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Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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damassé, lui laissant le faudesteuil tendu de velours marine.
    — Ma tenue laisse à désirer et je m'en excuse. Votre impatience…
    La paume de Marie s'envola dans un geste aérien.
    — Point de cela entre nous. Tous ces matins à Saint-Just dans la pénombre du dortoir des moniales à s'habiller en silence l'une devant l'autre m'ont appris à me défier de ces futilités.
    Saint-Just-de-Claix. Sœur Marie. Elle était novice lorsque Philippine avait quitté l'abbaye. Un franc sourire illumina les traits jusque-là inquiets de la damoiselle de Sassenage.
    — Je vous croyais destinée à embrasser les ordres et je vous retrouve ici, si transformée que, je l'avoue piteusement, j'ai eu du mal à vous reconnaître.
    Un petit rire clair franchit la barrière des lèvres finement ourlées de Marie.
    — À dire vrai, je m'en doutais.
    Les souvenirs affluaient à présent. Un peu plus jeune qu'elle, Marie avait été admise à Saint-Just six mois avant le départ de Philippine. Éteinte alors entre les murs du couvent qu'elle arpentait d'un pas traînant, elle rayonnait à présent. Philippine se pencha pour lui prendre les mains, rattrapée par un élan de sympathie.
    — Allons, racontez-moi ce qui exigeait tant de célérité.
    — Vous souvenez-vous de Laurent de Beaumont, seigneur de Saint-Quentin, qui se battit pour vous sous les murs mêmes de l'abbaye ?
    — Parfaitement. Il m'écrit encore de temps en temps une flamme que je ne partage pas.
    L'œil de Marie se fit douloureux. Visiblement Laurent de Beaumont ne lui était pas indifférent. Philippine s'en voulut aussitôt.
    — Je vous ai blessée, pardonnez-moi.
    Redressant son buste qui s'était voûté l'instant d'avant, Marie soupira.
    — Vous n'en êtes pas responsable. Vous l'avez dit. Il vous aime, vous ne l'aimez pas. Après votre départ précipité de Saint-Just, c'est moi qui, vous succédant auprès de sœur Albrante, me suis occupée de lui et de messire de Montoison à l'hospice.
    — Je vois, assura Philippine en lui rendant ses doigts qu'elle porta sagement à hauteur des genoux, sur le taffetas soyeux d'une robe perlée de fleurettes multicolores.
    — Je l'ai aimé dès le premier jour où il franchit les portes de Saint-Just. Mais c'est vous qu'il remarqua la première. Vous qu'il accompagna sous les frondaisons des vergers, persuadé que vous vous accordiez à sa flamme.
    — J'ai été bien punie de mon égarement. Je le suis encore, Marie, mais je conçois que vous m'en vouliez ce jourd'hui.
    — Oh ! mais je ne vous en veux pas, s'écria la jouvencelle, rouge de honte d'avoir pu le laisser croire.
    Philippine ne douta pas de sa sincérité. Tout lui revenait à présent de cette damoiselle si discrète et effacée, si charitable et empathique, qui dardait sur elle de grands yeux contrits.
    — J'ai besoin de votre aide, Philippine, souffla-t-elle, le fard plus accentué encore.
    Philippine hocha la tête, le sourire engageant.
    — Je vous écoute.
    — Puis-je en ce cas vous parler en toute franchise et sans crainte de jugement ? s'inquiéta encore Marie.
    — Sans crainte. Mais de grâce, appelez-moi Hélène ainsi que mes proches le font désormais.
    — Ce sera avec bonheur, affirma Marie en rosissant de plaisir avant de poursuivre. Comme je vous l'ai dit, jusqu'à son départ, j'ai veillé sur lui, espérant qu'il me remarque et se console de votre rejet. Il l'a fait. Mais pas comme je l'espérais, hélas. Il m'a…
    Elle déglutit et, craignant ce pire auquel elle-même avait été confrontée, Philippine la couva d'un air compatissant.
    — Poursuivez, Marie…
    Elle était blanche.
    — Si messire de Montoison ne s'était pas éveillé à ce moment-là… ma vertu…
    Elle se mit à trembler mais redressa le menton, comme il convient lorsqu'on expie chaque jour avec dignité le poids de ses péchés.
    — Sœur Albrante a compris quel tourment de chair j'avais approché et ce feu qui me rongeait encore. Il n'avait rien de sacré, en vérité. Seuls mes parents tenaient à me voir moniale. Comme vous, chère Hélène, je rêvais d'amour, comme vous je m'y suis brûlée. Sœur Albrante a été parfaite. Il m'a suffi de répéter les arguments qu'elle m'avait donnés pour convaincre la mère supérieure et mes parents de mon manque de vocation à la vie religieuse. Je suis donc rentrée chez moi, ici, à Romans. Mon père y est drapier.
    — Et Laurent de Beaumont ?
    — Là est mon châtiment. Je n'ai

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