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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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renouvelle. On va l’attendre à Brest et aussi au Havre mais surtout à Brest. Il veut sans doute rejoindre l’amiral John Paul-Jones qui met prochainement à la voile pour Boston mais on le guettera aussi au Havre pour ne rien laisser au hasard.
    — Comment savez-vous qu’il va en Amérique ?
    — Je viens de passer chez lui. Il est parti avec armes et bagages. Ce n’est pas bien sorcier de deviner où il va… À présent, ma chère, je vous donne le bonsoir et je vais dormir, si vous le permettez. Je suis rompu…
    — Oh non ! Pas encore ! Vous venez d’arriver ! Ne pouvez-vous rester un moment avec moi ?
    — Je le voudrais, ma chérie, mais c’est impossible. J’ai besoin de repos, vous le savez, de grand repos et je mène, actuellement, une vie exténuante. Bientôt il va faire jour…
    C’était vrai. Le cabinet de toilette où se cachait Gilles semblait déjà moins obscur et peut-être allait-il falloir songer à battre en retraite mais les pieds du jeune homme étaient positivement rivés au sol. Il ne parvenait pas à se décider à fuir. Ce qu’il allait entendre, d’ailleurs, n’allait pas lui faire regretter d’être resté plus longtemps. Cela commença par un profond soupir de Judith puis sa voix s’éleva de nouveau, un peu tremblante comme si elle retenait des larmes.
    — Je sais tout cela, mon cœur, mais il me semble que, si nous pouvions être tout à fait l’un à l’autre… non, non, ne vous fâchez pas ! Étant donné la gravité des blessures que vous avez reçues de mes frères, votre vie serait encore en danger peut-être si vous vous abandonniez tout à fait à l’amour physique. Mais au moins permettez-moi de rester auprès de vous, de partager votre chambre. Nous serions ensemble, au moins, et… et cela m’aiderait !
    Il y eut un autre soupir mais, cette fois, poussé par l’homme.
    — Pourquoi êtes-vous si cruelle, Judith ? Si égoïste aussi ? Je souffre déjà bien assez sans ajouter encore à mes maux le supplice de Tantale. Le traitement que l’on me fait suivre m’oblige à demeurer chaste, à vous traiter en sœur en dépit de l’amour… et du désir que j’ai de vous. Cela ne durera pas, vous le savez. Un jour, nous serons l’un à l’autre… entièrement et ce jour est peut-être plus proche que vous ne l’imaginez. Alors, sachons attendre et aidez-moi au lieu de me compliquer la tâche. Ne voulez-vous pas m’aider ?
    — Bien sûr que si, Job ! Mais je vous aime tant…
    — Moi aussi, ma douce, moi aussi ! Allons ! il est temps pour vous aussi de dormir.
    — Pourquoi donc ? Le jour va bientôt venir et je n’ai pas sommeil…
    — Faites-moi plaisir ! Dormez Judith, dormez ! Je le veux…
    Elle ne répondit rien. Il y eut un froissement de tissus puis le léger craquement d’un lit où l’on s’étend, puis plus rien… Une ou deux minutes s’écoulèrent après quoi Gilles entendit le bruit le plus inattendu qui soit : un petit rire sec et satisfait suivi d’un bruit de pas qu’on ne songeait même pas à étouffer. Il entendit ensuite Kernoa quitter la chambre, longer le couloir en sifflotant dans la direction opposée à celle de la fenêtre ouverte, ouvrir une porte, salué par une voix d’homme qui s’exclamait avec colère :
    — Enfin te voilà ! Je t’ai entendu rentrer et cela m’a réveillé…
    La porte se referma et Gilles n’entendit plus rien. Il demeura un instant encore sans bouger, sourcils froncés, écoutant passionnément les bruits de la chambre voisine. De quel sommeil profond dormait Judith pour qu’elle ne se soit plus manifestée en rien depuis que Kernoa lui avait ordonné de dormir ? Il y avait là quelque chose d’anormal, d’étrange même mais qui n’était pas sans rappeler à Gilles ses rencontres avec Cagliostro, avec l’homme qui avait su si bien s’emparer de l’esprit de Judith. Ce Kernoa posséderait-il lui aussi un pouvoir de ce genre ?…
    N’y tenant plus, il alla jusqu’à la porte entrouverte de la chambre, la poussa, marcha vers le lit que la bougie éclairait toujours. Judith y était étendue dans le gracieux désordre de son déshabillé qu’elle n’avait même pas eu le temps d’ôter. Elle donnait l’impression d’être tombée sur ce lit comme si quelqu’un l’y avait poussée. L’une de ses jambes pendait même un peu en dehors. Elle dormait profondément.
    Avec douceur, Gilles ramena la jambe sur le lit puis se pencha sur la belle

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