Les quatre livres des stratagèmes
grandeur d’âme et la fermeté ont inspirés aux
généraux seront appelés
;
et ceux qu’on entend par [14] ne sont qu’une espèce des premiers. Le
mérite particulier de ceux-ci est dans la ruse et l’habileté, quand
il s’agit d’éviter ou de surprendre l’ennemi. Comme, en guerre,
certaines paroles ont produit aussi de mémorables effets, j’en ai
cité des exemples, comme j’ai fait pour les actions.
Voici les espèces de faits qui peuvent
instruire un général de ce qui doit se pratiquer avant le
combat :
Chapitres
I Cacher ses desseins.
II Épier les desseins de l’ennemi.
III Adopter une manière de faire la
guerre.
IV Faire passer son armée à travers des
lieux occupés par l’ennemi.
V S’échapper des lieux désavantageux.
VI. Des embuscades dressées dans les
marches.
VII. Comment on paraît avoir ce dont on
manque, et comment on y supplée.
VIII. Mettre la division chez les
ennemis.
IX. Apaiser les séditions dans
l’armée.
X. Comment on refuse le combat aux
soldats, quand ils le demandent intempestivement.
XI. Comment l’armée doit être excitée au
combat.
XII. Rassurer les soldats, quand ils sont
intimidés par de mauvais présages.
Partie 1
LIVRE PREMIER.
I. Cacher ses desseins.
1 Marcus Porcius
Caton , soupçonnant que les villes soumises par lui en
Espagne se révolteraient dans l’occasion, sur la confiance qu’elles
avaient en leurs murailles, leur prescrivit, à chacune en
particulier, de démolir leurs fortifications, les menaçant de la
guerre si elles n’obéissaient pas sur le champ ; et il eut
soin que ses lettres leur fussent remises à toutes le même jour.
Chacune des villes crut que cet ordre n’était donné qu’à elle
seule. Elles auraient pu s’entendre et résister [15] , si
elles avaient su que c’était une mesure générale.
2 Himilcon, chef d’une flotte
carthaginoise, voulant aborder inopinément en Sicile, ne fit point
connaître le lieu de sa destination ; mais il remit à tous les
pilotes des tablettes cachetées [16] portant
l’indication de la partie de l’île où il voulait qu’on se
rendît ; et il leur défendit de les ouvrir, à moins que la
tempête ne les éloignât de la route du vaisseau amiral.
3 Caïus Lélius, allant en ambassade près
de Syphax [17] , emmena avec lui des centurions et des
tribuns qui, sous l’habit d’esclaves et de valets, lui servaient
d’espions, entre autres L. Statorius, que quelques-uns des
ennemis semblaient reconnaître, parce qu’il était venu souvent dans
leur camp. Lélius, pour déguiser la condition de cet officier, lui
donna des coups de bâton comme à un esclave.
4 Tarquin le Superbe, jugeant qu’il
fallait mettre à mort les principaux citoyens de Gabies [18] , et ne voulant confier ses ordres à
personne, ne fit aucune réponse au messager que son fils lui avait
envoyé à ce sujet ; mais, comme il se promenait alors dans son
jardin, il abattit avec une baguette les têtes des pavots les plus
élevés. L’émissaire, congédié sans réponse, rendit compte au jeune
Tarquin de ce que son père avait fait en sa présence ; et le
fils comprit qu’il devait immoler les premiers de la ville.
5 C. César, suspectant la fidélité des
Égyptiens, visita avec une feinte sécurité la ville d’Alexandrie et
ses fortifications, se livra en même temps à de voluptueux festins,
et voulut paraître épris des charmes de ces lieux, au point de
s’abandonner aux habitudes et au genre de vie des
Alexandrins ; et, tout en dissimulant ainsi, il fit venir des
renforts et s’assura de l’Égypte.
6 Ventidius, dans la guerre contre les
Parthes, qui avaient pour chef Pacorus, n’ignorant pas qu’un
certain Pharnée, de la ville de Cyrrhus, et du nombre de ceux qui
passaient pour alliés des Romains, informait l’ennemi de tout ce
qui se passait dans leur camp, sut mettre à profit la perfidie de
ce barbare. Il feignit de craindre les événements qu’il désirait le
plus, et de désirer ceux qu’il redoutait. Ainsi, craignant que les
Parthes ne franchissent l’Euphrate avant qu’il eût reçu les légions
qu’il avait en Cappadoce, au delà du Taurus, il agit si habilement
avec ce traître, que celui-ci, avec sa perfidie accoutumée, alla
conseiller aux ennemis de faire passer leur armée par Zeugma, comme
par le chemin le plus court, et parce que l’Euphrate y coulait
paisiblement, n’étant plus encaissé dans ses rives. Ventidius
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