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Le Journal D'Anne Frank

Le Journal D'Anne Frank

Titel: Le Journal D'Anne Frank Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Frank
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quand je leur aurai fait comprendre que ce n’est pas à mon éducation mais à la leur qu’ils devraient s’attaquer d’abord. En voilà des façons ! Bande de rustres. Jusqu’à présent, je reste sans voix devant tant de grossièreté et surtout… de bêtise (Mme Van Daan !), mais dès que j’y serai habituée, et cela ne saurait tarder, je leur rendrai la monnaie de leur pièce sans me gêner, et ils seront bien obligés de changer de ton ! Suis-je vraiment aussi mal élevée, prétentieuse, têtue, indiscrète, bête, paresseuse, etc., qu’ils veulent bien le dire là-haut ? Mais non, sûrement pas, je sais bien que je n’ai pas toujours raison et que j’ai beaucoup de défauts, mais tout de même, ils y vont un peu fort ! Si tu savais, Kitty, comme il m’arrive d’écumer sous ces bordées d’injures et de sarcasmes et le moment n’est plus très éloigné où toute ma colère rentrée explosera.
    Bon, j’arrête sur le sujet, je t’ai assez ennuyée avec mes histoires de disputes et pourtant je ne peux pas m’empêcher de te raconter une autre discussion de table du plus haut intérêt. De fil en aiguille, on en était venus à parler de l’extrême modestie de Pim. Cette modestie est un fait établi dont les gens les plus idiots ne sauraient douter. Soudain, Madame, qui veut toujours être le point de mire de la conversation, s’est exclamée : « Moi aussi, je suis très modeste, bien plus modeste que mon mari ! »
    On n’a pas idée ! Cette phrase illustre bien sa modestie !
    M. Van Daan, se sentant obligé d’expliquer ce « que mon mari », a remarqué d’un ton très calme : « Je ne cherche pas du tout à être modeste, j’ai eu l’occasion de m’apercevoir dans ma vie que les gens sans modestie font beaucoup mieux leur chemin que les modestes ! » Puis se tournant vers moi : « Ne sois surtout pas modeste, Anne, car cela ne t’avancera à rien. » Maman approuvait tout à fait ce point de vue.
    Mais comme toujours, il fallait que Mme Van Daan ajoute son grain de sel à cette discussion éducative, cependant cette fois, au lieu de s’en prendre directement à moi, elle s’est adressée à mes parents en ces termes : « Vous avez tout de même une curieuse conception de la vie, de dire une chose pareille à Anne, dans mon jeune temps, il en allait autrement, mais d’ailleurs, je suis sûre qu’il en va toujours autrement, sauf dans une famille moderne comme la vôtre ! » Cette dernière remarque visait les méthodes d’éducation modernes si souvent défendues par Maman.
    Mme Van Daan était cramoisie d’excitation. Quelqu’un qui rougit s’excite encore plus en s’échauffant et perd vite ses moyens devant l’adversaire. Maman, sans rougir, elle, et voulant en finir le plus vite possible avec cette discussion, n’eut besoin que d’un instant de réflexion avant de répliquer : « Madame Van Daan, moi aussi, vous savez, je trouve bien préférable d’être un peu moins modeste dans la vie. Mon mari, Margot et Peter sont tous les trois extrêmement modestes ; votre mari, Anne, vous et moi ne sommes pas modestes, mais nous ne nous laissons pas marcher sur les pieds à tout propos. »
    Mme Van Daan : « Mais, madame, je ne vous comprends pas, je suis vraiment très très modeste, qu’est-ce qui vous prend de me dire que je ne suis pas modeste ? » Maman : « Je n’ai rien dit de tel, mais personne n’aurait l’idée de vous qualifier de modeste. »
    Madame : « J’aimerais bien savoir en quoi je manque de modestie ! Si je ne m’occupais pas de moi, personne d’autre ne le ferait, et je n’aurais plus qu’à mourir de faim,.et c’est bien la preuve que je suis tout aussi modeste que votre mari. »
    Devant ce plaidoyer ridicule, Maman n’a pu s’empêcher de rire, Madame s’en est irritée et a poursuivi son beau discours par une longue série de superbes expressions germano-néerlandaises ou néerlando-germaniques, jusqu’au moment où cette oratrice-née s’est tellement empêtrée dans ses mots qu’elle a voulu se lever de sa chaise et quitter la pièce, lorsque soudain son regard est tombé sur moi. J’aurais aimé que tu sois là pour le voir, par malheur, juste au moment où Madame nous tournait le dos, j’avais secoué la tête d’un air atterré et ironique, sans le faire exprès et bien involontairement, tant j’avais été fascinée par son flot de paroles, alors Madame est revenue sur ses pas et

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