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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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demandai-je.
    — De l’autre côté de la route, en face.
    — Wæclingastræt ?
    Il opina. Ainsi, il parlait aux Danes autant
qu’aux morts. Wæclingastræt est la route qui mène de Lundene vers le nord-ouest.
Elle traverse l’Anglie et aboutit à la mer d’Irlande, au nord des Galles. Tels
étaient les termes de la paix que nous avions conclue en cette année 885, une
paix ponctuée d’escarmouches et de haine.
    — Est-ce un mort dane ?
    — Il se nomme Bjorn, répondit-il. C’est
un scalde de la cour de Guthrum qui l’a tué parce qu’il refusait de se faire
chrétien. Il peut être invoqué sur son tombeau. Je l’ai vu.
    Je regardai Gisela, qui était dane. La
sorcellerie n’appartenait pas au monde des Saxons comme moi. Elle haussa les
épaules, indiquant que cela lui était tout aussi étranger.
    — Qui l’invoque ? questionna-t-elle.
    — Un cadavre récent, répondit-il.
    — Comment cela ? demandai-je.
    — Il faut envoyer quelqu’un au royaume
des morts, expliqua-t-il, comme si c’était une évidence. Pour qu’il fasse
revenir Bjorn.
    — Alors on tue quelqu’un ? interrogea-t-elle.
    — Comment voudrais-tu envoyer un messager
auprès des morts ? répondit-il avec véhémence.
    — Et ce Bjorn, il parle l’anglois ? demandai-je,
sachant qu’Æthelwold pratiquait fort peu le danois.
    — Oui, répondit-il à contrecœur, d’évidence
agacé par les questions.
    — Qui t’a conduit à lui ?
    — Des Danes, répondit-il vaguement.
    — Alors, des Danes sont venus te dire qu’un
poète mort voulait te parler et tu t’es rendu sur les terres de Guthrum ?
    — Ils m’ont payé d’or.
    Æthelwold était toujours criblé de dettes.
    — Et pourquoi venir nous voir ? demandai-je.
(Il ne répondit pas et regarda Gisela qui filait la laine.) Tu vas chez Guthrum,
insistai-je, tu parles à un mort et tu viens me voir. Pourquoi ?
    — Parce que Bjorn a dit que tu serais roi,
toi aussi, expliqua-t-il.
    Il n’avait pas haussé la voix, mais je levai
la main pour le faire taire et jetai un regard inquiet vers la porte comme si
je craignais qu’un espion ne nous écoute d’une pièce voisine. Alfred en avait
posté chez moi et je savais qui ils étaient, mais je n’étais pas sûr de les
avoir tous démasqués et je devais m’assurer que nous étions seuls quand je
parlais avec Æthelwold. Cependant, il n’était pas prudent de dire de telles
choses à voix haute.
    Gisela s’était interrompue et le fixait, tout
comme moi.
    — Qu’a-t-il dit ? demandai-je.
    — Que toi, Uhtred, dit-il en baissant la
voix, tu serais couronné roi de Mercie.
    — Aurais-tu bu ?
    — Non, seulement de l’ale. Bjorn le Mort
souhaite te parler aussi pour t’annoncer ta destinée. Toi et moi, Uhtred, nous
serons rois et voisins. Les dieux le veulent et ils ont envoyé un mort nous le
dire.
    Il frissonnait et transpirait, mais il n’était
pas ivre. Quelque chose l’avait terrifié, et cela me convainquit qu’il disait
vrai.
    — Ils veulent savoir si tu acceptes de
voir le mort, reprit-il. Et si tu l’es, ils te feront chercher.
    J’interrogeai du regard Gisela, qui ne broncha
pas. Je n’attendais pas de réponse, mais je continuai de la dévisager, elle
était belle, très belle. Ma brune Dane, ma chère Gisela, mon épouse et amour. Elle
dut deviner mes pensées, car un sourire se peignit sur son long visage grave.
    — Uhtred sera roi ? demanda-t-elle.
    — Ainsi le dit le mort, répondit Æthelwold.
Et Bjorn l’a appris des trois sœurs.
    Il parlait des Nornes, les trois sœurs qui
tissent notre destinée.
    — Uhtred, roi de Mercie ? reprit Gisela,
sceptique.
    — Et tu seras reine.
    Elle me regarda, perplexe, mais je ne tentai
pas de répondre, car je savais ce qu’elle pensait. Je songeais qu’il n’y avait
pas de roi de Mercie. L’ancien, un laquais que les Danes tenaient en laisse, était
mort, et nul ne lui avait succédé, le royaume étant partagé entre Danes et
Saxons. Le frère de ma mère était un ealdorman de Mercie avant d’être tué par
les Gallois, et j’avais du sang mercien. Et il n’y avait pas de roi en Mercie.
    — Je crois qu’il faudrait que tu ailles
entendre ce mort, dit Gisela d’un ton grave.
    — Si on me fait mander, promis-je, j’irai.
    Certes, puisqu’un mort parlait et voulait que
je devienne roi.
    Alfred arriva une
semaine plus tard, par une belle journée où le soleil brillait bas dans le ciel
pâle. Dans

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