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La Rose de Sang

La Rose de Sang

Titel: La Rose de Sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Monsigny
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un verdoyant rameau
Pendant vingt ans triomphante et finira la guerre...

Sur le milieu du grand monde la rose de sang Pour nouveaux faicts couronne public
espandu :
A dire vray on aura bouche close, diamants
Lors au besoing viendra tard l'attendu.
     
    Fulvio
et Zéphyrine comprenaient que le mage de Salon-de- Provence leur racontait rien
de moins que l'épopée du monde. Il avait vu le crime de Pizarro, il prédisait
la paix, puis des guerres fratricides de religion.
    Une
nuit, alors que Fulvio dormait, Zéphyrine se glissa hors du lit. Elle s'enroula
dans une cape pour monter chez le docteur de Nostre-Dame dans son cabinet
secret rempli de livres, cornues et cartes.
    —       Michel, mon ami, vous
m'avez sauvée à plusieurs reprises...
    —       Dans ma tête, j'ai entendu
votre appel, admit Nostradamus.
    —       Tout ce que vous m'avez
prédit m'est arrivé, Michel. Je vous en prie, pouvez-vous encore voir mon
destin ?
    De
ses longues mains blanches, Nostradamus prit l'étrange glace biseautée de forme
ovale que Zéphyrine connaissait. Il se pencha au-dessus de la surface
brillante. Zéphyrine vit le soleil se refléter à l'intérieur du miroir. Les
rayons illuminaient la pièce.
    —       Je ne vois, divine
Zéphyrine, que la gloire, le bonheur et l'amour...
    —       Mais encore ? insista
Zéphyrine.
    —       N'est-ce point assez ? fit
Nostradamus en souriant.
    Longtemps,
Zéphyrine et Nostradamus parlèrent à mi-voix. Ils avaient tant de choses à se
dire. Zéphyrine lui raconta les terribles aventures qu'elle avait vécues. Elle
parla de ses remords vis-à-vis de Fulvio.
    —       L'avez-vous trahi par la
pensée ?
    —       Non, Michel, jamais !
    —       Alors, m'amie, allez en
paix ! Notre esprit seul fabrique ombre ou lumière. Je ne vois en vous que
clarté. Conservez-lui l'éblouissement de votre cœur et la fidélité de votre
âme.
    Zéphyrine
hocha la tête. Elle comprenait ce que le mage de Salon voulait dire.
    —       Expliquez-moi un dernier
mystère, Michel. Dans vos centuries, vous parlez de roses de sang ! Pourquoi
mes enfants ont-ils ce signe sur leur corps, comme l'empereur Charles Quint et
les princes incas ? Ce signe vient-il du sang du grand Saladin ?
    —       Nos connaissances se rapportant au corps
humain sont limitées,
Zéphyrine, mais je me suis aperçu que, sautant des « générations », du grec genos [170] , on retrouve souvent les signes de la naissance d'origine. Vos enfants ont grand
destin, Zéphyrine !
    —       Oh ! dites, Michel...,
supplia la jeune femme.
    Le
coq chantait trois fois. Michel de Nostre-Dame tressaillit.
    —       Allez, maintenant, m'amie... Votre
compagnon s'éveille. Il est
votre vie !
    Zéphyrine
descendit rejoindre Fulvio dans le lit à baldaquin. A demi endormi, il remuait,
cherchait sa femme. Elle se recoucha et se pelotonna contre lui. Fulvio, son
amour !
     
    Le
lendemain, les princes Farnello partaient pour l'Italie. Zéphyrine portait dans
ses bras le petit Saladin.
    —       Adieu, Nostradamus.
    —       Adieu, divine Zéphyrine.
    Le
grand mage lui retenait la main.
    —       A moi de vous poser une
dernière question. Pourquoi m'avez-vous nommé ainsi : « Nostradamus » ?
    —       Nec pluribus impar ! répondit Zéphyrine avec charme.
    —       Nom supérieur à tous !
répéta Michel, étonné.
    —       Magister dixit (le maître l'a dit) ! fit Fulvio, amusé.
    —       Sardine ! Salamalecs !
croassa Gros Léon et le lourd carroche s'ébranla.
    Michel
de Nostre-Dame passa sa longue main sur son front pâle. A la portière,
Zéphyrine le vit qui rentrait, silhouette solitaire et noire, dans sa demeure
ocre sous les rayons du soleil.
    Les
grelots des mules tintaient sur la route. Dès que les princes Farnello eurent
franchi le Pô sur un bac halé par de solides bateliers, la population du
Piémont puis de Lombardie accourut.
    —       Le prince Farnello rentre
chez lui avec la princesse et les enfants ! criait-on de toutes parts.
    Susa...
Torino... Vercelli... Palestre... Milano... Zéphyrine reconnaissait l'odeur de
l'acanthe et du jasmin. Fulvio, ému, lui montrait les champs d'orangers,
d'oliviers et de citronniers, les coteaux couverts de vignes, les vallées
chatoyantes. Qui aurait pu croire, à voir ce pays enchanteur, qu'une guerre
terrible s'y était déroulée. Certains villages pourtant étaient encore

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