Le temps des adieux
repris chez Platon, que le préfet des vigiles dut tenir une session spéciale, qui dura toute la journée, pour les propriétaires désireux de récupérer des esclaves retrouvés en aussi mauvaise compagnie. La puissance du gang de Balbinus avait été enfin brisée.
En outre, Helena Justina avait obtenu la confession d’une des filles de l’Académie de Platon. Elle avait fini par lui avouer que le bébé abandonné dans ma charrette de détritus avait bien été kidnappé par elles. Elles avaient ensuite compris qu’il était sourd, et sa famille avait refusé de payer une rançon. Un portier du bordel était alors parti s’en débarrasser – Castus, celui qui avait poignardé le Lycien. Arrêté, il attendait d’être interrogé.
Helena Justina connaissait la famille du bébé sourd. Mais même si, juste après le kidnapping, sa nourrice avait prévenu les autorités, aujourd’hui, les parents niaient catégoriquement avoir eu un bébé. Et qui étaient ces parents à la mémoire aussi courte ? Un Très Important Patricien et sa très riche épouse. À en croire certains commérages, sa femme était de nouveau enceinte. Helena jugea donc inutile de leur apprendre que leur enfant avait été identifié. Je fus tout à fait de son avis.
La célèbre patronne du Berceau de Vénus avait été retrouvée morte, et les autorités romaines en conclurent qu’un des plus célèbres lupanars de la ville allait décliner et probablement disparaître. Espoir qui n’était pas partagé par tout le monde. De toute façon, son propriétaire avait décidé d’agir.
Je rencontrai Florius devant la porte, tenant un gros rouleau de parchemin. Le préfet des vigiles lui avait confirmé que le Berceau de Vénus était l’une de ses possessions. Horrifié, il avait tenu à éplucher pour la première fois la liste des propriétés comprises dans la dot de sa femme, Milvia. Il tenait à y mettre bon ordre.
Un gros problème demeurait pourtant : tous les endroits connus, plus ceux qui avaient été révélés par les criminels arrêtés au cours de leurs interrogatoires, furent soigneusement fouillés. Nulle part on ne découvrit la moindre trace de Balbinus Pius.
Petronius et la quatrième cohorte consacraient tout leur temps à sa recherche. Balbinus avait perdu son empire. Sa femme et sa fille étaient sous étroite surveillance. Si la source de ses revenus réguliers était tarie, il n’était pas pour autant dans le besoin. Il existait mille et un endroits où il pouvait se terrer. Tous les ports avaient été placés en état d’alerte, et les gouverneurs de province prévenus. Mais Lalage m’avait indiqué qu’il se cacherait sous un déguisement, ce qui ne facilitait pas la tâche.
Les recherches continuèrent sans relâche pendant des jours et des jours. J’y participais à chaque fois que cela m’était possible. Mais je tenais aussi à passer un maximum de temps au gymnase pour retrouver ma forme physique. J’étais par ailleurs persuadé que Balbinus ne tenterait pas de quitter Rome, son territoire naturel. Et si nous parvenions à mettre la main sur lui, sa capture présenterait bien des dangers.
À la même époque, j’avais également une autre préoccupation : la veille des Calendes de novembre, Helena, ma famille et moi, Petronius, sa femme, ses filles et certains membres de son équipe allions assister à un mariage.
Il devait être célébré lors des calendes, mais ma mère ayant fini par se charger de l’organisation de la cérémonie, sa première décision fut d’en changer la date. Elle fit remarquer à Lenia que se marier le premier jour du mois portait la guigne. La blanchisseuse éclata en sanglots et se décida pour le dernier jour d’octobre.
Nous étions un certain nombre à penser que, tant qu’à épouser Smaractus, il eût mieux valu choisir le jour malchanceux.
65
Deux jours avant les calendes, je me démenai pour acheter un mouton blanc à un prix abordable. Son seul rôle serait d’attendre patiemment que je lui tranche la gorge avant de le dépouiller. Enfant de la ville, j’envisageais cette tâche avec le plus grand dégoût. Impossible cependant de refuser ce service à Lenia. Elle voulait que son mariage se déroule dans les règles de l’art. D’abord les augures, puis le grand moment où les nouveaux époux s’assoient sur la peau du pauvre mouton, que je devais leur fournir toute chaude en prenant toutes les précautions nécessaires pour ne pas
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