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La Chimère d'or des Borgia

La Chimère d'or des Borgia

Titel: La Chimère d'or des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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faire ?
    — Ni apparemment les journaux anglais, parce que avant-hier ils consacraient une belle place à la sévère mise au point du commissaire principal Langlois à la presse française l’accusant d’entraver la police dans son travail. La « romance » un rien scabreuse ne serait qu’un écran de fumée destiné à dissimuler un double enlèvement en plein Paris par un taxi fantôme, mais pas le même jour ni à la même heure : Mrs Belmont arrivait de Lausanne et Morosini rentrait chez lui ! Vous voilà fixé ! À présent faites ce que vous voulez, mais ne venez pas me mettre des bâtons dans les roues, sinon je vous boucle comme un vulgaire voleur de poules ! Parce que mon enquête aussi est délicate et que je soupçonne la mafia de ne pas être étrangère à tout ceci ! Vu ?
    — Oh ! C’est très clair !
    Une chose était certaine pour Adalbert : il encombrait ! Aussi, après un regard désolé à sa chère maison que Scotland Yard était en train de passer au peigne fin, il pensa qu’aller se dégourdir les jambes lui changerait les idées. Sur le seuil, il trouva le gardien qui lui demanda ce qu’il devrait faire quand la police en aurait fini.
    — À moins qu’ils ne posent les scellés, essayez de remettre de l’ordre… On verra ensuite !
    — Mais le chauffeur et la voiture ?
    — Ils appartiennent à Mr Wishbone. Attendez qu’il revienne. Je repasserai demain voir s’il y a du nouveau…
    En fait, il ne savait ni que faire ni que dire. Le choc violent qu’il venait d’encaisser le désorientait. En dépit du temps « de saison » – léger brouillard agrémenté de menus flocons de neige ! –, il alla s’asseoir sur un banc pour regarder couler la Tamise. Et là il s’accorda le soulagement des larmes. Lucrezia, criminelle ! Lucrezia, poursuivie par la police ! Cela relevait du cauchemar… et d’autant plus qu’une voix intérieure – bien faible et qu’il essayait de museler – réussissait tout de même à lui souffler qu’il y avait du vrai là-dedans ! Peut-être à cause de ce sang Borgia qu’elle revendiquait hautement et dont elle était plus que fière ! Surtout de César dont les crimes ne se comptaient pas dans une Rome où l’on pouvait – sans trop risquer de se tromper ! – attribuer au poison la moindre indigestion, où chaque nuit les poignards s’en donnaient à cœur joie, où l’on faisait l’amour entre frère et sœur, voire entre père et fille ! Vu sous cet angle, que représentait la vieille femme assassinée alors que la meurtrière elle-même était en danger de mort par noyade ? Adalbert aurait aimé savoir ce que sa Lucrezia répondrait si on lui posait la question. Ou quand on la lui poserait, car il ne faisait guère de doute pour lui que Gordon Warren réussirait tôt ou tard à mettre la patte dessus. À fortiori s’il recevait l’aide de Langlois et des forces de police françaises !… Rien que cet acharnement qu’elle mettait à vouloir à tout prix cette maudite Chimère était révélateur !
    Repoussant une issue dont il savait qu’il aurait à souffrir, il examina son propre cas. Depuis… disons des semaines parce qu’il n’avait pas vu passer le temps, il jouait les toutous savamment dressés, fous de joie pour un sucre, délirant de bonheur pour une caresse et prêts à tout pour en obtenir d’autres. Il n’avait pas écrit une ligne de son livre, n’avait rien lu, rien appris, lui qui s’intéressait à tant de choses ! Il n’avait pris contact avec personne, vu aucun ami, perdu son Théobald qui cependant en avait supporté de pires mais lui avait refusé clairement de servir « cette dame »… et il avait failli lui cogner dessus pour le simple fait qu’il n’aimait pas Lucrezia. Morosini, on n’en parlait même plus : Rayé ! Balayé !… et sans doute avec lui les dames de la rue Alfred-de-Vigny et tout ce qui constituait son univers et le charme de sa vie jusque-là ! Depuis cette soirée à l’Opéra, il vivait suspendu aux lèvres de Lucrezia, buvant ses paroles quand elle était avec lui, l’écoutant indéfiniment au moyen de disques sur le gramophone lorsqu’elle était absente…
    Il eut froid tout à coup. Jusqu’aux tréfonds de lui-même, et un frisson le secoua. Où était-elle à présent, sa sirène ? L’idée de son départ tellement précipité qu’elle n’avait pas pris le temps de lui laisser un mot, un seul, qu’il ne comptait pas pour elle, qu’elle l’avait laissé tomber alors

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