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Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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draps, la ligne exquise
du dos de Françoise ondule et, dans l’ombre des rideaux, l’haleine monte,
rythmique et légère. Aux sens de la marquise, partout et longtemps, le bonheur
de savoir la lèvre de son mari, sa main, son tout. Il est divin aussi le
plaisir de Louis-Henri à bousculer la chemise et l’honneur de sa femme. Aux
frissons polissons, elle tend une nuque vaguement déshonnête. Puis voilà un
baiser prolongé. Qu’arrivera-t-il ensuite ? Dame ! Tout cela met la
logique et la morale en fuite. Et allons-y d’une noce en tout, tous les vices
et tous les sévices amusants !

 
3.
     
     
    — Il faut
bien que jeunesse se passe...
    Au sommet
d’une des collines du paysage mollement vallonné autour du château de
Saint-Germain-en-Laye, le carrosse des Montespan bringuebale à l’arrêt dans la
nuit étoilée de ce mois de juin.
    Le cocher
assis sur le siège extérieur en subit les secousses avec philosophie :
    — Ça leur
passera avant que ça me reprenne.
    Son corps
remue, ondule, parce qu’à l’intérieur du véhicule ça se bouscule. Le marquis
prend la marquise à la façon des chiens (more canino). Agenouillée le
long d’une banquette et joue plaquée à la glace d’une portière, Françoise
regarde la fête royale, au loin, en contrebas.
    Des allées
éclairées d’innombrables flambeaux. La lente errance des gondoles sur des eaux
tranquilles. Une troupe de musiciens ajoute des accords fondus au charme de la
nuit estivale. À chaque carrefour d’allées, des symphonies et des tables de
collation servies par des gens déguisés en sylvains, satyres et divinités
bocagères. Un orchestre joue la dernière composition de Lully, alors des
nymphes sortent des bassins pour réciter des poèmes. Des lions, des tigres, des
éléphants, déambulent, tenus en laisse.
    — C’est
beau...
    — Ah oui,
c’est beau ! Françoise, ton cul fait honte aux étoiles.
    C’est vrai que
la marquise a un bas de dos très beau et d’une gaîté folle auquel il ne manque
que la parole. Royale arrière-garde aux combats du plaisir de Louis-Henri qui
se fond à elle comme une neige au feu :
    — Miracle
charmant, divin paradis des yeux, chef-d’œuvre unique des dieux !
    Elle se
retourne complètement. Il aime maintenant sa bouche et les jeux gracieux de ses
lèvres et des dents lui mordillant parfois la langue et là, même mieux  –
truc presque aussi gentil que de mettre dedans. Cette femme, sacré nom de Dieu,
à lui faire perdre la tête, lui foutre le reste en fête et, vertubleu, le sang
en feu ! L’heureux jouit et décharge de tous côtés.
    Après la chose
faite, après le coup porté, après chaque petite mort de l’un et l’autre  –
et quelles morts ! -, Françoise renaît dans un nouveau tumulte pour mourir
encore et plus fort. Étendue sur le cuir rembourré de crin de la banquette, son
galbe, son que sais-je, disent au marquis : « Viens là ! »
Et la chaleur s’insinue : « Reste ! » Et il y reste en son
corps mangeur (le dieu d’amour veut qu’on ait de l’haleine...). Jambes en l’air
et seins au clair - « Des seins joyeux d’être vus, dignes d’un
dieu », commente son mari  –, la malice remue les mollets
ensorceleurs de Françoise.
    — Et
c’est reparti !... soupire le cocher qui balance à nouveau et glisse sur
son siège.
    Tête basculée en arrière, c’est
dorénavant à l’envers que la marquise contemple en contrebas la lointaine fête
royale aux six cents invités. Louis-Henri s’excuse de ne pas pouvoir l’y
conduire :
    — Côté
Montespan, on est assez peu paré en cour. Autrefois, les Pardaillan de Gondrin
ont un peu frondé... Le roi nous le fait encore payer.
    Personae
pas trop gratae à Saint-Germain-en-Laye, eu égard à la disgrâce d’un oncle
qui fut rebelle aux Bourbons, Louis-Henri n’a pas été invité. Alors, c’est
depuis leur carrosse que les Montespan assistent à la fête.
    Divertissements,
spectacles, jeux, loteries, ballets, etc. Entre les arbres du grand parc, des
tapisseries de la Savonnerie sont étendues et des pâtes d’amandes servies aux
bosquets. Ici, un saule pleureur doré dont les branches font jaillir plus de
cent jets d’eau et des pétales d’anémone, de jasmin d’Espagne. Oui, mais voilà
le roi qui sort du château et la cour se presse. Il est totalement scintillant
dans la nuit.
    — Il
paraît qu’il porte pour douze millions de livres de diamants sur lui..., se
dresse

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