L'Anneau d'Atlantide
cette femme pour la façon dont elle avait traité Aldo, M me de Sommières éprouva-t-elle de la pitié. Elle avait devant elle une douleur réelle et ne s’y trompait pas… Cependant, la princesse reprenait :
— Vous avez souhaité me voir au sujet d’une affaire grave, Madame. Que puis-je pour vous ?
— En réalité, je n’en sais trop rien ! C’est sur une impulsion que j’ai écrit. Vous êtes une très grande dame, très puissante sans doute parmi les gens de ce pays, et c’est pour tenter de venir en aide à l’un de mes compatriotes qui m’est extrêmement cher, bien que nous ne soyons pas du même sang mais que je sais être le plus sincère et le meilleur homme de la terre.
— Qui est-il ? Je veux dire, comment s’appelle-t-il ?
— Adalbert Vidal-Pellicorne… de l’Institut. Un savant et certainement l’un de nos plus brillants archéologues. Or, il s’en faut de peu qu’il ne soit jeté en prison pour un crime abominable… simplement parce qu’il en a été le témoin horrifié et impuissant. J’ajoute qu’une jeune fille à laquelle vous accordez votre protection, et je pense votre amitié, en a été victime elle aussi quoique de façon différente, puisque au lieu de la faire passer de vie à trépas on s’est contenté de l’enlever…
L’attention d’abord flottante et de pure politesse de Shakiar se fixa aussitôt :
— Vous parlez de l’assassinat de Karim El-Kholti ?
— … et de son serviteur ? Oui, princesse !
— Que savez-vous à ce sujet ? fit-elle, soudain fébrile.
— Ce qu’en a dit l’intéressé. Séjournant depuis deux ou trois jours chez ce jeune homme, Adalbert venait de se mettre à table avec lui pour le dîner quand M lle Hayoun est arrivée en coup de vent et a supplié M. El-Kholti, à qui semblait l’attacher… je dirai un grand amour, de fuir sur-le-champ avec elle. Il fallait, assurait-elle, profiter de l’absence d’Ali, votre frère, Madame, à qui elle avait dû se fiancer par contrainte, pour prendre le large. Oh, elle n’a pas eu à prier longtemps et M. El-Kholti n’a pas tergiversé, c’est alors que la maison a été envahie par une dizaine de Nubiens qui ont poignardé le jeune homme et son domestique avant d’emporter Salima en dépit d’une défense désespérée.
— Et… votre ami n’a rien tenté pour secourir son hôte ?
— Cela se passait dans le patio de la maison et il se trouvait dans la salle à manger dont il avait éteint la lumière pour ne pas paraître indiscret durant l’entretien des deux jeunes gens. Tout s’est déroulé à une vitesse vertigineuse et, quand il aurait pu intervenir, il était trop tard. Les agresseurs ont jeté M lle Hayoun dans une voiture qui a démarré sur les chapeaux de roues… Voilà l’histoire, Madame ! De plus, le chef de la police refuse d’y croire et tient absolument à ce que notre pauvre Adalbert soit le meurtrier.
— C’est un imbécile borné qui ne s’intéresse qu’à l’argent… et aux pistaches ! commenta Shakiar avec une amère ironie. Mais pourquoi pensez-vous que je puisse vous apporter de l’aide ?
— Parce que vous êtes impliquée ! assena Tante Amélie en la regardant droit dans les yeux. Salima a dit que vous l’aviez pressée de profiter de l’absence de votre frère pour s’enfuir avec son amoureux.
— C’est le récit de votre ami ?
— Évidemment ! Pourquoi l’aurait-il caché ? Si ce Keitoun était un policier honnête, il se serait déjà présenté ici pour vous demander de confirmer.
La princesse détourna la tête, cependant que le mépris incurvait ses lèvres et que son regard allait s’égarer dans les profondeurs du jardin :
— Il n’oserait pas ! Sait-on d’autres nouvelles ?
— Nous avons appris la dernière à midi : Karim El-Kholti vient de succomber à ses blessures. En revanche, son serviteur lutte encore contre la mort et je prie Dieu pour que celui-là au moins survive ! Pourtant, il n’est pas le seul à pouvoir nous apprendre la vérité. Il reste M lle Hayoun et c’est cela, princesse, que je suis venue vous demander. Elle a été témoin du drame et comme je suppose qu’elle est ici…
— Ici ? Mais qu’est-ce qui peut vous le faire supposer ?
— La plus élémentaire logique : le prince Ali a repris, par la force, celle qu’il doit considérer
Weitere Kostenlose Bücher