Le Testament Des Templiers
Ce sont surtout des dégâts dus à l’eau et à la fumée.
– En fait, nous ne pouvons pas grand-chose contre les flammes, mais pour l’eau et la fumée, il y a des remèdes – à condition d’avoir les connaissances nécessaires et les outils adéquats.
– Et l’argent. »
Hugo eut un petit rire nerveux.
« Effectivement, l’argent est aussi un facteur important. Je dois vous dire, dom Menaud, que je suis content de pouvoir vous parler si normalement. Je n’ai jamais travaillé avec des trappistes. Je pensais que vous pouviez avoir fait vœu de silence ici. Je me voyais en train d’échanger des notes avec vous.
– Une idée fausse, monsieur Pineau. Nous nous efforçons de respecter une certaine discipline, de ne parler que quand c’est nécessaire, pour éviter des discussions inutiles et frivoles. Nous avons constaté qu’un bavardage futile tend à nous distraire de nos objectifs spirituels et de nos travaux monastiques.
– Cela me convient parfaitement, dom Menaud. J’ai hâte de me mettre au travail. Permettez-moi de vous expliquer comment procède notre entreprise. Ensuite, nous pourrons évaluer le travail et définir un plan d’action. D’accord ? »
Ils s’assirent à la table de lecture et Hugo se lança dans un exposé sur le sauvetage des éléments de bibliothèque endommagés par l’eau.
« Plus le livre est ancien, expliqua-t-il, plus sa capacité à absorber l’eau est grande. Des matériaux de l’ancienneté de ceux de l’abbaye pourraient absorber jusqu’à deux cents pour cent de leur poids en eau. Si une décision était prise pour traiter, disons cinq mille volumes gorgés d’eau, cela représenterait l’enlèvement de quelque huit tonnes d’eau ! »
La meilleure méthode pour restaurer des livres imbibés d’eau était de les geler, puis de leur faire subir un traitement de lyophilisation dans des conditions soigneusement contrôlées. Le résultat pour du parchemin et du papier pouvait s’avérer excellent mais, en fonction de matériaux particuliers et de l’importance du gonflement, les reliures devraient peut-être être refaites. Des traitements fongicides s’imposaient pour combattre la propagation de la moisissure, mais son entreprise avait mis au point des techniques très efficaces pour tuer les microbes en introduisant de l’oxyde d’éthylène en gaz pendant les cycles de séchage dans leurs citernes industrielles de séchage par lyophilisation.
Hugo répondit aux questions de l’abbé puis aborda le délicat sujet du prix. Il entama la discussion par son discours standard, selon lequel il était plus économique de remplacer les livres lorsqu’ils étaient encore publiés, et de réserver le processus de restauration uniquement aux anciens ouvrages irremplaçables. Il donna ensuite une estimation approximative du coût pour mille livres et guetta le visage de l’abbé pour voir sa réaction. En général, à ce stade de sa présentation, le conservateur ou le bibliothécaire se mettait à jurer, mais l’abbé resta de marbre et ne laissa en tout cas échapper aucun juron.
« Nous devrons, bien entendu, définir des priorités. Nous ne pouvons pas tout faire, mais nous devons sauvegarder l’histoire de l’abbaye. Nous trouverons un mode de financement. Nous avons une provision pour l’entretien de la toiture que nous pourrions utiliser. Nous avons quelques petits tableaux que nous pourrions vendre. Il y a un livre, une traduction ancienne de saint Benoît dont nous nous séparerions avec regret, mais… »
Il soupira pitoyablement.
« Et vous pourrez aussi nous aider, monsieur, en ajustant votre prix à notre situation ecclésiastique. »
Hugo sourit.
« Bien entendu, dom Menaud, bien entendu. Allons jeter un coup d’œil, voulez-vous ? »
Ils passèrent l’après-midi à fouiller parmi les piles de livres mouillés et dressèrent un semblant d’inventaire, en définissant un ordre de priorité selon l’importance historique de chaque livre estimée par l’abbé. À la fin, le jeune moine leur apporta un plateau avec du thé et des biscuits, et l’abbé profita de l’occasion pour montrer un petit livre enveloppé dans une serviette. Il était rangé à l’écart des autres ouvrages au bout de la table de lecture.
« J’aimerais votre avis sur celui-ci, monsieur Pineau. »
Hugo avait soif, et il avala son thé avant d’enfiler une nouvelle paire de gants en latex. Il enleva soigneusement la
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