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La couronne de feu

La couronne de feu

Titel: La couronne de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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fête religieuse également. Elle ne pourrait jamais oublier l’image de cette masse de combattants conduite par Talbot, figée dans le silence de la matinée, entre deux bastilles évacuées. Elle revivait, comme si cela datait de la veille, la messe en plein air dans le faubourg en ruine, l’arrivée des pêcheurs remontant avec leur chariot ruisselant vers la porte Regnard. Elle se dit que l’Histoire se répétait, qu’elle tournait en rond comme une roue de loterie.
     
    Charles prit avec son armée la route de Crépy, en proie à une grande confusion de sentiments, partagé entre déception et réconfort. Les événements lui démontraient qu’il avait eu tort de placer sa confiance dans le cousin de Bourgogne : au lieu de lui livrer Paris comme il s’y était implicitement engagé, il avait confié à Bedford un contingent d’hommes de Picardie. Cette fausse bataille le privait d’une occasion de se venger de cette félonie et de montrer au duc qu’en épousant la cause des Anglais au lieu de s’en tenir à son rôle d’arbitre, il avait choisi le mauvais parti.
    Il jugea qu’il était temps de gagner Compiègne et de là, peut-être, pour répondre au souhait de la Pucelle, de conduire son armée aux portes de Paris.

2
    Ces jeunes têtes folles...

Compiègne, août-septembre 1429
    Et maintenant, que va faire le roi ? Où va-t-il décider de porter ses pas ? À Montepilloy il s’est ridiculisé : non seulement il n’est pas parvenu à imposer aux Anglais une bataille en règle mais il les a laissés filer sans tenter de leur emboîter le pas ! Le gros de leur armée s’est replié sur la Normandie et le reste dans Paris dont Bedford a confié la défense au comte Jean de Luxembourg au nom du duc Philippe de Bourgogne. Joli tour de passe-passe ! De quoi pourraient se plaindre les Parisiens ? Ce ne sont plus les Anglais mais de bons Français qui les protègent...
    On va négocier une nouvelle trêve. Après celle qui a duré quinze jours, à peine le temps de graisser les houseaux, celle qu’on envisage durerait trois ou quatre mois, largement le temps d’organiser une armée solide. Le Régent et le duc savent bien que Charles se lassera vite de promener son armée inutile à travers la Brie, la Picardie et la Champagne. Le jour où il sondera le vide vertigineux de ses coffres il reviendra vers ses retraites douillettes des bords de Loire. Décision imminente semble-t-il : il erre de ville en ville, respire l’encens des compliments, ronronne dans le giron de la victoire et semble ignorer que les succès dus à la Pucelle reposent sur du sable, que demain une bourrasque pourra les balayer.
    On a quitté Senlis avec l’assurance de la part des bourgeois de ne pas céder aux sirènes anglaises et bourguignonnes. On a emprunté la grande charrière de Creil qui, par un large crochet menant à Beauvais, se dirige vers Compiègne.
    – Beauvais... murmure Jeanne. Que va-t-on faire à Beauvais ? Une ville de plus à accrocher à la guirlande, sans doute !
    Jean d’Alençon, qui chevauche près de la Pucelle, se met à rire.
    – Eh bien, Jeanne, dit-il, tu parles seule à présent, comme les vieilles ?
    – Je me demandais : pourquoi Beauvais, si loin de nos bases de départ ? Tant qu’à faire, pourquoi pas Rouen ? On pourrait descendre la Seine prendre le bateau pour l’Angleterre à Calais, et...
    Nouveau rire de Jean :
    – Calais, Jeanne, est beaucoup plus au nord.
    Il lui manque, à la bergère de Domrémy, d’avoir dans la tête, comme son beau duc, comme Dunois et quelques autres, des cartes et des plans, plutôt que ce brouillon de provinces, de villes, de fleuves, qui se chevauchent et s’entremêlent.
    – Pardonne-moi, dit-elle, mais je n’arrive plus à comprendre ce qui se passe. Nous tournons en rond alors qu’à Paris on attend notre venue. Je veux voir cette ville de plus près que l’autre jour sur la butte du moulin. Il faut parler au roi, le convaincre qu’il se laisse berner par ces trêves, que les circonstances sont plus favorables que jamais pour prendre l’offensive.
    – Eh bien, Jeanne, fais-le ! Nous te soutiendrons.
    Jean d’Alençon est un élément majeur de cette sorte de confrérie qu’on appelle le Parti des Ardents : une pléiade de têtes jeunes, ardentes, folles, encadrée par des vétérans d’Azincourt. Ils sont unanimes à considérer, comme Jeanne, leur égérie, que ce moment favorable à une opération d’envergure ne se représentera pas

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