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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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tendu à la reine, pouvaient bien représenter l’ancienne folie de Richelieu et ses habitants mais la vague de dégoût qui l’envahissait balayait en lui tout ce qui pouvait ressembler à une douleur.
    Les premières paroles de l’homme lui avaient mis en évidence, en effet, que Judith n’ignorait rien de l’assassinat froidement prémédité contre lui par les hommes de Caramanico. Pourtant, tout à l’heure, elle l’avait accueilli avec un étonnant naturel – n’avait-elle pas dit qu’elle l’attendait ? – un naturel qui n’était sans doute que de la duplicité. L’étonnant était seulement qu’elle n’ait pas cherché à le retenir pour le livrer à ses gardes du corps et, en fait, la seule circonstance atténuante que l’on pouvait porter à son crédit était qu’elle n’ait pas cru bon de révéler la véritable identité du pseudo-Américain. C’était là un de ces mystères contradictoires habituels aux femmes…
    Le cerveau de Gilles tournait à présent à grande allure, s’arrêtant à chaque détail, cherchant à trouver le mot d’une énigme dont il ne parvenait pas à saisir seulement le fil. Il avait l’impression d’être intégré au tableau d’un peintre fou, de jouer à visage nu une pièce dont les autres rôles seraient tenus par des masques. Tout sonnait faux dans cette maison, jusqu’à Judith elle-même et jusqu’aux propos du « bon docteur Kernoa » qui ne correspondait guère à l’image que l’on pouvait se faire d’un honnête médecin breton…
    Tapi derrière sa porte, le chevalier retint son souffle : le couple, qui s’était apparemment arrêté à chaque marche pour échanger des baisers, arrivait sur le palier et Gilles pouvait distinguer parfaitement l’homme à l’épaule duquel Judith appuyait amoureusement sa tête rousse. Il était assez grand et visiblement bâti en force. Lui aussi était roux mais d’une teinte plus sourde que celle des cheveux de Judith et qui contrastait avec un visage étonnamment blanc pour un homme habitué à sortir par tous les temps. Les traits étaient fins encore que la bouche, un peu lourde, eût une expression de bouderie obstinée que Gilles, naturellement, jugea déplaisante mais les yeux étaient extraordinaires et il fallut bien convenir qu’ils conféraient à un visage plutôt froid et sans grand caractère une indéniable séduction. C’étaient de larges yeux couleur d’or changeant que la flamme de la bougie faisait vivre d’une vie quasi sauvage. Ce visage-là non plus n’était pas fait pour se pencher avec compassion sur les misères physiques de ses contemporains. L’avidité et la sensualité s’y lisaient à livre ouvert et Gilles ne put que serrer les poings en constatant l’expression d’intense félicité qu’avait revêtue le visage aux yeux clos de Judith.
    Le couple rentra dans la chambre mais la lumière du flambeau vint rejoindre le jeune homme par une porte entrebâillée. Il comprit qu’il se trouvait dans le cabinet de toilette dans lequel, tout à l’heure, Judith était venue rafraîchir son visage… Le silence était si profond qu’il n’osait bouger, craignant de faire craquer une lame de parquet. Il put entendre Judith pousser un profond soupir et, presque aussitôt, elle se remit à parler :
    — Embrassez-moi mieux que ça ! Je vous sens distrait, absent… Je ne vous ai pas vu depuis vingt-quatre heures et vous ne semblez même pas heureux d’être auprès de moi.
    — Ne dites pas de sottises. Vous savez bien que si, mais j’ai des soucis, des soucis que vous devriez partager.
    — Lesquels, mon Dieu ?
    — Comment croyez-vous que Monseigneur a pris la nouvelle du scandale de l’autre soir, sans compter le fait que ce maudit Américain s’en soit tiré indemne ?
    — Je ne vois pas en quoi les insultes d’un étranger ivre pourraient inquiéter Monsieur ? Ce sont de ces choses auxquelles on s’expose lorsque l’on ouvre un salon aux joueurs.
    — Des joueurs qui devaient être sévèrement triés pour que, justement, nous soyons à l’abri de ce genre d’incident. Vraiment, Judith, vous m’étonnez ! Dois-je vous rappeler avec quelle minutie Monsieur a insisté sur les points qui lui tiennent le plus à cœur ? Dois-je vous rappeler qu’il exige essentiellement le bon ton, l’élégance et la haute tenue de cette maison. ? Nous devons représenter un couple riche et respectable, au sens où on l’entend dans la société

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