Le tombeau d'Alexandre

tatouage dont il venait de parler avec Fiona. Un soir, un robuste Australien était venu le rejoindre alors qu’il buvait une bière sur le front de mer.
    — Je peux m’asseoir ? avait-il demandé.
    — Vas-y.
    — Je m’appelle Rick.
    — Daniel, mais tout le monde m’appelle Knox.
    — Oui, c’est ce qu’on m’a dit.
    — Ah bon, tu t’es renseigné ?
    — Il paraît que tu es archéologue.
    — Je l’étais.
    — Tu as laissé tomber pour devenir moniteur de plongée ? s’enquit Rick d’un air sceptique.
    — C’est l’archéologie qui m’a laissé tomber. Je suis brouillé avec les autorités.
    — Ah... Intéressant, ce tatouage, observa Rick en se penchant en avant.
    — Tu trouves ?
    — Si je te montre quelque chose, tu le garderas pour toi ?
    — Bien sûr, répondit Knox en haussant les épaules.
    Rick plongea la main dans sa poche et en sortit une boîte d’allumettes dans laquelle se trouvait, posée sur un lit de coton, une grosse goutte dorée d’environ deux centimètres de long, dotée d’un œillet pour l’ajout d’un fermoir ou d’une chaîne. D’après les petits points roses désormais visibles, elle avait été taillée dans le corail. En outre, elle était ornée d’une étoile à seize branches discrètement gravée à la base.
    — Je l’ai trouvée il y a quelques années, déclara Rick. Je me suis dit que tu pourrais peut-être m’en dire plus. C’est le symbole d’Alexandre, non ?
    — Oui, où est-ce que tu l’as trouvée ?
    — Ouais, c’est ça ! s’exclama Rick en reprenant la goutte, qu’il rangea jalousement dans son écrin de fortune pour l’enfouir à nouveau dans sa poche. Comme si j’allais te le dire ! Alors, une idée ?
    — Ça peut être n’importe quoi. Une pampille pour un vêtement, quelque chose comme ça. Une boucle d’oreille.
    — Quoi ? Alexandre portait des boucles d’oreilles ?
    — L’étoile signifie que cet objet appartenait à sa cour. Il n’était pas forcément à lui.
    — Oh... se renfrogna Rick d’un air déçu.
    — Tu l’as trouvé dans les récifs, c’est ça ?
    — Oui, pourquoi ?
    — Pour rien, c’est juste bizarre. Alexandre n’est jamais venu dans le coin. Et ses hommes non plus.
    — Et tu prétends avoir été archéologue ! ricana Rick. Même moi, je sais qu’il est venu en Égypte. Il est allé je ne sais plus où dans le désert.
    — Il est allé consulter l’oracle d’Amon, dans l’oasis de Siwa, c’est vrai. Mais il n’a pas vu Charm, ni de près ni de loin, tu peux me croire. Il a longé la côte nord.
    — Il n’a pas fait d’autre séjour en Égypte ?
    — Non, sauf...
    Knox sentit son cœur s’emballer dans sa poitrine. Il venait d’avoir une idée délirante.
    — Nom de Dieu ! murmura-t-il.
    — Quoi ? demanda Rick, qui lisait sur son visage.
    — Non, non. C’est impossible.
    — Quoi ? Dis-moi.
    — Non, rien, insista Knox.
    — Allez, vieux. Accouche !
    — À condition que tu me dises où tu as trouvé ça.
    — Hi crois qu’il y a autre chose sur place ? demanda Rick d’un air perspicace. C’est à ça que tu penses, hein ?
    — Pas vraiment. Mais c’est possible.
    Rick hésita.
    — Tu plongeur, c’est ça ?
    — Oui.
    — Ça ne me déplairait pas d’avoir un partenaire. C’est un endroit où je n’ai pas envie de plonger seul. Si je te le dis, on ira voir ensemble, d’accord ?
    — Bien sûr.
    — Bon, alors mets-toi à table.
    — D’accord. Mais c’est une simple hypothèse. Il n’y a qu’une chance sur...
    — J’ai compris. Accouche.
    — Je vais droit au but ou tu veux les détails ?
    — J’ai tout mon temps.
    — Alors je te donne le contexte. Alexandre n’est venu qu’une seule fois en Égypte, où il n’a passé que quelques mois. Il est allé jusqu’au Nil en traversant le nord du Sinaï et il est descendu à Memphis, l’ancienne capitale située au sud du Caire, où il a été couronné. Ensuite il est remonté au nord pour fonder Alexandrie, il a longé la côte vers l’ouest jusqu’à Paraetonium, l’actuelle Marsa Matrouh, puis il s’est enfoncé dans le désert, au sud, pour gagner Siwa. D’après la légende, ses hommes et lui seraient morts de soif si deux serpents doués de parole ne les avaient pas guidés jusqu’à l’oasis.
    — Ces serpents parlants, toujours là quand on a besoin d’eux !
    — Aristobule a rapporté un récit plus plausible, selon