La Rose de Sang
une reine en Espagne.
Il
perdait la tête. Zéphyrine se dégagea avec douceur, mais fermeté.
— Mon ami, si j'étais libre,
c'est avec joie que j'accepterais, mais vous devez comprendre que je ne suis
plus la même et que mon devoir...
— Vous avez retrouvé l'homme
de votre vie ! coupa amèrement don Ramon.
— J'ai retrouvé mon mari, le
père de mes enfants..., rectifia Zéphyrine, jugeant qu'il était inutile de
parler de son amour pour Fulvio.
Bien
lui en prit. Don Ramon était plus calme. Il soupira.
— Votre fuite, Zéphyrine,
m'avait accablé. Jamais je n'aurais cru pouvoir penser à une femme comme à
vous. L'empereur, si froid d'habitude, était sincèrement désolé.. Il me demanda
de vos nouvelles à plusieurs reprises, cela ne lui ressemble guère...
— Comment va-t-il ?
— L'empereur ? Mais, très
bien !
— Ses crises ?
— Mieux... La« vôtre », si
j'ose dire, a été la dernière. Tiens, c'est même curieux, on dirait que vous
l'en avez délivré... Vous savez, Charles Quint voulait réellement vous
pardonner.
— Mais... il peut toujours!
lança Zéphyrine tout à trac.
— Cela dépend de moi !
fanfaronna don Ramon.
— Je sais, Ramon. Mais je
sais aussi que vous êtes un homme trop exceptionnel pour accepter que je me
traîne à vos pieds.
— En effet, fit le grand
seigneur espagnol d'un ton dédaigneux.
Zéphyrine
ne s'avoua pas vaincue.
— Ramon, soyons amis. Je
voudrais que vous m'aimiez un peu... comme une sœur.
— Une sœur ! répéta don
Ramon, peu emballé.
— Mais oui... (Elle se
tordait les mains.) Vous êtes un être trop généreux, puissant, intelligent pour
vous venger. Vous avez trop de cœur...
La
fine Salamandre savait que l'on ne prend pas les mouches avec du vinaigre, et
les hommes encore moins.
— Conservez-moi votre
amitié, votre estime surtout, c'est ce à quoi je tiens le plus. J'y tiens
beaucoup plus que vous ne le pensez.
Elle
n'avait pas besoin de se forcer pour pleurer. Le froid don Ramon était
bouleversé.
— Séchez ces larmes,
Zéphyrine, je ne supporte pas de voir une femme pleurer, vous encore moins.
— Et moi, comment puis-je
supporter la vie... en sachant que vous me haïssez et méprisez.
— Non, Zéphyrine, j'accepte,
je serai votre ami, si c'est le prix pour continuer de vous voir, murmura-t-il,
déjà vaincu.
— Vous oublierez le passé !
— Non, je ne l'oublierai
jamais... Mais, je vous jure, Señora de mon âme, d'enfermer mes souvenirs à
double tour en ma mémoire...
— Alors, venez au château...
En ami, murmura Zéphyrine.
— En ami..., répéta don
Ramon en lui baisant la main.
Quand
Fulvio, encore en nage, rentra du jeu de paume, il trouva Zéphyrine devant la
cheminée du salon en conversation avec l'Espagnol.
—
Don Ramon de Calzada est venu nous proposer, au nom de Sa Majesté Charles
Quint, d'oublier les rancœurs passées..., dit aussitôt Zéphyrine, en allant
au-devant de son mari.
— Les temps ont changé,
l'heure est à la diplomatie, Monseigneur ! fit don Ramon, maté.
— J'en suis fort aise,
Excellence. Mais, en quoi l'empereur a-t-il besoin du prince Farnello ?
Le
Léopard se méfiait encore.
— Sa Majesté désire la paix
en Italie... Elle est navrée de l'erreur, commise à son insu, qui vous envoya
aux galères, et elle sera très satisfaite de savoir que Votre Altesse rentre
dans ses Etats... Surtout si je lui rapporte un traité d'alliance.
— Un traité d'alliance,
répéta Fulvio... m'obligerait, en cas de guerre, à porter secours aux armées de
Sa Majesté.
— Et si, Messieurs, nous
faisions plutôt traité de paix et charte d'amitié ! proposa Zéphyrine, avec son
sourire le plus angélique.
— Cette idée plaira beaucoup
à Sa Majesté ! approuva don Ramon.
Tandis
que l'on signait les parchemins, Fulvio regarda sa femme avec admiration. Il
était sûr maintenant de sa fidélité et de son amour.
Plus
rouée que son adversaire, la Salamandre avait vaincu « Charles qui triche » !
Zéphyrine
était occupée avec Fulvio et demoiselle Pluche à remplir les caisses de
vêtements, lorsqu'une dame vint frapper au château.
C'était
Louise de
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