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La Chimère d'or des Borgia

La Chimère d'or des Borgia

Titel: La Chimère d'or des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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immobile et lui aussi se demanda pourquoi il s’amusait à envoyer des fusées alors qu’il n’avait pas l’air en danger…
    Pendant ce temps, une jeune femme de chambre, Helen Adler, parcourait les coursives du pont C desservant les cabines de luxe afin de s’assurer que personne n’y était à la traîne. Quelques personnes âgées pouvaient avoir besoin de secours. Helen, solide Anglaise de vingt ans née dans le Kent, aimait un métier où elle excellait parce qu’elle y voyait autre chose que l’art de veiller sur des garde-robes somptueuses, de réussir une coiffure ou de mettre en valeur les femmes qu’elle était appelée à servir. Sa dernière patronne, lady Boscover, venant de mourir sans descendants, elle s’était présentée à l’embauche du Titanic afin d’élargir un peu son horizon et de voir du pays.
    Sur le bateau elle avait en charge deux suites. L’une occupée par le couple dont tout le monde parlait à bord : celui formé par le richissime John Astor IV, âgé de quarante-huit ans, et sa toute jeune femme, Madeleine, qui n’en comptait que dix-huit, épousée sur un coup de foudre réciproque après un divorce retentissant d’avec celle qui était sans doute la plus belle et la plus insupportable des filles de la haute société américaine, Ava Lowle-Willing, dont il avait trois enfants. Les nouveaux mariés revenaient de leur voyage de noces en Europe et Madeleine était enceinte.
    L’autre passagère était une dame seule et d’un certain âge : la marquise d’Anguisola, née Belmont. Elle avait perdu son mari quelques années auparavant et, sans enfants, partageait son temps entre son hôtel new-yorkais et sa villa des environs de Rome. Au demeurant, une femme de caractère encore que tout à fait charmante.
    Au milieu du tohu-bohu qui régnait sur le navire, Helen avait vu Astor emmener sa femme. Restait la marquise. Helen aperçut alors une jeune femme qu’elle ne connaissait pas. Très belle et enveloppée de vison, elle sortait de la cabine de M me d’Anguisola dont elle referma la porte à clef avant de se perdre dans la foule du pont.
    Prise d’un bizarre pressentiment – la vieille dame possédait de fort beaux bijoux ! –, Helen voulut ouvrir la porte mais la clef avait disparu. Elle prit alors son passe, traversa le salon et entra dans la chambre : la marquise habillée pour sortir gisait en travers du lit, les yeux grands ouverts, un poignard planté dans le cœur. Le coffre privé, dissimulé normalement derrière un tableau, était posé à côté d’elle, béant et vide…
    Helen n’était pas fille à perdre la tête, même dans une telle situation. Elle se contenta de fermer les paupières de la morte et, oubliant totalement qu’elle se trouvait sur un navire en train de sombrer, partit à la recherche du commandant, ou tout au moins du commissaire de bord, afin de signaler le meurtre, mais elle se trouva propulsée par le flot humain vers les embarcations où John Jacob Astor la saisit au vol :
    — Helen, je veux que vous partiez avec mon épouse. Vous avez si merveilleusement su vous en occuper !
    Et, sans attendre de réponse, il la poussa vers Madeleine qui sanglotait en appelant son époux, tandis que deux matelots s’efforçaient de la faire embarquer.
    — Accepte pour me faire plaisir, ma chérie ! Nous nous retrouverons à New York demain ! affirma-t-il gentiment à sa femme.
    — Mais… Monsieur, protesta Helen, il faut que je voie le commandant ! Quelqu’un a été assassiné ! M me d’Anguisola…
    — Vous croyez que cela a de l’importance… maintenant ? fit-il avec l’ébauche d’un sourire en lui fourrant dans la main une poignée de billets de banque. Occupez-vous de ma femme ! Sans moi, elle est perdue ! Bon voyage !
    Force fut à la jeune fille de se laisser transborder et installer auprès de Madeleine en larmes qu’elle prit dans ses bras où celle-ci se blottit d’instinct. Déjà, la chaloupe remplie au maximum descendait le long de la coque noire du navire. John Jacob Astor alluma une cigarette et se dégagea de la bousculade…
    La panique régnait à présent : officiers et matelots avaient bien des difficultés à empêcher certains hommes d’embarquer malgré l’interdiction et devaient menacer de leurs armes. Sans grand effet d’ailleurs ! Ce fut seulement le canot 8 qui amorça le chargement des femmes et des enfants de l’entrepont. Le bâtiment commençait à piquer légèrement du nez. Il fallut deux

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