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Histoire du Consulat et de l'Empire

Histoire du Consulat et de l'Empire

Titel: Histoire du Consulat et de l'Empire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques-Olivier Boudon
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autorités laissent faire, au moins tant que ces manifestations se déroulent selon les règles prescrites par le Concordat et les Articles organiques. Dans certains cas, les préfets doivent rappeler à l'ordre les curés qui dirigent des processions en semaine et se refusent par exemple à célébrer le dimanche le plus proche la Fête
    Dieu. Pour les préfets, il s'agit d'une volonté de remettre en cause le Concordat. Le rétablissement de ces processions a du reste provoqué quelques incidents, nota!llment dans les régions où les minorités protestantes sont fortes. A Montauban, une rixe éclate entre catholiques et protestants en 1806. Dans les Deux-Sèvres, des habitants protestants sont punis d'une amende pour avoir refusé de pavoiser leurs maisons. Ces heurts montrent que les catholiques ont 229
     

    LA NAISSANCE D'UNE MONARCHIE (1804-1809)
    réinvesti la rue, menaçant en cela la neutralité revendiquée par le régime.
    Cette effervescence se retrouve également dans l'usage des cloches, pour lequel plusieurs rappels à l'ordre sont nécessaires de la part des préfets et des évêques. Ainsi, à Paris, le cardinal de Belloy redit qu'il ne faut pas faire sonner les cloches le jour des anciennes fêtes chômées. A travers la France, les nouveaux règlements pour la sonnerie des cloches visent à limiter l'usage qui en était fait avant la Révolution, au grand dam d'une partie des catholiques attachés à cette pratique ancienne.
    La reprise des missions intérieures atteste aussi du renouveau spirituel. Elles se développent à partir de 1804 sur le modèle qui prévalait avant la Révolution et connaissent très vite un certain succès, mais irritent l'opinion voltairienne qui considère avec dédain cette forme d'endoctrinement du peuple. Leur aspect spectaculaire vise à frapper les esprits. Dans le Finistère, une mission rassemble ainsi vingt-six prêtres et près de deux mille fidèles, invités pendant plusieurs jours à entendre des sermons, à se confesser, puis à communier finalement dans une atmosphère de réparation qui fleure la contrerévolution. Du reste, le gouvernement se méfie de ces missionnaires itinérants, souvent membres d'anciennes congrégations, et difficilement contrôlables. Il finit par interdire les missions, en septembre 1809, ou plus exactement le recours à des missionnaires extérieurs au diocèse, ce qui revient à mettre à bas ce mouvement des missions intérieures. Ainsi, plusieurs indices montrent que le renouveau du culte a embarrassé les pouvoirs publics, lorsque ses manifestations ont semblé sortir du cadre législatif fixé par le Concordat. L'État entend maintenir la pratique religieuse dans un cadre strictement défini, le clergé paroissial devant se porter garant de son organisation.
    La liberté religieuse conquise à l'époque de la , Révolution a favorisé l'expression du détachement à l'égard de l'Eglise. L'incrédulité s'affiche par le refus de se rendre à l'église le dimanche, à laquelle est préféré le cabaret, et par l'éloignement des sacrements. Ce détachement conduit souvent à un anticléricalisme qui reste toutefois feutré, mais qui soude les hommes qui le professent, en particulier dans les villes, comme à Paris, où la « déchristianisation » s'accroît. L'exemple de Jules Michelet en est très révélateur. Fils d'un imprimeur, il appartient à la petite bourgeoisie voltairienne. Il n'est pas baptisé et ne reçoit aucune éducation religieuse. Dans l'armée aussi, l'anticléricalisme est fort répandu.
    Ainsi le soldat Chevalier, venu en Italie sous le Consulat, y est frappé par l'influence du clergé qu'il dépeint en des termes peu amènes, évoquant des « fainéants à calotte » et de « laids calotins », avant de s'en prendre au luxe et au libertinage des moines, selon un registre classique de l'anticléricalisme. Derrière cette opinion pointe d'ailleurs un soupçon de républicanisme qui affleure quand 230
     

    LE CONTRÔLE DES ÂMES
    il évoque la suppression du calendrier républicain : « Le 1er janvier 1806, nous reçûmes l'ordre à notre grand regret, de quitter notre calendrier républicain, après quatorze ans, nous nous y étions familiarisés, il fallut reprendre le grégorien, la fête des saints et toute la prétentaine. Nous étions, ou nous croyions être en République, mais elle n'existait déjà plus, que pour mémoire 7. »
    Ces diverses manifestations d'anticléricalisme ne s'exercent

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