Le Huitième Péché
magasin de la Ludwigstraße. Il était environ 16 h lorsqu’il y arriva. Il vérifia que personne ne l’observait avant d’entrer dans la boutique. Un homme grand et élégant en sortait justement, un paquet sous le bras. Malberg le vit monter dans une grosse voiture qui l’attendait. Elle démarra et prit la direction du centre-ville.
— Vous, monsieur Malberg ? s’étonna mademoiselle Kleinlein en le voyant entrer. Vous ne me croirez jamais si je vous raconte tout ce qui s’est passé ici. La police est déjà venue deux fois !
— Je sais, je sais, dit Malberg en s’efforçant de calmer sa gérante.
Il l’entraîna dans l’arrière-boutique, où se trouvait le bureau. Il lui expliqua brièvement les événements qui s’étaient produits, et l’assura qu’il n’avait rien à voir avec l’assassinat de Marlène. Il ajouta au passage que l’achat de livres chez la marquise avait échoué au dernier moment.
— J’ai besoin d’argent, dit-il lorsqu’il eut terminé.
— Pas de problème, dit mademoiselle Kleinlein. Je viens de vendre à l’instant l’exemplaire des Chroniques de Nuremberg , pour quarante-six mille euros.
Elle ouvrit une boîte métallique posée sur le bureau, dans laquelle elle conservait habituellement les recettes du jour.
— Un Russe ou un Ukrainien, ajouta-t-elle. Un connaisseur. Il n’a même pas essayé de marchander et il a payé cash.
Malberg considéra d’un œil satisfait les liasses de billets de cinq cents euros. Il examina de plus près l’un des billets et estima qu’il était authentique.
— Consignez dans les comptes : dix mille euros à usage personnel, et déposez le reste à la banque. Ah, autre chose !
Malberg sortit de sa poche le livre qu’il avait pris dans l’appartement de Marlène, dont il retira le chèque de banque qu’il portait sur lui depuis des jours.
— Veuillez aller restituer ce chèque et demandez un reçu. Mais soyez vigilante ! Vous savez que n’importe qui peut l’encaisser ; si vous le perdiez, ce serait une catastrophe !
Mademoiselle Kleinlein hocha la tête, visiblement vexée. Fallait-il vraiment que Malberg lui explique ce qu’était un chèque de banque ?
— Et que va-t-il se passer ? Je veux dire, que faisons-nous maintenant ? Avez-vous l’intention d’aller à la police ? demanda prudemment l’employée.
— Absolument pas ! grogna Malberg. Avant que quelqu’un se soit rendu compte que j’étais là, j’aurai déjà disparu. Il faut que je retourne à Rome, car il n’y a que là-bas que j’arriverai à savoir ce qui s’est vraiment passé. Vous vous en tirerez très bien, toute seule, pendant quelques semaines. Vous me tiendrez au courant par téléphone, mais pas d’ici, ni sur mon téléphone mobile. Toutes les lignes doivent déjà être sur écoute. Y a-t-il quelqu’un en qui vous ayez confiance, chez qui je pourrais, le cas échéant, laisser un message ?
— Ma sœur Margot, répondit mademoiselle Kleinlein.
Elle nota son numéro sur un bloc-notes, puis arracha la feuille qu’elle tendit à Malberg.
— Vous devriez jeter un œil au courrier, ajouta-t-elle en montrant un tas de lettres. Je crois qu’il y a aussi des choses pour vous.
Elle mit de côté dix mille euros puis fourra le reste de l’argent et le chèque de banque dans son sac à main.
— Dépêchez-vous, les banques ne vont pas tarder à fermer ! lui cria encore Malberg avant de verrouiller la porte du magasin derrière elle, et d’y accrocher la pancarte « Fermé ».
Le bureau n’était éclairé que par une toute petite fenêtre grillagée qui s’ouvrait sur la cour intérieure. Le soleil n’entrait pas dans la pièce, pas même en été. Bien qu’il fît encore jour, Malberg dut allumer la lampe à abat-jour jaune, un chef-d’œuvre de mauvais goût datant des années 1930.
À l’aide d’un coupe-papier, il commença à ouvrir les lettres empilées devant lui. Il avait l’esprit tout à fait ailleurs lorsque son regard tomba sur le bloc-notes dont mademoiselle Kleinlein avait arraché un feuillet, quelques minutes auparavant.
Malberg écarta un courrier sans importance et se mit à crayonner la première feuille du bloc-notes en inclinant la mine, comme il le faisait lorsqu’il était enfant, pour décalquer des pièces de monnaie.
Après quelques coups de crayon, il vit apparaître le numéro de téléphone que mademoiselle Kleinlein venait d’écrire.
Subitement, il
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