Les joyaux de la sorcière
garçon mais contre la bande à Ricci il n’était pas de taille et ils avaient mis le paquet : tout l’accablait et je ne suis pas certain que son avocat, un jeunot commis d’office, n’ait pas été acheté… ou menacé ! Il a été pendu haut et court !
— Et sa mère ? Il ne lui est rien arrivé ?
— Ils n’ont pas osé aller jusque-là. On l’a laissée tranquille dans sa modeste maison de Judith Point où, pour vivre, elle continue de pêcher comme le faisait Peter et elle se débrouille. Ici – j’entends dans la vieille ville ! – tout le monde la connaît et la plaint. Elle adorait son fils et si elle ne s’est pas suicidée c’est parce qu’elle craint Dieu et qu’elle espère pouvoir contribuer à la perte de son ennemi mais que voulez-vous qu’elle fasse contre Ricci et sa bande ?…
— À ce propos, comment se fait-il qu’en l’absence du patron il y ait tant de monde dans la bâtisse ? D’habitude les villas sont gardées – et gardées avec vigilance étant donné ce qu’elles contiennent ! – mais pourquoi des cuisiniers ? C’est peut-être beaucoup pour nourrir des domestiques ?
— Je vais vous dire : on ne sait jamais si Ricci est là ou pas. Évidemment, il y a ce que j’appellerai les arrivées officielles quand le Médicis vient s’ancrer dans le port…
— Son yacht s’appelle le Médicis ? Il ne manque pas d’aplomb !
— Je ne vois pas qui pourrait l’en empêcher ? Donc il y a les entrées au vu et au su de tous mais je sais qu’il vient parfois de façon beaucoup plus clandestine : un bateau anonyme vient mouiller dans la baie en pleine nuit, le débarque à son ponton et revient le chercher de la même manière. La maison reste fermée et on n’y voit que du feu.
— Comment pouvez-vous en avoir connaissance ?
— C’est simple : un jour Mrs Schwob en venant commander des « pies » aux huîtres à mon cuisinier Edgar qui les réussit comme personne, a eu la langue trop longue – faut dire qu’elle ne rechigne pas à boire un verre discret avec moi ! – et elle a parlé de Ricci comme si elle venait de le voir. Elle s’est rendu compte de sa sottise et a essayé de se rattraper mais elle n’est pas futée et n’a fait qu’aggraver les choses. J’ai été faire un tour du côté du Palazzo et à l’aube j’ai vu le Médicis qui s’éloignait…
— Qui est donc cette Mrs Schwob pour en savoir si long ?
— La femme de Nephtali Schwob, un Juif allemand enrichi dans la ferraille qui possède « The Oaks » sur Ocean Drive. Pas jeunes, sans enfants, pas antipathiques, ils sont les seuls amis intimes de Ricci qu’ils connaissent depuis longtemps. Ce sont eux qui l’ont amené dans le coin…
— Et qui ont convaincu la « haute société » d’accepter ses invitations ?
— Dans un sens oui. Mrs Schwob fait partie de tous les comités possibles et imaginables. Elle est d’ailleurs généreuse et comme Ricci leur a versé de grosses sommes, une douairière s’est décidée à l’inviter, puis une autre et finalement, la curiosité aidant, tout ce beau monde a assisté à son mariage. Le premier du moins. Pour le deuxième c’était un brin réduit… Au fait, vous parliez d’une femme tuée en Angleterre ?…
— … à la veille de son embarquement pour l’Amérique où ils devaient se marier. Il l’avait d’abord embobelinée en la traitant comme sa fille adoptive mais quand elle a su qu’elle allait en fait devenir sa femme, elle s’est enfuie d’autant plus vite qu’elle en aimait un autre. Un taxi lui est passé dessus en plein milieu de Piccadilly.
— Et il n’a pas été arrêté ?
— Au moment où elle expirait il était à bord du Leviathan .
Un silence suivit que Ted peupla en versant une autre ration de scotch dont il avala un bon tiers avant de soupirer :
— Dans un sens elle a eu de la chance, surtout si elle a été tuée sur le coup ! Je me demande ce qui lui serait arrivé si elle était venue jusqu’ici ?
— J’y ai pensé mais ces séjours clandestins au Palazzo comment les expliquez-vous ?
— Par la contrebande. Je suis persuadé qu’il en fait sur une grande échelle et sans doute préfère-t-il superviser personnellement certains envois, ou recevoir des fournisseurs plus facilement que dans ses bureaux de New York où Phil Anderson doit le surveiller. Et maintenant qu’est-ce que vous allez faire ?
— Il faut que je
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