La chapelle du Diable
lui-même sa combinaison, l’avait fait descendre sur ses genoux
et s’était recouché sur Julianna. Son sexe avait alors oublié toute douceur et
s’était enfoncé dans celui de sa nouvelle épouse. Julianna avait grimacé de
douleur. François-Xavier s’était immobilisé, inquiet.
— J’te fais mal ? avait-il voulu savoir.
— Un peu, avait répondu la jeune femme avec un sourire crispé, incertaine de
trouver agréable cette intrusion en elle.
— Tu vas toujours m’aimer ? avait demandé François-Xavier avec dans les yeux un
air de réelle crainte.
Julianna avait eu un petit rire doux. Cela faisait au moins vingt fois qu’il
lui posait la même question. Avec tendresse, elle l’avait étreint et lui avait
répété ce qui deviendrait sa réponse habituelle :
— J’pourrai jamais arrêter de t’aimer, même si je le voulais…
François-Xavier ne pouvait plus se retenir. Il avait plongé plus profondément
encore en elle et, malgré lui, avait laissé ses sens l’emporter en une
prodigieuse explosion de plaisir. « C’est fait pour aller là » s’était-il dit en
souriant béatement un peu après. Il avait perdu bien vite son sourire lorsque,
baissant les yeux sur Julianna, il avait lu sur le visage bien aimé une évidente
déception.
François-Xavier avait roulé sur le dos et regardé le plafond sans un mot.
Avec pudeur et froideur, Julianna avait réajusté son vêtement de
nuit et remonté les couvertures jusque sous son menton. Ne sachant quelle
attitude adopter, François-Xavier s’était levé. Comment aborder un sujet si
délicat ? Il aurait voulu la reprendre dans ses bras, l’embrasser, lui dire des
mots d’amour, des compliments. Au lieu de cela, il avait préféré la fuite. Il
s’était dirigé vers la porte. Sèchement, Julianna lui avait demandé où il s’en
allait. Sans même se retourner, François-Xavier avait marmonné qu’il devait se
rendre à la royale bécosse. Voyant que son mari quittait la pièce sans plus de
cérémonie, Julianna s’était redressée et d’un ton hargneux s’était
écriée :
— Ben tant qu’à aller dehors, rentre donc du bois pour allumer le poêle !
François-Xavier avait fait signe qu’il le ferait.
— Pis fais bouillir de l’eau, avait-elle ajouté. J’voudrais de l’eau chaude…
pour me laver un peu, avait-elle fini les larmes aux yeux.
Il avait de nouveau acquiescé avant de s’éloigner, désolé d’avoir causé de la
peine à sa jeune femme et d’avoir ruiné leur nuit de noces.
François-Xavier secoua la tête et revint à la contemplation de la tourelle de
son ancienne demeure. Les barreaux de protection en fer forgé affichaient des
taches de rouille. Ah ! sa belle tour, que de fois il s’y était réfugié, fuyant
une jeune épouse qu’il ne parvenait pas toujours à comprendre… Sa femme était si
différente des autres. Ils avaient vécu à peine un an et demi ensemble dans
cette maison. Y résider avec Julianna avait été comme vivre une perpétuelle
saison de printemps. Un jour, il faisait beau et on croyait l’été arrivé, le
lendemain, une folle neige recouvrait les nouvelles pousses d’herbe verte et un
vent glacial se levait. Autant elle était vive, passionnée, autant elle pouvait
se montrer renfermée, hautaine et froide. Pour des broutilles, elle boudait des
jours entiers. Ce silence dans lequel elle sedrapait était une
véritable torture pour lui et jamais il ne s’y était habitué. Il détestait ce
côté de sa personnalité. Il trouvait cette attitude déloyale et désarmante
aussi… Il avait tout essayé, mais il ne savait jamais comment mettre un terme à
cet enfer dans lequel son mutisme les plongeait. S’il revenait vers elle pour
essayer de l’enlacer, elle se détachait de lui brusquement et s’éloignait, son
petit nez en l’air, comme s’il avait osé le pire affront. Alors il avait choisi
de se taire et d’attendre que sa princesse daigne lui adresser la parole. Mais
alors, elle lui reprochait de n’avoir rien fait et se plaignait que c’était
toujours à elle de faire les premiers pas. D’une façon ou d’une autre,
François-Xavier sortait toujours perdant de ces querelles. Il avait béni le ciel
d’avoir eu l’idée de génie de construire cette tourelle sans se douter que ce
belvédère lui servirait de refuge si souvent.
Il se décida à entrer
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