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Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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sais rien d’autre. Pour le reste, j’ai pratiqué les rites de mon peuple afin que les esprits apaisent l’âme d’Élodie et confondent son meurtrier. J’ai parlé.
    Le lieutenant général de police fit un signe discret au commissaire d’avoir à passer outre sur ce point particulier qui risquait de ramener trop directement le débat sur la parenthèse démoniaque de la possession de la Miette.
    — Quels sentiments vous inspirait la réputation faite à Élodie ?
    — Nous avions décidé de donner le change. Ainsi, jouait-elle la comédie. Elle s’exerçait en lisant les dialogues de M. de Marivaux. Nous riions ensemble des tentatives de Jean Galaine et de Louis Dorsacq qui s’évertuaient à la séduire. Élodie scandalisait aussi ses tantes par des propos légers et ambigus qui confirmaient ce qu’elles pouvaient penser d’elle. Derrière ce paravent de faux-semblants, nous étions — du moins, nous avions la faiblesse de le croire — dissimulés et protégés.
    — Est-ce tout ? Avez-vous autre chose à confier à la Cour ?
    — Je veux bien tout révéler à celui qui m’a sauvé la vie !
    — Ne croyez pas cela, votre blessure n’était pas mortelle.
    — Si vous n’étiez pas monté, la vie allait s’échapper avec mon sang.
    Semacgus, sur lequel Nicolas jeta un œil, approuvait.
    — Soit, je vous écoute.
    — Comme l’homme de la pierre m’a sauvé, j’ai vu Élodie tuée par…
    M. de Sartine s’agita à nouveau et interrompit l’Indien au grand désespoir de Nicolas.
    — Monsieur le commissaire, ne nous égarons pas dans des voies traversières. Veuillez poursuivre.
    Naganda se rassit. Nicolas saisit le flacon d’apothicaire, et, tenant l’objet au bout des doigts, le promena sous le regard des suspects en observant leurs réactions. Ils suivaient son manège du regard sans ciller.
    — Qui d’entre vous connaissait ce flacon ?
    Les mains de Jean Galaine et de Charlotte, la sœur aînée, se levèrent. Qui devait-il interroger en premier ? Il se doutait de ce qu’allait révéler le fils Galaine, puisqu’il se proposait de parler. Il avouerait sa visite chez l’apothicaire de la rue Saint-Honoré. Nicolas se décida donc pour Charlotte.
    — Mademoiselle, que pouvez-vous nous dire là-dessus ?
    — En toute franchise, monsieur le commissaire, c’est ma sœur, ma sœur Camille. Elle n’a plus sa tête, elle dort fort mal. Elle prend des potions dans des flacons identiques, qu’on lui prépare chez l’apothicaire.
    — C’est exact, monsieur le commissaire, intervint la cadette, je dors mal et use de fleur d’oranger pour m’inciter au sommeil.
    — Puis-je vous faire observer qu’on achète ce produit chez tous les épiciers. Pourquoi avoir recours à votre apothicaire ?
    — C’est l’habitude, et son efficacité est plus grande ; je crains que les épiciers ne la coupent. Ainsi, un jour…
    Nicolas l’interrompit.
    — Y a-t-il longtemps que vous en avez acheté ?
    — Trois semaines environ, peut-être plus. Je donne du lait au chat et une petite cuillerée dans ma tasse en même temps… et encore… pas tous les soirs.
    — Vous êtes-vous procuré une autre potion ces derniers jours ?
    Charlotte reprit la parole devant l’hésitation de sa sœur.
    — Certes oui, Camille ! Décidément, tu perds la tête avec tout ce charivari ! Jean est allé te chercher un flacon chez Maître Clerambourg, notre voisin. Cela avait bon goût et tu as voulu que j’en prenne aussi.
    Camille, ahurie, regardait sa sœur sans savoir que dire.
    — Si tu le dis… Mais vraiment, je ne sais plus et quelle importance d’ailleurs ?
    Nicolas se tourna vers Jean Galaine.
    — Monsieur, vous confirmez ?
    — Tout à fait. Je suis allé, à la demande de mes tantes, acheter un flacon de laudanum.
    — Vos tantes, dites-vous ? Laquelle ?
    — Je l’ignore.
    — Comment pouvez-vous l’ignorer ?
    — La demande m’a été présentée par la cuisinière, à qui, d’ailleurs, j’ai remis le flacon.
    Enfin, songeait Nicolas, voilà un élément nouveau de première main. Cette Marie Chaffoureau, à qui l’on eût donné le Bon Dieu sans confession, avait dissimulé son rôle dans cette affaire.
    Il se tourna vers la cuisinière.
    — Qu’est-ce à dire, Marie, et pourquoi m’avoir caché ce point particulier ? Nous avions pourtant longuement évoqué ensemble ce problème de flacon. Qui vous a chargée de faire acheter ce laudanum,

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