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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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une cheminée.
    Rencontrant frère Isambert, qui fut longtemps le chapelain de sa famille, Ogier ne doute plus de la réussite de son entreprise. Par la menace, il persuade le clerc d’éloigner le chévecier, Guillaume Herbert, dans la nuit du dimanche 16 au matin du 17 avril. Puis il vient en aide à deux bateleurs et à leur compagne, Hérodiade.
    À la montre des heaumes et des écus, le samedi, veille des joutes, le jeune chevalier, lucide et hargneux, défie Richard de Blainville et Ruiz Diego de Lerga, un Navarrais à la solde de celui-ci. Il doit, contre son gré, challenger Charles d’Espagne, le tendre ami du duc Jean de Normandie que les Anglais tiennent en échec à Aiguillon. Ensuite, il provoque Guy de Passac : rallié aux Goddons, ce félon est arrivé à Chauvigny porteur d’un sauf-conduit dû sans doute aux bons soins de Richard de Blainville. Comment, de plus, Ogier oublierait-il que Passac était l’amant de sa cousine, Tancrède de Rechignac ? Un seul homme manifeste le désir de lui courir sus, le rochet de joute en avant ; un Breton qu’il a privé de sa captive, Isabelle. C’est Bertrand Guesclin dont les mœurs et le caractère aussi affreux que le visage emplissent Ogier d’exécration.
    Il espère dominer tous ses adversaires. Sa force, son courroux, son habileté, sa juvénilité – il a dix-huit ans et demi – doivent le servir au mieux. Et puis, sur le champ clos, il y aura Blandine qu’il a soustraite aux entreprises de Lerga. Elle est belle, rousse, avenante ; il pressent qu’il en est aimé…

 
     
     
    À Jean Dubacq



PREMIÈRE PARTIE

UT IN PRAELIO LEO *
     
     
    * Comme un lion au combat

I
    Le soleil déclinait. À l’appel des hérauts dans la ville et les champs, tous les participants venaient d’emplir la lice. Les manants, hurons et bourgeois s’étaient assemblés aux barrières ; les femmes et les pucelles nobles occupaient pêle-mêle les échafauds sans considération d’âge et de condition. Le premier banc de central, où devaient prendre place la reine et sa suite, restait inoccupé.
    Adossé à l’une des palissades le long desquelles galoperaient les jouteurs, Ogier attendait. Proche de lui, Guesclin s’entretenait avec un borgne à l’aspect de routier.
    – Garin de Linars, dit Thierry.
    – Il ne m’a pas reconnu. Il est vrai que je me suis détourné à son approche.
    Plus loin, Charles d’Espagne, le comte d’Alençon et André de Chauvigny, cette fois en drap (4) confabulaient. Sans doute, à en juger par leurs gestes, échangeaient-ils quelques recettes pour fournir et se protéger des coups d’estoc et de taille. Plus loin encore, Herbert Berland semblait avoir une aimable conversation avec un jeune seigneur trapu, rond de visage. Était-ce un prétendant à la main de Blandine ?
    Lerga se mouchait dans ses doigts et, quittant Passac soucieux, Blainville marchait vers l’une des entrées, à la rencontre d’un cortège composé du Roi d’armes et de ses assesseurs, de quatre trompettes, de dame Alix, d’Isabelle et d’une douzaine de jouvencelles dont la gaieté et les parures semblaient réjouir l’évêque Fort d’Aux, toujours somptueusement paré sous son dais porté par quatre clercs, les plus humbles et les plus chenus qu’on eût pu trouver, sans doute, dans les moutiers du voisinage.
    La nièce de Guy de Morthemer salua Blainville qui l’arrêta au passage et serra entre ses doigts son petit menton pointu :
    – M’amie, quel morceau de roi vous faites !… On vous dit accointée à Raoul de Cahors ?
    – À personne, messire ! Je ne suis à personne !… Cette couronne-là me suffit… Point de chevalier !
    Elle s’en alla, frottant le bas de son visage tandis que Blainville la suivait des yeux, remuant la bouche comme un cheval mâchant son mors.
    « Ils se connaissent bien. Elle lui doit son trône, si tant est qu’on puisse appeler ainsi le banc où elle vient de s’asseoir et d’où, pendant deux jours, elle régnera sur nous ! »
    – J’ai hâte que ce soit fini, dit Thierry. J’en ai assez de ces assemblées. Elles nous usent les nerfs !
    – Après celle-ci, nous seront libres.
    Comme la plupart des hommes qu’ils côtoyaient, ils s’étaient une dernière fois assurés du parfait état de leur armure. Ils avaient vérifié, (5) .. Et maintenant, ils attendaient l’issue d’une des toutes dernières cérémonies à laquelle nul ne pouvait se soustraire : le serment.
    Ogier

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