Il suffit d'un Amour Tome 2
qu'il interposa entre le collier et le cou blessé, puis, à l'aide d'une grosse lime qu'il avait apportée avec lui, se mit en devoir de scier le collier. Car la fouille du cadavre de Fagot n'avait rien donné. Il n'avait pas trouvé la clef. L'opération fut longue et pénible pour Catherine malgré les précautions prises par Landry. Le bruit irritant de la lime mordant l'acier crispait les nerfs de la jeune femme surexcitée par l'impatience. Enfin, le moment vint où le carcan tomba et où Catherine, libre, put se relever. Elle voulut se jeter au cou de Landry pour le remercier mais il la repoussa doucement.
— Tu me remercieras plus tard. Maintenant, il faut filer d'ici et vite... Je ne crois pas qu'il y ait d'autres gardiens...
Soutenant par la taille son amie chancelante, il l'entraîna vers la porte, mais au moment de franchir le seuil de sa chambre de torture, la jeune femme eut une défaillance. Elle était arrivée au dernier degré de l'épuisement.
— Quel idiot je suis ! s'écria Landry. As-tu mangé quelque chose aujourd'hui ?
— Non... rien, juste un peu d'eau.
Landry tira de sa poche un flacon plat dont il mit le goulot à la bouche de la jeune femme.
— Bois un peu de ça ! C'est du vin de Beaune, ça te donnera un coup de fouet. Et, tiens, mange cette galette. Je l'avais apportée pour toi mais dans l'affolement de te trouver aux prises avec ces vilains oiseaux, j'ai complètement oublié de te la donner
Le vin emplit l'estomac de Catherine d'une chaleur instantanée mais lui donna également mal au cœur. Elle grignota quelques bribes de galette, se sentit tout de même un peu plus forte et voulut faire quelques pas. C'était impossible. Elle retomba à terre en vomissant ce qu'elle venait d'avaler, secouée par une terrible nausée.
— Tu n'en peux plus ! constata Landry sans s'émouvoir. Alors aux grands maux, les grands remèdes !
Il se baissa et, enlevant la jeune femme dans ses bras aussi aisément que si elle n'avait rien pesé, il s'élança dans l'escalier. La vis de pierre, prise dans l'épaisseur de la muraille, était éclairée de loin en loin par des brûlots de poix dans des cages de fer. En quelques instants, Landry et son fardeau furent dans la cour du château.
— Le plus difficile est fait, chuchota Landry avec un petit rire. L'enceinte de ce palais est en ruine. Il y a une brèche là, tout près.
A peine consciente, Catherine vit des pans de murs noircis qui se détachaient vigoureusement sur la neige. Des plaques blanches ouataient les pierres croulantes sur lesquelles Landry grimpait avec la sûreté d'un chamois. Bientôt, l'enceinte fut franchie et la campagne libre s'étendit, à perte de vue, blafarde sous le ciel noir, devant les yeux de la fugitive. On était maintenant sur la pente de la colline au bas de laquelle quelques masures se tassaient frileusement. Sans lâcher Catherine qu'il tenait étroitement serrée contre sa poitrine, Landry siffla trois fois. Une ombre sortit de derrière un enchevêtrement de ronces et de cailloux.
— Dieu soit loué ! fit une voix tremblante d'émotion. Tu as réussi !
Comment est-elle ?
— Pas brillante ! Il faut la coucher tout de suite.
— Tout est prêt. Viens...
Si faible qu'elle fût, Catherine avait tout de même soulevé ses paupières au son de la voix. Elle était trop épuisée pour éprouver encore de la surprise et les derniers jours vécus en enfer avaient émoussé quelque peu ses sensations mentales, mais elle voulait s'assurer qu'elle n'était pas le jouet d'une illusion.
Non, elle ne se trompait pas. C'était bien Sara qui venait de réapparaître aussi inopinément, sortant de la nuit comme si c'eût été la chose du monde la plus naturelle. Mais n'osant encore y croire, Catherine étendit la main pour toucher le visage penché sur elle.
— C'est bien toi ? Tu es revenue ?...
Sara saisit cette main et la couvrit de baisers et de larmes.
— Si tu savais comme j'ai honte de moi, Catherine... _
Mais Landry coupa court aux retrouvailles et aux explications.
— Plus tard, je t'expliquerai comment nous nous sommes retrouvés, fit-il en assurant mieux son fardeau dans ses bras. Pour le moment, il faut filer. Il a beau faire nuit, on peut nous voir, sur cette pente blanche. Je vais te déposer, Catherine, puis je reviendrai effacer les traces de mes pas dans la neige.
— Où allons-nous ? demanda Catherine.
— Pas loin, rassure-toi... à Mâlain même. Garin n'aura pas l'idée de te
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