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La fuite du temps

La fuite du temps

Titel: La fuite du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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d'oeil à l'horloge murale pour
s'assurer qu'elle n'allait pas rater le début du film. Elle fut rassurée en
entendant la voix d'Anita Barrière vantant les aubaines que la Plaza Saint
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    Hubert réservait
à sa clientèle depuis quelques jours. Elle se versa un verre de Coke, s'alluma
une cigarette et orienta sa chaise berçante vers le téléviseur.
     
    — Il faudrait ben
que je me décide à aller magasiner là une bonne fois, dit-elle à Gérard.
     
    — Vas-y.
Qu'est-ce qui t'en empêche? demanda ce dernier d'une voix indifférente.
     
    — Rien. Ça se
pourrait même que j'y aille demain. De toute façon, je trouve qu'il y a de
moins en moins de monde sur Sainte-Catherine le samedi. C'est rendu plate. On
dirait même, à cette heure, que le monde aime mieux aller magasiner dans les
centres d'achats comme à la Place Ville-
    Marie. Moi, je
comprends pas. Je trouve que ces magasins-
    là vendent leur
stock deux fois plus cher.
     
    Gérard replia
enfin son journal et le déposa sur l'appuifenêtre avant de s'allumer une
cigarette à son tour. Il se tourna lui aussi vers le téléviseur, comme s'il
s'apprêtait à regarder le film. Laurette ne fit aucun commentaire, heureuse
d'avoir enfin de la compagnie pour regarder la télévision.
     
    — C'est pas l'fun
de regarder un film drôle toute seule, disait-elle parfois. Quand tu ris toute
seule, t'as l'air d'une maudite niaiseuse.
     
    Une heure plus
tard, la porte d'entrée s'ouvrit sur Jean-
    Louis qui
s'empressa de la refermer avant d'allumer le plafonnier du couloir.
     
    — C'est toi,
Jean-Louis? demanda Laurette sans même quitter le petit écran des yeux.
     
    — Oui, m'man.
     
    Avec les années,
le jeune homme de trente-deux ans s'était mis à ressembler de plus en plus à
son père. De taille moyenne, il possédait la même chevelure châtain clair et
les mêmes yeux bruns dans un visage aux traits très réguliers. S'il avait porté
une mince moustache et arboré
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    quelques rides,
la ressemblance aurait été encore plus frappante.
     
    Au demeurant, le
fils aîné de Laurette n'avait pas beaucoup changé depuis le jour où il était
revenu vivre à la maison, dix ans auparavant, après avoir été chassé de
l'appartement qu'il partageait avec son ami, Jacques Cormier.
     
    Chômeur durant
quelques mois, il avait occupé une demi-
    douzaine de
petits boulots de commis et de vendeur avant d'être engagé à titre de caissier
à la Banque d'Épargne, trois ans auparavant. Cet emploi assez mal payé lui
avait tout de même redonné confiance en lui et permis de manipuler de l'argent,
ce qu'il adorait par-dessus tout. Par ailleurs, le préféré de Laurette n'avait
rien perdu de ses manières un peu précieuses et ses allures de dandy
continuaient de susciter des remarques désobligeantes sur son passage.
     
    Le plus étonnant
était peut-être le fait qu'il n'ait jamais manifesté durant toutes ces années
le moindre désir de quitter le nid familial une autre fois. Sa coûteuse
mésaventure avec Cormier semblait lui avoir enlevé toute velléité de voler de
ses propres ailes.. C'était à se demander si son frère Richard n'avait pas
raison.
     
    — Jean-Louis, il
reste juste dans les jupes de m'man parce que ça va lui coûter presque rien
pour vivre. Comme ça, il va pouvoir grossir son magot, disait-il.
     
    Jean-Louis se
rendit dans la cuisine et fit bouillir l'eau dont il avait besoin pour se faire
une tasse de café. Sa mère profita d'une pause publicitaire pour lui faire
remarquer: — T'arrives ben tard.
     
    — Ma caisse
balançait pas, laissa tomber son fils.
     
    — Il me semble
que ça t'arrive pas mal souvent, cette affaire-là, intervint son père en
tournant la tête vers lui.
     
    T'as pas peur que
ton gérant finisse par se plaindre? — C'était pas de ma faute et il le sait,
rétorqua le jeune homme en desserrant sa cravate. J'ai encore poigne un
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    commis sans
dessein qui a les deux pieds dans la même bottine. Il a fait une erreur en
balançant le livret d'une cliente. Il a fallu vérifier toutes les transactions
de la soirée avant de trouver ce que c'était. Tout le monde a été obligé de
rester une demi-heure de plus pour découvrir ce qui m'empêchait de balancer.
     
    — Les autres
devaient être de bonne humeur d'être obligés de rester en plein vendredi soir,
ajouta Laurette.
     
    Jean-Louis ne
répondit rien.
     
    — Viens-tu
regarder le film avec nous autres? demanda sa mère. On regarde Barnabe

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