Les Médecins Maudits
bombes.
Hitler se souciait peu du déroulement quotidien de la vie et de la mort dans les camps d’extermination.
— Pour les détails, consultez le Reichsführer SS Heinrich Himmler.
L’ancien étudiant en sciences agronomiques était à la fois adepte de l’ésotérisme et pragmatique. Il avoua à Heydrich :
— J’aurais aimé jouer du violon comme vous mais surtout guérir les hommes soit en imposant les mains, soit comme médecin.
Et Gebhart nous apprit à Nuremberg que le livre de chevet d’Himmler était un recueil des pensées et des travaux d’Hippocrate.
— Il n’existe pas de livre auquel Himmler se référait plus souvent que le livre d’Hippocrate. Depuis 1940 ce livre se trouvait sur son bureau.
L’ouvrage lui avait été offert par sa femme ; elle collectionnait les ouvrages anciens de « soins à donner aux malades ». Un atavisme logique : M me Himmler, comme sa mère et sa grand-mère, avait été infirmière.
Chez Himmler le besoin de faire expérimenter était une véritable maladie.
— Essayez toujours, il en sortira peut-être quelque chose.
Les charlatans surtout recevaient ses faveurs. Lorsque Mussolini par exemple avait été arrêté et que les services d’espionnage allemands ne savaient pas où il était retenu prisonnier, Himmler réunit en un véritable banquet – cigares, Champagne – quarante diseurs de bonne aventure, agitateurs de pendules et autres chiromanciens déportés d’Oranienburg-Sachsenhausen, pour retrouver le Duce évanoui viii .
Ne nous y trompons pas. Il est facile aujourd’hui d’écrire : « Les dirigeants nazis étaient des fous… Tenez le bon docteur Morell (le médecin privé d’Hitler) le bourrait de strychnine ; Himmler dirigeait des sociétés secrètes comme le groupe de Thulé ou l’Ahnenerbe. Et ces mages voulaient retrouver le trésor des Cathares à Montségur et le Saint Graal entre Tarascon-sur-Ariège et Vicdessos ix …»
Tout cela est vrai mais Himmler partait du principe que tout devait être tenté dans tous les domaines. Nous en revenons à son fameux :
— Essayez toujours, il en sortira peut-être quelque chose.
Ahnenerbe signifie « héritage des ancêtres ». Cette société avait pour statuts dès 1933 : « Rechercher la localisation, l’Esprit, les Actes et l’Héritage de la race nordique indo-germanique et communiquer au peuple les résultats de ces recherches sous une forme intéressante. »
Bien sûr les « chercheurs » se dispersaient : nouvelle quête de la pierre philosophale et de l’Atlantide, cérémonies initiatiques, magie, occultisme, études des grandes religions, des mouvements mystiques et philosophiques, interprétation des « sagesses » tibétaines ou asiatiques, etc. mais surtout l’Ahnenerbe se consacra, sous le contrôle d’Himmler, aux expérimentations humaines. Dès 1942 il ne s’intéressa pratiquement plus qu’à cela. L’Institut était rattaché à l’état-major personnel du second personnage de l’État x .
Rascher comme beaucoup d’autres expérimentateurs, était membre de l’« Héritage des Ancêtres ».
Sigmund Rascher était fils de médecin. Lorsqu’il rencontra Nini Diehls il venait d’avoir trente ans ; elle quarante-six. Mais Nini Diehls pouvait servir l’ambition de son amant, briser la médiocrité de sa vie ; elle n’avait qu’un seul grand ami : Heinrich Himmler. Le couple ne recula devant aucune bassesse. Rascher dénonça même son père à la Gestapo.
— C’est un ennemi du régime…
Il fut déporté.
Si les dirigeants nazis applaudissaient l’union libre, ils aimaient bien recevoir, chez eux, des couples légitimes accompagnés de rejetons blonds. Les Rascher attendirent la naissance de leur second enfant pour signer le registre des mariages. Couple « dans le vent », choyé par oncle Heinrich qui leur offrait des chèques en blanc ; ils étaient de toutes les réceptions et Nini Diehls baissait timidement les yeux lorsqu’une matrone dodue, gavée de cochonnailles et de bière lui demandait :
— Vous devez avoir un secret. À votre âge, de si beaux enfants, c’est presque inimaginable !
Le secret des Rascher n’était connu que d’un troisième personne : une servante légère qui avait accepté de vendre sa « production clandestine ». Nini Diehls, satisfaite de la « marchandise », payait rubis sur l’ongle et retenait toujours la « faute » de l’année prochaine.
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