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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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commanda-t-il.
    Ledit ennemi n’était autre qu’Edward O. Kelly,
qui avait sombré dans la dipsomanie et la dépression depuis son altercation
avec Bob et avait fait le voyage jusqu’à Creede sans espoir ni projet précis. Les
services de police de Pueblo avaient fait pression sur lui pour qu’il prît en
charge les frais de l’opération du gardien du Phoenix Hotel par un médecin de
la Quatrième Rue, ce qui avait à tel point exacerbé son inepte ressentiment qu’il
avait abattu un homme de couleur nommé Ed Riley pour une simple maladresse. Le
sectarisme ordinaire de l’époque avait sauvé Kelly ; il n’avait pas été
inculpé ni, a fortiori, condamné, mais il avait été radié de la police
et réduit à conduire des tramways ou à mendier sur le trottoir jusqu’à ce qu’il
eût assez économisé pour un billet à destination de Creede.
    Il s’était aussitôt dirigé vers l’Exchange
Club, en avait détaillé l’outrance, avait crispé, puis décrispé ses doigts
devant le feu, puis quand une hôtesse s’était approchée, avait eu le culot de
réclamer un whisky à titre gracieux d’une voix bourrue que Bob avait identifiée
sur-le-champ.
    Conformément aux instructions de son patron, l’hôtesse
regagna le bar avec le whisky sur son plateau et Bob, imperturbable, s’arrêta
auprès d’une table de poker afin d’étudier la dextérité d’un croupier qu’il
venait d’embaucher. Bob empila ses jetons en surveillant dans un miroir en
hauteur Kelly qui ôtait son long manteau de laine et débattait en son for
intérieur. Il paraissait agité, déséquilibré, on lui eût donné cinquante ans, alors
qu’il devait en avoir trente-cinq et, lorsqu’il rajusta son pistolet à canon
long, Bob discerna en lui une certaine parenté avec Wood Hite. Kelly portait
une veste de policier dont les boutons d’insignes avaient été décousus, ainsi
qu’une cartouchière et un ceinturon qui bissectaient sa silhouette en son
milieu. Kelly réacclimata sa main droite au contact de son pistolet et lui
ménagea un peu de jeu dans son étui en cuir fendillé en fendant la foule en
direction de celui qu’il considérait comme son persécuteur.
    Kelly dégaina et une serveuse s’écria :
    « Il va te tuer ! »
    Mais Bob se contenta de sourire et, imitant
Jesse, s’avança vers Kelly avec aménité, les bras écartés comme s’il eût voulu
embrasser l’humanité entière et toute l’assistance en particulier.
    « Allons, le passé est le passé ! »
s’exclama-t-il.
    Il eut un sourire si amical que Kelly en fut déconcerté
et hésita juste assez pour que Bob eût le temps de le gifler par surprise de la
main droite et d’empoigner le revolver de la gauche, déséquilibrant Kelly qui
chancela de côté tandis que Bob le désarmait, puis lui décochait son genou
droit dans la bouche. L’ex-policier s’effondra, la lèvre supérieure ouverte, Bob
le frappa cruellement à la tête avec le pistolet à canon long et le coup
résonna comme sur du bois.
    « Dégage ! cria Bob. Dégage et ne
remets plus jamais les pieds chez moi !
    — Si je veux », riposta Kelly.
    Bob tapa du pied sur le plancher et Kelly
recula, recroquevillé derrière son bras levé. Bob s’esclaffa, mais n’insista
pas et revint à sa table dans le coin en acceptant les claques dans le dos des
joueurs approbateurs. Puis il se rassit avec sa clique, sans prêter gare à
toutes les plaisanteries, et fixa Kelly se frayer un passage jusqu’à son
manteau, puis sortir dans la nuit et la neige qui tombait en tempête.
    « Ça ne s’arrête jamais, lâcha-t-il.
    — Je n’ai pas entendu », fit Dorothy,
mais Bob ne répéta pas.
    Soapy Smith enfila son manteau en vison noir
et s’aventura dehors à la suite de Kelly. Il le rattrapa sous une lampe à arc
et l’aborda avec compassion. Du sang dégouttait du menton de l’ancien policier
et il crachotait des fragments de dents semblables à des graviers.
    « C’est la deuxième fois que j’essaye de
me faire cet enfant de putain », confessa Kelly.
    Soapy lui passa un bras autour du cou.
    « Et si on allait voir si on peut vous
faire recoudre ? »
    Le lendemain
après-midi, par le truchement du juge de paix, Soapy Smith s’arrangea pour
rencontrer Bob Ford dans ses appartements au-dessus du saloon afin de le
complimenter quant au sang-froid dont il avait fait preuve avec cet agitateur. Bob
reçut l’escroc d’assez bonne grâce, lui offrit un fauteuil en

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