «Il

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