Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
la Bible au Féminin 03 Lilah

la Bible au Féminin 03 Lilah

Titel: la Bible au Féminin 03 Lilah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
Vom Netzwerk:
maudissant Jérusalem et en se maudissant, elles-mêmes et leur progéniture : pour avoir épousé des Juifs, elles étaient devenues impures dans la maison de leurs pères.
    Jusqu’à la première pluie d’automne, il nous a fallu chaque jour errer dans la campagne à la recherche de celles qui se cachaient dans les buissons et les trous, telles des gazelles protégeant leurs petits.
    Nous sommes descendus vers le sud, où Jonathan connaissait une terre assez vaste et assez sèche pour y établir un camp. Quelle servitude ! Dresser des tentes, panser les plaies du corps, ramasser les herbes pour soigner les maladies déjà nombreuses des enfants, accoucher les femmes enceintes, donner à manger… Et puis, déjà, des disputes, des jalousies, des désespoirs…
    Et les hommes de Guersheme qui galopent sur nous un jour de ciel gris.
    Oh ! quelle aubaine pour eux que ces femmes sans époux ni défense !
    Ils ne se gênent pas. Ils prennent. Ils ouvrent les cuisses, ils prennent. Ils ouvrent les ventres, ils forcent les sexes encore immaculés.
    Ils violent. Ils violent à tour de reins.
    Ils tuent celles qui résistent.
    Les vieilles qui leur tirent les cheveux pendant qu’ils prennent les filles comme ils prendraient des chèvres, ils les éventrent.
    Les enfants qui veulent défendre leurs mères, ils leur tranchent la gorge.
    À Jonathan qui se bat pour défendre son épouse qui n’a pas encore enfanté, ils ouvrent le cou.
    À elle, ils ouvrent le ventre et brandissent son fruit sanglant.
    Ils rient et hurlent :
    — À nous le festin des répudiées de Jérusalem !
    Ils entravent les plus belles, les plus jeunes. Ils les entravent tel un troupeau de chamelles et ils les tirent derrière eux jusque dans leur désert.
    Cela devait arriver.
    Il ne s’écoulait de jour et de nuit sans que nous ayons la terreur que cela arrivât.
    Dans Jérusalem, ils savaient que cela se passerait ainsi. En répudiant, ils le savaient.
    Et Yhwh, mon Dieu, le savait.
     
    *
    * *
     
    Cette nuit, un peu avant l’aube, Sogdiam est mort.
    On m’a dit que son chariot s’est retourné sur lui et l’a écrasé. On dit qu’il n’a pas souffert trop longtemps.
    Sogdiam, mon Sogdiam est mort.
    Les morts, il est vrai, sont nombreux.
    On m’a dit que Sogdiam rapportait un chariot plein de grains. Ce trajet de nuit depuis Jérusalem, il l’accomplissait de plus en plus souvent. Il y a encore des hommes, là-bas, qui veulent bien nous donner un peu de nourriture. Du grain ou des légumes pour que les anciennes épouses et les enfants ne meurent pas complètement de faim. Mais, la nuit, la route de Béthanie est mauvaise et dangereuse. Les pluies d’automne l’ont ravinée. Peut-être n’était-ce pas la pluie, mais ceux de Guersheme ou de Toviyyah ? L’un et l’autre ne manquent pas une occasion de nous dépouiller ou de nous massacrer.
    Je n’ai pas pensé à demander si le grain avait été volé. Si Sogdiam était mort pour rien. Mon Sogdiam est mort !
    Je voudrais pleurer et ne pleure pas. Mes mains sont froides, mes pieds sont glacés. Peut-être mon cœur s’est-il figé lui aussi ?
    Je suis agrippée à mon calame et j’écris.
    Je dois te paraître confuse, à présent, Antinoès, mon époux. Je mélange le passé et le présent. C’est à cause de la mort de Sogdiam.
    Mais il est vrai aussi que mon esprit, mon cœur, mon corps, tout est devenu confusion.
    Hier, vers la fin du jour, Sogdiam a passé un long moment en silence près de moi. Il m’a dit sur un ton de reproche :
    — Tu écris, tu écris ! Tu passes ton temps à écrire comme un scribe. Et qui va lire tes secrets ?
    Je lui ai répondu :
    — Toi.
    Il m’a regardée comme si nous dansions sous le drap des épousailles. Sa chaleur était près de moi. Sa vie déhanchée. Il suffisait que nos regards se croisent une fois dans la journée pour que je respire mieux. Quand il dormait, ses yeux souriaient.
    Oh ! mon Sogdiam qui nous nourrissait comme une mère ! Un garçon de seize ans à peine. Un enfant devenu homme. Et que j’ai emporté dans le tourbillon de ma confusion en poussant Ezra vers Jérusalem !
    Sogdiam, mon bien-aimé enfant !
    Ce n’est pas vrai que j’écris cette lettre pour Antinoès. Je le sais, et ce serait un mensonge que de le maintenir. Antinoès, mon époux, ne me lira pas. Sogdiam ne lui portera pas ce rouleau de papyrus dans un étui de cuir accroché à son cou d’enfant infirme et si beau.
    Antinoès est

Weitere Kostenlose Bücher