Les chasseurs de mammouths
battantes, la tête
douloureuse, son cou et ses épaules lui faisaient mal. Whinney s’appuya sur
elle. Rapide ajouta sa propre pression. Elle se sentait écrasée entre eux mais
ne s’en souciait guère.
— Assez ! dit-elle finalement, en assénant une claque
sur le flanc du poulain. Tu deviens trop grand, Rapide, pour me serrer ainsi
entre vous deux. Regarde-toi ! Tu es presque aussi grand que ta
mère !
Elle le gratta un instant, avant de flatter et de frictionner
Whinney. Elle remarqua alors la sueur séchée sur le poil.
— C’est dur pour toi aussi, hein ? Tout à l’heure, je
te bouchonnerai et je t’étrillerai avec une cardère. Mais quelqu’un vient, et
tu vas sans doute être encore le centre de l’attention générale. Quand ils se
seront habitués à toi, ce sera moins pénible.
Ayla ne s’apercevait pas qu’elle employait à présent le langage
personnel qu’elle s’était créée au cours des années passées en la seule
compagnie des animaux. Ce langage se composait à la fois de gestes du Clan, de
la formulation de quelques-uns des mots articulés par le Clan, d’imitations
animales et des vocables absurdes qu’elle avait commencé d’utiliser avec son
fils. Des yeux étrangers n’auraient sans doute pas remarqué les mouvements de
ses mains : elle aurait paru simplement murmurer une étrange suite de
sons, de grognements et de syllabes répétitives. On n’aurait probablement pas
pensé à un langage.
— Peut-être Jondalar, de son côté, bouchonnera-t-il Rapide.
Elle s’interrompit. Une pensée troublante lui venait à l’esprit.
Elle reprit son amulette, s’efforça de coordonner ses pensées.
— Grand Lion des Cavernes, Jondalar fait maintenant partie
de tes élus, lui aussi. Comme moi, il porte sur sa jambe les cicatrices de ta
marque...
Elle revint à la traduction de ses pensées dans l’antique
langage silencieux qui s’exprimait par les mains. Le seul langage qui convînt
pour s’adresser au monde des esprits.
— Esprit du Grand Lion des Cavernes, cet homme qui a été
choisi n’a pas la connaissance des totems. Cet homme ne sait rien des épreuves
imposées par un puissant totem, ni de ses dons. Même cette femme qui sait les a
trouvés difficiles. Cette femme aimerait supplier l’Esprit du Grand Lion des
Cavernes... aimerait le supplier pour cet homme...
Ayla s’interrompit. Elle ne savait pas trop ce qu’elle
demandait. Elle ne voulait pas prier l’esprit de ne pas mettre Jondalar à l’épreuve
comment chercher à le priver des bienfaits que lui vaudraient certainement de
telles épreuves ? –, elle ne demandait même pas qu’on l’épargnât.
Elle avait été elle-même cruellement éprouvée et y avait gagné des dons
exceptionnels, et elle en était venue à croire que les bienfaits étaient en
proportion de la sévérité des épreuves. Elle rassembla ses pensées,
continua :
— Cette femme aimerait prier l’Esprit du Grand Lion des
Cavernes d’aider cet homme qui a été choisi à connaître la valeur de son
puissant totem, à savoir que, si pénible semble-t-elle, l’épreuve est
nécessaire.
Elle acheva, laissa retomber ses mains.
— Ayla ?
Elle se retourna, se trouva devant Latie.
— Oui.
— Tu avais l’air... très occupée. Je ne voulais pas t’interrompre.
— J’ai fini.
— Talut voudrait que tu viennes, avec les chevaux. Il a
déjà dit à tout le monde qu’il ne faudrait rien faire qui te déplaise. Ne pas
leur faire peur, les énerver... Il a effrayé quelques personnes, je crois bien.
— Je vais venir. Tu veux retourner sur le cheval ?
Le visage de Latie se fendit d’un large sourire.
— Je pourrais ? Vraiment ?
Lorsqu’elle souriait ainsi, elle ressemblait à Talut, se dit
Ayla.
— Peut-être gens pas effrayés quand ils voient toi sur le
cheval. Viens. Rocher ici. Pour aider à monter.
Quand Ayla reparut de l’autre côté du coude de la rivière suivie
d’une jument qui portait la fillette sur son dos et d’un poulain folâtre, les
conversations s’interrompirent. Ceux que le spectacle avait déjà emplis de
crainte respectueuse prenaient néanmoins plaisir à voir l’expression de stupeur
incrédule qui se peignait sur les visages des nouveaux venus.
— Tu vois, Tulie, je te l’avais bien dit ! s’exclama
Talut à l’adresse d’une femme brune qui lui ressemblait, sinon par la couleur,
du moins par les dimensions.
Elle dominait de haut Barzec,
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