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Le Maréchal Suchet

Titel: Le Maréchal Suchet Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Hulot
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successivement se révélèrent aussi inefficaces les uns que les autres. Cela ne l’empêcha pas d’accompagner sa femme en juin de la même année (1824) à Dieppe, ville qu’avait mise à la mode la duchesse de Berry. Honor souffrait de migraines permanentes, et on lui avait recommandé de les soigner par des bains de mer qui se prenaient dans un établissement spécialisé et non pas sur la plage. La cure fut un tel succès que Suchet organisa un service de transport permanent pour amener des tonneaux d’eau de mer au château de Saint-Just et à Paris.
    Il était de retour dans la capitale lorsque le roi, malade depuis plus d’un mois, mourut le 16 septembre. Il fut sincèrement regretté par certains, dont Suchet, car sous son règne, grâce à son sens politique, sa pondération et également son calme et son cynisme, la royauté n’avait jamais été aussi bien assurée. Il avait recueilli une France affaiblie, crucifiée, et par sa sagesse l’avait relevée jusqu’à en faire une des grandes nations européennes. Le maréchal pensait, et il n’était pas le seul, que la monarchie héréditaire était la seule forme de régime capable d’assurer un avenir sans à-coups au pays.
    Tout le monde politique prévoyait que, sous le nouveau souverain, le comte d’Artois désormais le roi Charles X, le maréchal Suchet serait, de nouveau, appelé à jouer un rôle important. Sans doute serait-il ministre car ce roi lui avait toujours manifesté des sentiments d’amitié. Ce souverain ne manquait pas de qualités mais il avait le défaut de s’imaginer pouvoir ressusciter la société et la manière de vivre connues avant la Révolution. Il décida donc, ce dont son frère s’était passé, d’aller se faire sacrer à Reims. Et si les esprits forts ricanèrent, l’ensemble de la population y vit plutôt un signe de continuité de la dynastie et le geste jouit d’un préjugé favorable. La cérémonie prit place au mois de mai 1825.
    Bien entendu, Suchet y fut convié en tant que maréchal de France. La chose était tout à fait normale ; sa place était marquée dans la cathédrale et un logement lui avait été retenu en ville. Mais le roi voulait faire un geste exceptionnel en sa faveur. Il le désigna pour être un des porteurs des insignes royaux qui lui seraient remis au cours de la messe, dans ce cas précis le sceptre. C’était un honneur rare et particulièrement recherché. Toutefois, tout le monde savait que cette fête serait extrêmement fatigante. Il était prévu que les grands officiers de la couronne devraient être rendus à la grande porte de la cathédrale de Reims à 6 h 45 du matin, en grande tenue, alors que la liturgie ne commencerait pas avant 8 heures et se poursuivrait sans interruption pendant toute la matinée.
    La santé de Suchet était déjà tellement détériorée qu’il fut, à son grand regret, obligé de décliner l’honneur que lui faisait le roi. Ce fut Soult qui le remplaça au pied levé. Poète à l’esprit fertile et imaginatif, Lamartine dans son (mauvais) Chant du sacre mit en scène un Suchet qui n’y était pas… mais la vérité historique s’accommode souvent mal des envolées lyriques. Le duc d’Albufera ne put pas davantage assister aux fêtes données à l’Hôtel de Ville de Paris pour célébrer l’événement au mois de juin. Dès avant cette époque, il éprouvait de plus en plus de difficultés à s’alimenter, son estomac se refusant à accepter autre chose que des liquides, quelques mets sucrés et des légumes. Le général Lamarque, qui avait servi sous ses ordres, ayant été lui faire visite, remarqua qu’il avait beaucoup changé en quelques mois, ce qui semblait échapper à sa famille.
    Il se démettait une à une de ses charges, n’ayant plus, disait-il, la force de les assumer. Il renonça ainsi à assurer la présidence de « la société pour l’instruction élémentaire ». Il s’éloignait même de la vie mondaine, ne paraissait presque plus à la cour ni au « jeu du roi » où il était pourtant régulièrement convié, recevait de moins en moins et avait même quelque peine à monter à cheval.
    Sentant sa fin prochaine, le maréchal avait commencé à prendre ses dispositions. Il avait prévu la constitution d’un majorat, institution créée par Napoléon afin de faciliter la transmission de ses titres de duc et de comte. Il l’avait doté d’un capital de cent mille francs, ce qui, de nos jours,

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