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La jeune fille à la perle

La jeune fille à la perle

Titel: La jeune fille à la perle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Tracy Chevalier
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terminée.
Par la suite, vous vous y rendrez seule. Et vous ferez d’autres courses pour
moi quand j’en aurai besoin, ajouta-t-elle.
    — Oui, Madame. »
J’attendis un instant, voyant qu’elle se taisait, je tendis le bras pour
décrocher une chemise d’homme en lin.
    Catharina regarda la chemise.
« Demain, je vous montrerai les pièces du haut dont vous devrez faire le
ménage. De bonne heure. Ce sera votre première tâche de la matinée »,
dit-elle tandis que je pliais la chemise. Là-dessus, elle disparut dans la
maison, sans me laisser le temps de lui répondre.
    Après avoir rentré le linge, je
pris le fer, le nettoyai et le mis à chauffer sur le poêle. À peine avais-je
commencé à repasser que Tanneke arriva et me tendit un panier pour faire les
courses. « Nous allons de ce pas chez le boucher, annonçât-elle. Je vais
avoir besoin de la viande. » Je l’avais entendue s’affairer à la cuisine
et j’avais perçu une odeur de panais en train de rôtir.
    Catharina était assise sur le
banc devant la maison. Lisbeth était à ses pieds, sur un tabouret.
    Johannes dormait dans son
berceau. Elle peignait les cheveux de Lisbeth et en retirait les poux. Cornelia
et Aleydis cousaient auprès d’elle. « Non, Aleydis, disait Catharina, tire
bien le fil, c’est trop lâche. Montre-lui, Cornelia. »
    Je n’aurais pas cru qu’étant
ensemble elles puissent être aussi calmes.
    Maertge accourut du canal.
« Vous allez chez le boucher ? Dites, maman, je peux les
accompagner ?
    — Si tu promets de rester
avec Tanneke et de lui obéir. »
    J’étais contente que Maertge
vienne avec nous. Tanneke se méfiait encore de moi, mais la joie de vivre et la
vivacité de Maertge nous aideraient à développer un rapport d’amitié.
    Je demandai à Tanneke depuis
combien de temps elle était au service de Maria Thins.
    « Oh ! depuis des
années, me répondit-elle. Quelques années avant que notre jeune maître se marie
et vienne habiter ici avec son épouse. Quand j’ai commencé, je n’étais pas plus
âgée que toi. Quel âge as-tu ?
    —  Seize ans.
    —  Eh bien, moi, j’ai débuté ici à l’âge de quatorze ans,
rétorqua Tanneke, l’air triomphant. J’ai passé la moitié de ma vie à travailler
ici.
    À sa place, je ne m’en serais
jamais vantée. Son travail l’avait à ce point usée qu’on lui donnait davantage
que ses vingt-huit ans.
    Le marché à la viande se
trouvait derrière l’hôtel de ville, au sud puis à l’ouest de la place du
Marché. Il comprenait trente-deux étals, Delft comptant trente-deux bouchers
depuis des générations. Il grouillait de ménagères et de servantes en train de
choisir, de marchander et d’acheter pour leur famille, tandis que les hommes
allaient et venaient, transportant des carcasses. De la sciure avait été
répandue sur le sol pour absorber le sang, elle collait aux semelles et aux
ourlets des robes. Il y traînait une odeur de sang qui me donnait le frisson,
j’aurais pourtant dû y être habituée car, à une époque, je m’y rendais chaque
semaine. J’étais malgré tout heureuse de me retrouver dans des lieux familiers.
En me voyant passer devant son étal, le boucher dont nous étions clients avant
l’accident survenu à mon père m’appela. Je lui souris, soulagée d’apercevoir un
visage connu. C’était là mon premier sourire de la journée.
    Il était étrange, en une seule
matinée, de rencontrer autant d’inconnus et de devoir faire face à autant de
nouveautés, et cela en dehors de l’univers qui jusque-là était ma vie.
Autrefois, toute nouvelle rencontre se passait en présence de ma famille et des
voisins. Si je devais m’aventurer quelque part, c’était en compagnie de Frans
ou de mes parents, aussi me sentais-je en sécurité. Le neuf et l’ancien
croisaient leurs trames, comme dans la reprise d’une chaussette.
    Au début de son apprentissage,
Frans me confia qu’il avait failli s’enfuir, non que le travail fût trop
pénible mais parce qu’il ne pouvait plus supporter pareil dépaysement. Ce qui
l’avait retenu avait été de se dire que notre père avait investi toutes ses
économies dans son apprentissage et qu’il l’aurait renvoyé sur-le-champ chez
son maître s’il était rentré à la maison. Qui plus est, il se serait senti
encore plus désemparé s’il était allé ailleurs.
    « Je viendrai vous voir
quand je serai seule », murmurai-je au boucher avant de me hâter

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