le collier sacré de Montézuma
viennent ?
— Ça, oui ! De New York. Ils ont débarqué du Liberté le 1er septembre au Havre.
— De New York ? Qu’est-ce qu’ils y faisaient ? demanda Vidal-Pellicorne.
— Réfugiés chez des amis, tout simplement. Ils ont dû fuir le Mexique où leurs domaines leur ont peut-être été enlevés pour être redistribués dans le cadre d’une réforme agraire. Ils ont dû rassembler tout ce qu’ils pouvaient emporter.
— … sans oublier une fille ravissante, un peu amorphe peut-être mais dont la beauté exceptionnelle représentait leur chance de se refaire ! jeta Morosini, méprisant. Il suffisait de trouver un… amateur – pour ne pas dire un pigeon ! – suffisamment riche pour se charger de les remettre à flot ! Je sais que ce n’est pas nouveau… Mais cela aurait pu marcher aussi aux États-Unis ? Pourquoi venir en France ?
— Retrouver d’anciennes racines. Ne vous y trompez pas, Morosini, leur noblesse est authentique et leurs ancêtres se sont emparés de l’Empire aztèque avec Cortés…
Cette fois, Aldo prit feu :
— Des gens bien sous tous rapports, à ce qu’il semble ? lança-t-il, furieux. On a peine à croire qu’ils ont peut-être assassiné un type sympathique après l’avoir ficelé dans un mariage républicain pour mieux le dépouiller !
— Allons, calmez-vous ! Je ne fais qu’exposer des faits connus, ce qui ne veut pas dire que nous nous désintéressons du sort de Vauxbrun. S’ils l’ont tué, je vous jure qu’ils le paieront, fussent-ils cousins du roi d’Espagne !
— Et moi, je vous certifie que je ne les lâcherai pas tant que je ne saurai pas la vérité !
— Eh bien, on se retrouve au même point que tout à l’heure, soupira Langlois. Il ne me reste qu’à vous répéter : pas d’imprudences ! Faites attention, je vous en conjure !
Il semblait réellement inquiet, ce qui s’accordait si mal à son flegme quasi britannique habituel qu’Adalbert se demanda s’il leur avait dit vraiment ce qu’il savait. Il n’en garda pas moins sa réflexion pour lui. Aldo se faisait déjà un sang d’encre ; il était inutile d’en rajouter.
4
LE MARCHÉ
— Plan-Crépin, dit M me de Sommières en reposant sa tasse à café vide, vous prierez Lucien de tenir la voiture prête pour quatre heures !
— Nous sortons ?
— Si par nous sortons vous entendez vous et moi, c’est non. Je sors seule !
La surprise fut telle que la vieille fille en oublia sa bonne éducation et demanda, déjà pincée :
— Et pourquoi sans moi ?
— Parce que, là où je vais, je préfère que l’on ne vous voie pas trop. Je tente une démarche purement privée dont je ne sais ce qu’il en sortira. Il me semble que cela passera mieux si elle est sans témoins. Et ne faites pas cette tête-là ! ajouta-t-elle en voyant rougir le nez pointu de sa lectrice, signe certain qu’elle allait renifler des larmes avant peu. Vous n’êtes pas frappée d’ostracisme ! Simplement, si elle ne tourne pas au face-à-face musclé, une conversation à deux peut se révéler plus profitable qu’à trois !
— Oserai-je demander où nous allons ?
— Rue de Lille ! Je désire m’entretenir avec Doña Luisa !
— Aldo est au courant ?
— Évidemment non. Mais… si à sept heures je ne suis pas rentrée, vous, vous pourrez lui dire d’envoyer Langlois m’extraire de l’oubliette où je commencerai peut-être à dessécher, conclut-elle, narquoise.
— Je… je ne peux même pas rester dans la voiture ?
— Qu’y feriez-vous, sinon vous geler ? Je vous rappelle que nous avons Romuald dans la place. Cela devrait vous rassurer !
À quatre heures et demie précises, la vénérable Panhard noire de la marquise, toujours si admirablement entretenue qu’elle jouait sans peine les objets de collection, stoppait devant le portail de l’hôtel Vauxbrun. Lucien, en impeccable livrée gris fer, en descendit, sonna et remit au concierge la carte de visite de la marquise de Sommières en ajoutant que la noble dame souhaitait quelques instants d’entretien avec M me la marquise de Vargas y Villahermosa. Un instant plus tard, la porte cochère s’ouvrait devant la voiture que le chauffeur vint arrêter exactement devant le perron où se tenait déjà un Romuald aussi solennel qu’un butler anglais. Il en franchit les marches pour aider la visiteuse à descendre de voiture puis la précéda dans le vestibule et, après
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