Les chasseurs de mammouths
sécher.
— J’ai dans mon sac un percuteur et un bon perçoir, déclara
Jondalar, dont l’intérêt s’était aussitôt éveillé. Te sers-tu d’un
perçoir ? La conversation prit rapidement un tour tout professionnel.
Ranec posa sur Ayla un regard affligé.
— Ça devait arriver, j’aurais pu te le dire. Sais-tu quel
est le pire, quand on vit au foyer d’un maître-façonneur d’outils ? Ce n’est
pas toujours de trouver des éclats de silex dans ses fourrures, c’est surtout d’entendre
constamment parler de silex. Et, depuis le moment où Danug a manifesté son
intérêt... la pierre, la pierre, la pierre... je n’ai plus entendu que ça.
Le ton affectueux de Ranec démentait ses récriminations. Chacun,
visiblement, les avait déjà entendues : personne n’y prêtait attention,
excepté Danug.
— J’ignorais que cela t’ennuyait à ce point, dit le jeune
homme.
— Mais non, fit Wymez. Tu ne vois donc pas, Ranec essaie d’impressionner
une jolie fille.
— A la vérité, Danug, je te suis reconnaissant. Jusqu’à ton
intervention, je crois qu’il cherchait à faire de moi un tailleur de pierre,
dit Ranec, afin d’apaiser l’inquiétude de Danug.
— J’ai cessé tout effort quand j’ai compris que ton seul
intérêt pour mes outils visait à t’en servir pour sculpter l’ivoire, et ce n’était
pas bien longtemps après notre arrivée ici, expliqua Wymez.
Il sourit, ajouta :
— Et, si tu trouves pénible de découvrir des éclats de
silex dans ton lit, tu devrais essayer la poussière d’ivoire dans ce que tu
manges.
Les deux hommes si dissemblables plaisantaient, ils se
taquinaient en paroles, mais amicalement, comprit Ayla avec soulagement. Elle
remarqua aussi qu’au-delà de leurs différences physiques, ils avaient le même
sourire et se mouvaient de la même manière.
On entendit soudain des cris qui provenaient de l’intérieur de l’habitation.
— Ne t’en mêle pas, vieille femme ! Cette histoire est
entre Fralie et moi !
C’était une voix masculine, celle de l’homme du sixième foyer,
voisin du dernier. Ayla se rappelait l’avoir rencontré.
— Je me demande pourquoi elle t’a choisi, Frébec ! Je
n’aurais jamais dû permettre cette Union ! hurla en réponse une voix de
femme. Brusquement, une femme d’un certain âge émergea de l’entrée de la
caverne. Elle traînait derrière elle une autre femme plus jeune, en pleurs.
Deux petits garçons effarés les suivaient, l’un qui pouvait avoir sept ans, l’autre,
tout petit, le derrière nu, qui suçait son pouce.
— C’est ta faute. Elle t’écoute trop souvent. Pourquoi ne
cesses-tu pas de te mêler de nos affaires ?
Tout le monde se détourna. On avait déjà entendu à maintes
reprises cette même discussion. Mais Ayla ouvrait de grands yeux. Aucune femme
du Clan n’aurait osé discuter ainsi avec un homme.
— Voilà Crozie et Frébec qui recommencent. N’y fais pas
attention, dit Tronie.
C’était la femme du cinquième foyer, celui du Renne, se rappela
Ayla. Il venait tout de suite après le Foyer du Mammouth, où elle séjournait
avec Jondalar. La femme tenait un tout petit garçon au sein.
Ayla avait déjà rencontré la jeune mère et se sentait attirée
par elle. Tornec, son compagnon, souleva dans ses bras l’enfant de trois ans
qui s’accrochait à sa mère : il n’avait pas encore accepté le nouveau venu
qui l’avait privé du sein maternel. Le jeune couple était aimable, très uni.
Ayla était heureuse de les avoir pour voisins, plutôt que ceux qui se
chamaillaient. Manuv, qui vivait avec eux, était venu bavarder avec la
visiteuse pendant le repas : il avait été l’homme du foyer, et il était le
fils d’un cousin de Mamut. Il venait souvent au quatrième foyer, avait-il
ajouté, ce qui avait réjoui la jeune femme : elle avait toujours eu une
affection particulière pour les personnes âgées.
Elle était moins à l’aise avec ses voisins de l’autre côté, au
troisième foyer. C’était là que vivait Ranec. Il l’avait désigné comme le Foyer
du Renard. Il ne lui déplaisait pas, mais Jondalar se comportait envers lui de
manière vraiment étrange. D’ailleurs, ce foyer était plus petit que les autres,
habité par deux hommes seulement, et Ayla se sentait plus proche de Nezzie et
Talut, au deuxième foyer, et de Rydag. Elle aimait aussi les autres enfants du
Foyer du Lion, Latie et Rugie, la plus jeune fille de Nezzie, qui
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