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Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Titel: Histoire De France 1724-1759 Volume 18 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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grandes choses, si les gens qui en étaient maîtres, ne l'eussent incessamment poussé, mis en avant. Il se crut nécessaire, appelé et voulu de Dieu, fit effort et s'ingénia. Là parut un esprit très-faux, un sot subtil qui, dans la main des fourbes, eût pu aller très-loin et faire regretter son père même. Celui-ci l'aimait peu, le voyait comme un être à part, déplaisant dans le bien autant que dans le mal, en parfait contraste avec lui.
    Le Dauphin fut le centre, le noyau fort et dur autour duquel la famille royale et le clergé, l'intrigue espagnole-autrichienne, tous les éléments rétrogrades se groupèrent peu à peu. Nous devons les énumérer.
    La reine, entre sa chaise et sa chaise percée, a l'air de n'agir pas, de souffrir seulement. Son infirmité la stimule. Quand sa chère Espagne est en jeu, elle fait écrire à Madrid les avis que ne donnaient pas nos ministres. Les intrigants Lorrains, les Polonais jésuites, la lancent par moments aux pieds de Louis XV. «Sire, sauvez la Religion» (c'est-à-dire proscrivez Voltaire et l'Encyclopédie). Chose triste, odieuse, pour chancelier intime elle prend Saint-Florentin, ministre des prisons, geôlier des protestants, jansénistes et philosophes.
    Les deux filles aînées, l'Infante et Henriette, qui ont seize ans (1743), sont une avec leur mère. La première,grande et belle, fort aimée de son père (stylée par la Farnèse), voulait non-seulement une royauté du Milanais, mais, ce qui est plus fort, à la mort de Fleury, faire ici un premier ministre.
    Henriette, au contraire, très-douce et maladive, avait beaucoup souffert. Promise au Bavarois, promise au duc de Chartres, qu'elle aimait, qui l'aimait, puis refusée, brisée. Son père veut la garder. Il craint les Orléans, est jaloux de ses filles. Nulle plainte. Mais la pauvre Henriette (instrument de sa mère, du Dauphin), si elle ose parler, doit, timide et tremblante, aller d'autant plus droit au cœur.
    Une enfant de dix ans, la véhémente Adélaïde, aura un bien autre pouvoir. Dans sa vivacité, son élan polonais, ses saillies précoces et baroques, elle étonne. Seule des filles du roi, elle obtient de rester près de lui, de ne pas subir le couvent. Elle prendra le Roi, sans nul doute, lui fera faire ce que veut le Dauphin.
    Tous Espagnols de cœur, voulant le Milanais pour l'infant et l'infante.—Mais secondairement tous pour Marie-Thérèse.—Tous rêvant l'avenir de l'hymen autrichien, visant pour une infante d'Espagne le petit Joseph II [34] .
    Funestes mariages, d'abord de Joseph II, plus tard de Marie-Antoinette! Un million d'hommes ont péri pour cela.
    Bourbon , Autriche , Espagne , trinité sainte. Union ardemment désirée du clergé. Le sang du Très-chrétien , du roi Catholique ne peut mieux s'allier qu'à l' Apostolique Autrichien.
    La guerre n'est qu'extérieure. On reste ami, parent. Le cœur est pour Marie-Thérèse. La bonne Autriche, l' honnête Autriche, ce sont des mots adoptés dans l'Europe. Sur la justice de cette guerre, l'opinion de Versailles et de Madrid est tout à fait celle de Vienne. C'est celle des honnêtes gens . Le vieux Fleury, en entravant la guerre, sert directement la pensée de toute la famille royale. Elle pleure aux victoires de la Prusse. Elle pleure aux succès de la France. Dès ce jour est organisée, contre nous, contre la patrie, la conspiration de famille .
    Cette conspiration n'est devenue bien claire que plus tard, à mesure que grandit le Dauphin. Mais déjà elle existe, elle agit sourdement, saisit le roi d'autant plus sûrement qu'elle ne veut et n'insinue guère que ce qu'il eût voulu lui-même. De fond et de nature, d'éducation, de précédents, il était (sauf des échappées) homme du clergé et du passé, bon Espagnol, bon Autrichien.
    L'opposition naturelle à cela furent les maîtresses. Dans quelle mesure? médiocre pourtant, la Nesle avait l'instinct du grand. La Mailly eut du cœur. Leurs efforts avortèrent. La Tournelle voulut, exigea qu'il fût Roi , le rendant seulement plus absolu, plus dur. La Pompadour lui fit un peu tolérer les idées. Mais ce ne fut jamais qu'en haine et envie du Dauphin. Donc, rien ne fut gagné. Le parti du Dauphin le reprit par ses filles. Ceci soit dit pour tout le règne. Revenons à la fin de 1741.
    L'affaissement d'esprit pitoyable où fut Louis XV, sa peur profonde de la mort après la catastrophe horrible de la Nesle, donnait bon espoir au clergé. La Mailly, plus qu'usée, ne

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