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L'âme de la France

L'âme de la France

Titel: L'âme de la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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vante la « race française », catholique, on se dit prêt au sacrifice, on institue la célébration nationale de Jeanne d'Arc.
    On manifeste. On conspue les pacifistes, les socialistes, ce « Herr Jaurès qui ne vaut pas les douze balles du peloton d'exécution, une corde à fourrage suffira »...

    En janvier 1913, une coalition rassemblant des élus traditionalistes (monarchistes), des républicains modérés, des radicaux-socialistes, élit Raymond Poincaré, le Lorrain, incarnation de l'esprit de revanche, président de la République.
    Les diplomates et les militaires, qui échappent de fait au contrôle parlementaire, trouvent ainsi au sommet de l'État un appui déterminé. Ils font de la France la clé de voûte de la Triple-Entente entre Royaume-Uni, France et Russie.
    Elle n'a pas été ébranlée par la défaite de la Russie face au Japon, en 1905, ni par la révolution qui a suivi. Elle souscrit des emprunts russes à hauteur de plusieurs milliards de francs-or. Elle appuie le tsar, qui tente de moderniser son pays sur les plans économique et politique.
    Elle ne tient aucun compte de l'agitation « bolchevique » qui se déclare hostile à la guerre contre l'Allemagne et qui, à cette « guerre entre impérialismes », oppose le « défaitisme révolutionnaire ».

    Dans cette préparation à la guerre, le haut état-major français obtient le vote d'une loi portant le service militaire à trois ans (avril 1913) pour faire face à une armée allemande plus nombreuse, la France ne comptant que quarante millions d'habitants et l'Allemagne, soixante.

    Mais ces signes, ces décisions, les initiatives françaises prises au Maroc pour y instaurer un protectorat auquel l'Allemagne est hostile, et qui manifestent une volonté d'affrontement, le choix délibéré du risque de guerre, sont contredits par d'autres attitudes.
    C'est comme si, à tous les niveaux de la vie nationale, le pays était divisé.

    D'abord, les conflits sociaux se durcissent : la troupe intervient à Draveil en 1908 et tire sur les cheminots grévistes.
    En 1909, les électriciens plongent Paris dans l'obscurité.
    Ministre de l'Intérieur, puis président du Conseil, Clemenceau réagit durement face à ce syndicalisme révolutionnaire qui paralyse les chemins de fer cependant que les inscrits maritimes bloquent les ports.
    Opposés à la troupe dans ces conflits sociaux, les ouvriers développent un antimilitarisme radical, cependant qu'en 1907 les viticulteurs ruinés par le phylloxéra réussissent à gagner à leur cause des soldats du 17 e régiment d'infanterie, qui se mutinent : « Vous auriez, en tirant sur nous, assassiné la République. »
    Ces incidents semblent miner la cohésion nationale indispensable à une entrée en guerre.

    Les socialistes sont gagnés par ce climat. Ils prônent dans leurs congrès la « grève générale » pour s'opposer à la guerre.
    « Prolétaires de tous les pays, unissez vous ! » scande-t-on.
    Cette poussée verbalement révolutionnaire fait contrepoids, en même temps qu'elle le renforce, au courant nationaliste et belliciste.
    De là ces appels au meurtre lancés contre Jaurès, le pacifiste, membre de l'Internationale socialiste, qui déclare à Bâle en juin 1912 : « Pour empêcher la guerre, il faudra toute l'action concordante du prolétariat mondial. »
    Il rêve de préparer une grève générale « préventive » pour dissuader les gouvernements de se lancer dans un nouveau conflit.
    Jaurès sous-estime ainsi la logique mécanique des blocs – à la Triple-Entente s'oppose la Triple-Alliance (Allemagne, Autriche-Hongrie, Italie). Il ne mesure pas l'engrenage des mesures militaires, les décisions d'un état-major entraînant la réplique d'un autre, et, une fois les mobilisations commencées, comment freiner un mouvement lancé, doté d'une puissante force d'inertie ?
    En outre, Jaurès ne perçoit pas que des groupes marginaux – ainsi les nationalistes serbes –, des États « archaïques » – dans les Balkans, mais la Russie est aussi l'un d'eux –, peuvent, par leurs initiatives échappant à tout contrôle, déclencher des incidents qui entraîneront dans un conflit régional les grands blocs alliés, lesquels, par leur intervention, généraliseront le conflit.

    En fait, en ces années cruciales durant lesquelles se jouent le sort de la paix et le destin de la France, le système politique de la III e  République révèle ses

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