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La nef des damnes

La nef des damnes

Titel: La nef des damnes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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    Aux lectrices et lecteurs
    Qui est Tancrède le Normand ? Chacun, qu’il ait croisé son chemin, l’ait intimement connu ou qu’il ait juste entendu ou lu le récit de ses aventures, pourrait répondre différemment à cette question. Il en est même qui en viennent à douter de son existence.
    Comme vous, lectrices, et vous, lecteurs, au moment d’entamer la rédaction de cet ouvrage qui constituera le troisième tome de sa saga, je ne peux que me référer à ce qui a déjà été écrit.
    Quand, en compagnie d’Hugues de Tarse, son maître et mentor, il arrive au château de Pirou en septembre 1155 {1} , il a dix-neuf ans, lit le latin, le grec, l’hébreu et l’arabe, ne craint ni la fureur des hommes ni le feu du ciel, mais ne connaît rien de ses origines.
    Alors que la mort s’invite dans cette citadelle normande et qu’Hugues mène l’enquête, Tancrède s’entend prédire par un moine croisé sur la lande de Lessay : « Vous irez loin, fort loin, messire Tancrède. Par terre et par mer, vers des pays où l’on parle d’autres langues que la nôtre, où l’or et l’argent tapissent les murs, où les femmes sont si belles qu’on les enferme, vous serez prince parmi les princes, et mendiant aussi. »
    Et c’est seulement six mois plus tard, alors que des meurtres d’enfants sèment la terreur à Barfleur, que le jeune homme en apprendra davantage sur son passé et sa destinée en s’embarquant pour un long périple sur les flots {2} .
    Protégés par une élite de combat, les guerriers fauves, les navires transportant un trésor offert au roi de Sicile par Henri II Plantagenêt mettent le cap vers Syracuse. À bord, une demi-douzaine de passagers, marchand lombard, chevalier, géographe, et une jeune noble normande, Eleonor de Fierville, promise à un comte sicilien dont elle ne sait que le nom.
    C’est au fil des embuscades, des tempêtes, d’une série de meurtres étranges et de l’attaque portée par un inquiétant navire à la coque vert pâle qu’Hugues de Tarse révèle à son protégé qu’il est le fils bâtard d’une esclave arménienne, Anouche, et de Roger, duc de Pouilles, l’héritier préféré de Roger II de Sicile. Il s’appelle Tancrède d’Anaor, un nom que le jeune aventurier se répète comme pour l’apprivoiser alors que le détroit de Gibraltar est en vue.
    Cette porte de la mer intérieure que, si vous le voulez bien, je vous propose de franchir avec moi en tournant cette page...
    Viviane M OORE
     

 
    « Si tu ne te connais pas, sors. » Cantique des Cantiques, Cant. I, 8.

Prologue
    Certains bateaux comme certains lieux sont à part. On ne peut les regarder sans ressentir un indicible malaise. Ce n’est pas le bois dont ils sont faits, ni leur forme ni leur voilure, c’est quelque chose d’autre, de plus immatériel.
    Le paro {3} vert pâle était de ceux-là. Ancien navire d’escorte chargé de protéger les galères marchandes entre Méditerranée et Angleterre, rescapé d’un naufrage dans l’estuaire de la Gironde, il était devenu l’embarcation de pirates, des hommes sans pitié qui écumaient les côtes de l’Atlantique.
    La première chose que leur chef, le Diable de la Seudre, avait décidée lorsqu’il s’en empara était de le teindre afin que nul ne le remarque. Coque, voile, cordages, il était d’un vert si délavé qu’il se confondait avec les eaux des marais, des rivières et des fleuves où il s’embusquait pour surprendre ses proies.
    Quand on montait à son bord, le malaise se transformait en angoisse. On comprenait que le paro était maudit. Trop de cris d’agonie avaient retenti sur son pont que souillaient encore d’indélébiles traces brunâtres. L’équipage était damné, et le navire comme ses maîtres faisaient route vers l’Enfer.

 
    LE DIABLE AUX TROUSSES

 
    1
    Debout sur le château avant du paro, le Diable de la Seudre ne quittait pas des yeux les navires normands qui longeaient les côtes de l’al-Andalus : l’esnèque des guerriers fauves en tête, le knörr loin derrière.
    — Maître ?
    Le capitaine, un solide gaillard à la peau mate d’origine calabraise, venait de le rejoindre.
    — Si le vent continue à souffler comme cela, nous serons bientôt sur le knörr, déclara l’homme avec l’accent chantant de son pays. Il est trop lourdement chargé pour nous distancer. Voulez-vous que nous ralentissions notre marche ?
    Le pirate hocha simplement la tête.
    — On prend deux

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