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Le Livre De Ma Mère

Le Livre De Ma Mère

Titel: Le Livre De Ma Mère Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert Cohen
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    Peu
de livres ont connu un succès aussi constant que Le livre de ma mère . Ce livre
bouleversant est l’évocation d'une femme à la fois « quotidienne » et
sublime, une mère, aujourd'hui morte, qui n'a vécu que pour son fils et par son
fils.
    Ce
livre d'un fils est aussi le livre de tous les fils. Chacun de nous y
reconnaîtra sa propre mère, sainte sentinelle, courage et bonté, chaleur et
regard d'amour. Et tout fils pleurant sa mère disparue y retrouvera les
reproches qu'il s'adresse à lui-même lorsqu'il pense à telle circonstance où il
s'est montré ingrat, indifférent ou incompréhensif. Regrets ou remords toujours
tardifs. « Aucun fils ne sait vraiment que sa mère mourra et tous les fils
se fâchent et s'impatientent contre leurs mères, les fous si tôt punis. » Mais
il faut laisser la parole à Albert Cohen.
    « Allongée
et grandement solitaire, toute morte, l'active d'autrefois, celle qui soigna
tant son mari et son fils, la sainte Maman qui infatigablement proposait des ventouses
et des compresses et d’inutiles et rassurantes tisanes, allongée, ankylosée,
celle qui porta tant de plateaux à ses deux malades, allongée et aveugle,
l'ancienne naïve aux yeux vifs qui croyait aux annonces des spécialités
pharmaceutiques, allongée, désœuvrée, celle qui infatigablement réconfortait.
Je me rappelle soudain des mots d'elle lorsqu'un jour quelqu'un m'avait fait injustement
souffrir. Au lieu de me consoler par des mots abstraits et prétendument sages,
elle s'était bornée à me dire : “Mets ton chapeau de côté, mon fils, et sors et
va te divertir, car tu es jeune, va, ennemi de toi-même. " Ainsi parlait
ma sage Maman. »
     
    Albert
Cohen, né en 1895 à Corfou, Grèce, a fait ses études secondaires à Marseille et
ses études universitaires à Genève. Il a été attaché à la Division diplomatique
du Bureau International du Travail, à Genève. Pendant la guerre, il a été à
Londres le Conseiller juridique du Comité inter-gouvernemental pour les
réfugiés dont faisaient notamment partie la France, la Grande-Bretagne et les
États-Unis. En cette qualité, il a été chargé de l’élaboration de l’ Accord
international du 15 octobre 1946, relatif à la protection des réfugiés. Après
la guerre, il a été directeur dans l’une des institutions spécialisées des
Nations Unies.
    Albert
Cohen a publié Solal en 1930, Mangeclous en 1938 et Le livre
de ma mère en 1954. En 1968, le Grand Prix du roman de l’Académie française
lui est décerné pour Belle du Seigneur . En 1969, il publie Les
Valeureux et en 1972 O vous, frères humains .

I
    Chaque
homme est seul et tous se fichent de tous et nos douleurs sont une île déserte.
Ce n’est pas une raison pour ne pas se consoler, ce soir, dans les bruits
finissants de la rue, se consoler, ce soir, avec des mots. Oh, le pauvre perdu
qui, devant sa table, se console avec des mots, devant sa table et le téléphone
décroché, car il a peur du dehors, et le soir, si le téléphone est décroché, il
se sent tout roi et défendu contre les méchants du dehors, si vite méchants, méchants
pour rien.
    Quel
étrange petit bonheur, triste et boitillant mais doux comme un péché ou une
boisson clandestine, quel bonheur tout de même d’écrire en ce moment, seul dans
mon royaume et loin des salauds. Qui sont les salauds? Ce n’est pas moi qui vous
le dirai. Je ne veux pas d’histoires avec les gens du dehors. Je ne veux pas
qu’on vienne troubler ma fausse paix et m’empêcher d’écrire quelques pages par
dizaines ou centaines selon que ce cœur de moi qui est mon destin décidera.
J’ai résolu notamment de dire à tous les peintres qu’ils ont du génie, sans ça
ils vous mordent. Et, d’une manière générale, je dis à chacun que chacun est
charmant. Telles sont mes mœurs diurnes. Mais dans mes nuits et mes aubes je
n’en pense pas moins.
    Somptueuse,
toi, ma plume d’or, va sur la feuille, va au hasard tandis que j’ai quelque
jeunesse encore, va ton lent cheminement irrégulier, hésitant comme en rêve, cheminement
gauche mais commandé. Va, je t’aime, ma seule consolation, va sur les pages où tristement
je me complais et dont le strabisme morosement me délecte. Oui, les mots, ma
patrie, les mots, ça console et ça venge. Mais ils ne me rendront pas ma mère.
Si remplis de sanguin passé battant aux tempes et tout odorant qu’ils puissent
être, les mots que j’écris ne me rendront pas ma

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