Le secret de la femme en bleu
glissé parmi eux un complice des bandits ?
— C’est-à-dire… balbutia Médéric.
— C’est-à-dire, reprit Childebrand d’un ton sévère, si je comprends bien, que toutes les mesures de sécurité n’avaient pas été prises.
— Oh, si, seigneur ! s’empressa de répondre le commandant de la milice. Patrouilles et postes de surveillance ont été mis en place dès notre arrivée.
— Avec le résultat qu’on a vu ! ponctua le missus. Mais venons-en au vol lui-même. Je sais que vous n’aviez emporté d’Aix que les sommes nécessaires à votre voyage, peu de deniers en vérité puisque vous deviez user de votre droit de réquisition. Les coffres vous attendaient-ils ici ?
— Non, ils ont été apportés dans la matinée du deuxième jour.
— Soit quelques heures seulement avant cette fatale nuit ! Et que contenaient-ils ?
— Le produit d’amendes judiciaires – du moins la part qui en revient au prince – et celui de « dons volontaires », si je puis dire, consentis par des comtes et abbés fortunés, précisa Hainrik. Les sommes avaient été placées dans des coffres scellés qui ont été transportés à Metz puis ici dès notre arrivée.
— La totalité de ces deniers vous était-elle attribuée ?
— Assurément, pour préparer le plaid général, indiqua le représentant de la chancellerie Romuald.
— Le grand chambrier, mon maître, a estimé préférable de faire déposer directement ces coffres en cette villa pour éviter un aller et retour inutile entre Thionville et Aix, ajouta le comte Hainrik.
— Qui devait procéder à l’ouverture de ces coffres, à la vérification de leurs contenus et à une première répartition ?
— Moi-même, avec Hunault et Romuald. Mais l’événement ne nous en a pas laissé le temps.
— L’événement… grommela Childebrand. En somme, les bandits n’ont eu qu’à glisser les brancards dans les anneaux pour enlever leur butin.
L’envoyé du souverain se tourna vers Médéric.
— Tu vas maintenant m’expliquer, lui dit-il d’une voix exagérément calme, quelles mesures de sécurité tu avais prises, et, d’abord, pourquoi les coffres avaient été placés dans les appartements inoccupés de l’empereur. Et pas de faux-fuyant ! Sinon…
Le commandant se racla la gorge pour affermir sa voix.
— Ces coffres ont été mis, d’un commun accord, répondit-il avec un geste qui désignait ses collègues, à leur emplacement habituel dans la chambre de l’empereur… comme il se doit. Nous n’avions pas de raison de les faire déposer ailleurs.
— Sauf des raisons de sûreté ! gronda Childebrand. Mais, précisément, venons-y ! Je t’écoute.
— D’abord deux patrouilles ont surveillé, avec des rondes fréquentes, l’une la cour extérieure, l’autre la cour intérieure. Dans l’antichambre j’avais prévu deux vigiles. Enfin un garde, près des coffres, complétait ce dispositif. Les hommes étaient relevés toutes les quatre heures.
— Et c’est tout ? lâcha le missus.
— Que pouvais je faire d’autre ? avança Médéric. Qui aurait pu penser que le soir même…
— Assez ! Deux coffres pleins de deniers, voilà, sans nul doute, de quoi donner à penser à des bandits, mais manifestement pas au commandant d’une garnison !… Tu as dit « dispositif » ? Je dis, moi, stupidité ! D’abord…
Childebrand respira profondément pour calmer la colère qui montait en lui.
— D’abord, reprit-il, la cour extérieure. J’ai constaté que tous les accès à l’aile droite du palais étaient fermés par de solides panneaux. L’étaient-ils déjà cette nuit-là ?
— Eh bien…
— Oui ou non, par le diable ?
— Ils l’étaient à notre arrivée. Nous avons donc laissé ces panneaux en place.
— Donc… des risques de ce côté-là… peu vraisemblable ! Une attaque par l’antichambre, à quelques pas du corps de garde ? Absurde ! A quoi servaient les deux vigiles que tu avais placés là ? Que faisaient-ils ? Ils jouaient à la mourre ?
Médéric baissa la tête.
— En revanche, du côté de la cour intérieure… poursuivit Childebrand, une patrouille de deux hommes… Souvent ?
— Deux ou trois fois par heure, avança le chef des vigiles.
— Vraiment ? Je vois cela ! Les agresseurs guettent, en se dissimulant, le passage de cette patrouille… deux hommes qui ne sont pas particulièrement sur leurs gardes, bavardant et plaisantant sans doute… Les bandits peuvent compter maintenant
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