Le Livre De Ma Mère
pas moins si nous sommes laids, ratés,
avilis, faibles ou lâches, mères qui parfois me faites croire en Dieu.
XXX
Mais
rien ne me rendra ma mère, ne me rendra celle qui répondait au nom de Maman,
qui répondait toujours et accourait si vite au doux nom de Maman. Ma mère est
morte, morte, morte, ma mère morte est morte, morte. Ainsi scande ma douleur,
ainsi monotonement scande le train de ma douleur, ainsi scandent et tressautent
les essieux du train de ma douleur, du train interminable de ma douleur de
toutes les nuits et de tous les jours, tandis que je souris à ceux du dehors avec
une seule idée dans ma tête et une mort dans mon cœur. Ainsi scandent les
essieux du long train, toujours scandant, ce train, ma douleur, toujours
emportant, ce train de funérailles, ma morte décoiffée à la portière, et moi je
vais derrière le train qui va, et je m’essouffle, tout pâle et transpirant et
obséquieux, derrière le train qui va, emportant ma mère morte et bénissante.
XXXI
Des
années se sont écoulées depuis que j’ai écrit ce chant de mort. J’ai continué à
vivre, à aimer. J’ai vécu, j’ai aimé, j’ai eu des heures de bonheur tandis
qu’elle gisait, abandonnée, en son terrible lieu. J’ai commis le péché de vie,
moi aussi, comme les autres. J’ai ri et je rirai encore. Dieu merci, les
pécheurs vivants deviennent vite des morts offensés.
Impression
Bussières Camedan Imprimeries à Saint-Amand (Cher), le 3 septembre 1998.
Dépôt
légal : septembre 1998.
1er
dépôt légal dans la collection : mai 1974. Numéro d'imprimeur : 984115/l.
ISBN
2-07-036561-1./Imprimé en France.
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