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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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impunie
une telle rébellion. Nous sommes décidés à aller en personne aux
Pays-Bas et à requérir l’assistance du pape et de l’empereur. Sous
le mal présent gît le bien futur. Nous réduirons les Pays-Bas sous
notre absolue obéissance et y modifierons à notre guise état,
religion et gouvernement. »
    – Ah ! Philippe roi, se disait Ulenspiegel, si je pouvais,
à ma mode, te modifier, tu subirais sous mon bâton flamand une
grande modification de tes cuisses, bras et jambes ; je te
mettrais la tête au milieu du dos avec deux clous pour voir si en
cet état, regardant le cimetière que tu laisses derrière toi, tu
chanterais à ta guise ta chanson de tyrannique modification.
    On apporta du vin. D’Hoogstraeten se leva et dit :
« Je bois aux pays ! » Tous firent comme lui qui,
posant son hanap vide sur la table, ajouta : « La male
heure sonne pour la noblesse belgique. Il faut aviser aux moyens de
se défendre. »
    Attendant une réponse, il regarda d’Egmont qui ne sonna mot.
    Mais le Taiseux parla :
    – Nous résisterons, dit-il, si d’Egmont qui, à Saint-Quentin et
à Gravelines, deux fois fit trembler la France, qui a toute
autorité sur les soudards flamands, veut nous venir à la rescousse
et empêcher l’Espagnol d’entrer en nos pays.
    Messire d’Egmont répondit :
    – J’ai trop respectueuse opinion du roi pour croire qu’il nous
faille nous armer en rebelles contre lui. Que ceux qui craignent sa
colère se retirent. Je demeurerai, n’ayant nul moyen de vivre sans
son secours.
    – Philippe peut se venger cruellement, dit le Taiseux.
    – J’ai confiance, répondit d’Egmont.
    – La tête y comprise ? demanda Ludwig de Nassau.
    – Y compris, répondit d’Egmont, tête, corps et dévouement, qui
sont à lui.
    – Amé et féal, je ferai comme toi, dit de Hoorn.
    Le Taiseux dit :
    – Il faut prévoir et ne point attendre.
    Lors, messire d’Egmont parlant violemment :
    – J’ai, dit-il, fait pendre à Grammont vingt-deux réformés. Si
les prêches cessent, si l’on punit les abatteurs d’images, la
colère du roi s’apaisera.
    Le Taiseux répondit :
    – Il est des espérances incertaines.
    – Armons-nous de confiance, dit d’Egmont.
    – Armons-nous de confiance, dit de Hoorn.
    – C’est de fer qu’il faut s’armer et non de confiance, repartit
d’Hoogstraeten.
    Sur ce, le Taiseux fit signe qu’il voulait partir
    – Adieu, prince sans terre, dit d’Egmont
    – Adieu, comte sans tête, répondit le Taiseux.
    Ludwig de Nassau dit alors :
    – Le boucher est pour le mouton et la gloire pour le soldat
sauveur de la terre des pères !
    – Je ne le puis, ni ne le veux, dit d’Egmont.
    – Sang des victimes, dit Ulenspiegel, retombe sur la tête du
courtisan !
    Les seigneurs se retirèrent.
    Ulenspiegel alors descendit de sa cheminée et alla incontinent
apporter les nouvelles à Praet. Celui-ci dit : « D’Egmont
est traître, Dieu est avec le prince. »
    – Le duc ! le duc à Bruxelles ! Où sont les
coffres-forts qui ont des ailes ?

Partie 3

I
     
    Il s’en va, le Taiseux, Dieu le mène.
    Les deux comtes sont déjà pris, d’Albe promet au Taiseux douceur
et pardon s’il comparaît devant lui.
    À cette nouvelle, Ulenspiegel dit à Lamme :
    – Heuque de m’amie, le duc fait ajourner à comparaître devant
lui, à l’instance de Dubois, procureur général, en trois fois
quatorze jours, le prince d’Orange, Ludwig son frère,
d’Hoogstraeten, Van den Bergh, Culembourg, de Brederode et autres
amis du prince, leur promettant bonne justice et miséricorde.
Ecoute Lamme : Un jour, un juif d’Amsterdam ajourna un de ses
ennemis à descendre dans la rue ; l’ajourneur était sur le
pavé et l’ajourné à une fenêtre. « Descends donc, disait
l’ajourneur à l’ajourné, et je te donnerai un tel coup de poing sur
la tête qu’elle entrera dans ta poitrine, et que tu regarderas à
travers tes côtes comme un voleur à travers les grilles de sa
prison. » L’ajourné répondit : « Quand tu me
promettrais cent fois davantage, je ne descendrais pas
encore. » Ainsi puissent répondre d’Orange et les autres.
    Et ils le firent, refusant de comparaître. D’Egmont et de Hoorn
ne les imitèrent point. Et la faiblesse dans le devoir appelle
l’heure de Dieu.

II
     
    En ce temps-là furent décapités sur le Marché aux Chevaux, à
Bruxelles, les sires d’Andelot, les enfants de Battembourg et
autres illustres et

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