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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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deux fois fort et
une fois doucement, à la porte de la maison dont voici l’apparence
dessinée. Quelqu’un t’ouvrira et te demandera si tu es le ramoneur,
tu répondras que tu es maigre et que tu n’as point perdu la carte.
Tu la lui montreras. Alors, Thyl, tu feras ce que dois. De grands
malheurs planent sur la terre de Flandre. Il te sera montré une
cheminée préparée et balayée à l’avance ; tu y trouveras de
bons crampons pour tes pieds, et pour ton séant une petite
planchette de bois fermement soutenue. Quand celui qui t’aura
ouvert te dira de monter dans la cheminée, tu le feras, et là tu te
tiendras coi. D’illustres seigneurs se réuniront en la chambre,
devant la cheminée dans laquelle tu te trouveras. Ce sont Guillaume
le Taiseux, prince d’Orange, les comtes d’Egmont, de Hoorn, de
Hoogstraeten et Ludwig de Nassau, le frère vaillant du Taiseux.
Nous, réformés, voulons savoir ce que Messeigneurs veulent et
peuvent entreprendre pour sauver les pays.
    Or, le premier avril, Ulenspiegel fit ce qui lui était dit, et
se glissa dans la cheminée. Il fut satisfait de voir que nul feu
n’y brûlait, et pensa que, n’ayant point de fumée, il aurait ainsi
l’ouïe plus fine.
    Bientôt la porte de la salle s’ouvrit, et il fut traversé
d’outre en outre par un coup de vent. Mais il prit ce vent en
patience, disant qu’il lui rafraîchirait l’attention.
    Puis il entendit messeigneurs d’Orange, d’Egmont et les autres
entrer dans la salle. Ils commencèrent à parler des craintes qu’ils
avaient, de la colère du roi et de la mauvaise administration des
deniers et finances. L’un d’eux parlait d’un ton âpre, hautain et
clair, c’était d’Egmont. Ulenspiegel le reconnut, comme il reconnut
d’Hoogstraeten, à sa voix enrouée ; de Hoorn, à sa grosse
voix ; le comte Louis de Nassau, à son parler ferme et
guerrier ; et le Taiseux, à ce qu’il prononçait lentement
toutes ses paroles comme s’il les eût pesées chacune en une
balance.
    Le comte d’Egmont demanda pourquoi on les réunissait une seconde
fois, tandis qu’à Hellegat ils avaient eu le loisir de décider ce
qu’ils voulaient faire.
    De Hoorn répondit :
    – Les heures sont rapides, le roi se fâche, gardons-nous de
temporiser.
    Le Taiseux alors dit :
    – Les pays sont en danger ; il faut les défendre contre
l’attaque d’une armée étrangère.
    D’Egmont répondit en s’emportant, qu’il trouvait étonnant que le
roi son maître crût devoir y envoyer une armée, alors que tout
était pacifié par les soins des seigneurs et notamment par les
siens.
    Mais le Taiseux :
    – Philippe a aux Pays-Bas quatorze bandes d’ordonnance, dont
tous les soudards sont dévoués à celui qui commanda à Gravelines et
à Saint-Quentin.
    – Je ne comprends pas, dit d’Egmont.
    Le prince repartit :
    – Je ne veux rien dire davantage, mais il va être fait lecture à
vous et aux seigneurs réunis, de certaines lettres, celles du
pauvre Montigny pour le commencement.
    Dans ces lettres, messire de Montigny écrivait :
    « Le roi est extrêmement fâché de ce qui est arrivé aux
Pays-Bas, et il punira, à l’heure donnée, les fauteurs de
troubles. »
    Sur ce, le comte d’Egmont dit qu’il avait froid, et qu’il serait
bon d’allumer un grand feu de bois. Cela fut fait pendant que les
deux seigneurs causaient des lettres.
    Le feu ne prit pas à cause du trop grand bouchon qui était dans
la cheminée et la chambre fut pleine de fumée.
    Le comte d’Hoogstraeten, lut alors, en toussant, les lettres
interceptées d’Alava, ambassadeur d’Espagne, adressées à la
Gouvernante.
    « L’ambassadeur, dit-il, écrit que tout le mal arrive aux
Pays-Bas l’est du fait des trois : savoir, messieurs d’Orange,
d’Egmont et de Hoorn. Il faut, dit l’ambassadeur, montrer bon
visage aux trois seigneurs et leur dire que le roi reconnaît tenir
ces pays en son obéissance par leurs services. Quant aux deux
seuls : Montigny et de Berghes, ils sont où ils doivent
demeurer. »
    – Ah ! disait Ulenspiegel, j’aime mieux une cheminée
fumeuse au pays de Flandre, qu’une fraîche prison au pays
d’Espagne ; car il y pousse des garrots entre les murs
humides.
    Le dit ambassadeur ajoute que le roi a dit en la ville de
Madrid : « Par tout ce qui est arrivé aux Pays-Bas, notre
royale réputation est amoindrie, le service de Dieu est avili, et
nous exposerons tous nos autres pays plutôt que de laisser

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