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Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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pas la Machine du
monde non plus...
    — Ne vous
plaignez pas. Il aurait dû y en avoir huit, ricane le lieutenant de la police
de Paris et procureur pour les affaires de duel en s’éloignant vers le
Châtelet.
     
    *
     
    — Monsieur
le marquis, rien ne viole plus sacrilègement la loi d’en haut que la rage
effrénée des duels. On n’apprend pas ça sur vos terres de Guyenne
natales ? !...
    Le jeune
Gascon qui se fait engueuler dans cette salle de tribunal du Châtelet contemple
devant lui, par une fenêtre, le soleil de fin d’après-midi... Seul à être assis
sur une des chaises de la salle du tribunal, il soupire :
    — Vous
dites ça à moi qui ne suis pas concerné car de nature fort peu querelleuse. Mon
frère ne l’était pas non plus d’ailleurs...
    — Il
s’est pourtant trouvé mêlé à un duel !coupe, brutal, La Reynie. La
noblesse doit absolument cesser de tirer l’épée à tout bout de champ ! Les
duels déciment l’aristocratie française et les édits royaux interdisent depuis
1651, sous peine de mort, cette façon sanglante de laver l’honneur. Les duels
sont d’abord un défi à l’autorité de Sa Majesté qui, elle seule, peut décider
qui doit mourir et comment chacun devra vivre !...
    La Reynie, debout
et solennel, en est là de son sermon quand au fond de la salle, dans le dos du
jeune marquis, une porte grince et que celui-ci entend venir des pas sur le
dallage. Le Gascon accablé baisse la tête et regarde ses souliers à talons
rouges lorsqu’il perçoit un feulement de manteau et de jupons s’asseoir auprès
de lui à droite :
    — Veuillez
excuser mon retard, monsieur de La Reynie, mais je viens seulement d’apprendre
la nouvelle.
    La voix est
douce et régulière. Le procureur lui annonce :
    — Mademoiselle,
si votre futur époux Louis-Alexandre de La Trémoille, marquis de Noirmoutier,
revient en France, il sera décapité.
    Le Gascon, entendant sa voisine
dégrafer son manteau puis abaisser la capuche sur les épaules, observe La
Reynie soudain bouche bée  – de chaque côté d’un œil aquilin, ses yeux se
figent. Quelle peut être cette fille propre à troubler un tel procureur ?
Est-ce une méduse qui change les hommes en pierre ?... Mais La Reynie se
reprend et vient se placer face au Gascon qui frotte ses mains moites sur sa
culotte en satin blanc :
    — Monsieur, lui déclare le
procureur, Sa Majesté informe sans miséricorde, faisant même procès par
contumace à la mémoire de votre frère, feu sieur d’Antin.
    Le marquis,
docile, répond :
    — Je
suis, avec tout le respect possible et tout le zèleimaginable, le trèshumble, très obéissant et très obligé serviteur de Son Altesse
Sérénissime...
    Sa voisine,
sise près de lui, s’informe :
    — Comment
avez-vous été averti de ce duel ?
    — Les
porte-lanternes à la sortie des spectacles et des bals sont nos meilleures
mouches, sourit le chef de la police.
    Le marquis
déconfît prend tristement son chapeau à plume sur la chaise de gauche puis se
lève et se tourne enfin vers sa voisine qui se lève également.
Vertu-bleu !... Il manque de s’en asseoir à nouveau. Elle n’est pas une
beauté, c’est LA beauté. Le grand Gascon de vingt-deux ans en a le souffle
coupé. Lui qui a toujours aimé les blondes un peu grasses est subjugué par
cette voluptueuse merveille de son âge. Teint de lait, les yeux verts des mers
du Sud, boucles blondes à la paysanne... Sa robe à décolleté profond couvre les
épaules tandis que les manches s’arrêtent aux coudes dans un flot de dentelles.
Elle porte des gants. Le marquis croit qu’il va en perdre toutes ses dents.
Par-dessus son immense perruque en forme de crinière, pesant plus d’un kilo et
tenant chaud, il se coiffe du chapeau blanc mais à l’envers. La plume
d’autruche qui le garnit se trouve devant le visage du marquis. Voulant pivoter
le couvre-chef, il déplace la perruque qui lui masque un œil. La fille a un
rire charmant qui éveille la tendresse jusqu’au fond des cœurs. Il salue La
Reynie - « Au revoir, madame ! Oh... » - s’excuse tandis que la
belle amusée rythme son allure et les bonds de sa taille près de ce dégingandé,
les genoux en dedans, allant vers le fond de la salle. Il veut lui ouvrir la
porte mais manque de l’assommer, décide de la laisser sortir la première mais
passe devant. Elle est aussitôt émue par ses prévenances à l’envers, les regards
adorateurs qu’il lui

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