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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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de la plaza del Potro.
    — Il ajouta qu’au cas où ils échoueraient l’un et
l’autre, sa mère quitterait l’Espagne pour faire la guerre que son fils et son
mari n’avaient eu ni le courage ni la patience de gagner.
    Du chœur s’élevèrent des murmures d’approbation et un
applaudissement. Le soldat en profita pour avaler le vin qui restait dans son verre.
Il attendit qu’on le lui remplisse une fois de plus, et se lança dans le récit
de la prise de la ville, sanglante et définitive. Hernando sentit que quelqu’un
passait dans son dos et lui donnait un petit coup.
    Il se retourna et vit Hamid, qui boitait tête basse derrière
le muletier ; dans sa main, il tenait un ballot pas plus grand que celui
de Fatima le jour de leur mariage. Juan avait réussi ! Un frisson
parcourut tout son corps et, la gorge nouée, il les regarda se diriger
lentement vers le haut de la place.
    — Par ordre de son père, s’exclama le soldat à ce
moment-là, don Fadrique exécuta plus de deux mille cinq cents Wallons, Français
et Anglais…
    — Hérétiques !
    — Luthériens !
    Les insultes à la résistance des citoyens de Haarlem ne
parvinrent pas à intéresser Hernando qui, au même moment, crut entendre le
frottement de la chaussure usée qu’Hamid traînait sur le pavé, cette étrange
cadence qui l’avait accompagné toute son enfance. Il porta les doigts à ses
yeux pour sécher ses larmes. Les deux silhouettes continuèrent à s’éloigner de
lui, indifférentes aux gens et au vacarme, aux bagarres et aux rires, au monde
entier ! Un petit muletier, courbé et édenté, vaurien et escroc. Un vieux
boiteux, fatigué de la vie, sage et saint. Il fit un effort pour dominer les
sentiments mêlés qui l’assaillaient. Il serra les poings et agita les bras
presque sans les bouger, réprimant sa force, sentant la tension dans tous ses
muscles, irrité par la lenteur de l’uléma à traverser la place.
    Il les vit dépasser la calle de los Silleros, puis celle de
los Toqueros ; ils tournèrent ensuite et passèrent devant l’hôpital de la
Charité. Alors Hernando scruta la foule, certain que, comme lui, tout le monde
avait les yeux rivés sur ce couple magique qui avait disparu calle de Armas.
Mais ce n’était pas le cas : personne ne semblait leur avoir prêté la
moindre attention, et ses voisins les plus proches suivaient toujours
attentivement le récit du mutilé.
    — Ils nous devaient plus de vingt mois de solde et nous
ont empêchés de piller la ville ! Tout l’argent que la ville a déboursé
pour éviter le pillage, c’est le roi qui l’a gardé ! criait l’aveugle en
frappant du poing sur la table posée dans la rue.
    Il renversa son verre de vin. Excité, il trouva des excuses
à la mutinerie que provoquèrent les soldats des régiments d’infanterie après la
prise de Haarlem.
    — Et, en représailles, les malades et les blessés comme
moi n’ont pas touché leurs arriérés !
    Que lui importait cet aveugle et quel avait été son sort au
cours de cette autre guerre religieuse qu’entretenait le roi catholique
Philippe ? pensa Hernando en traversant la place, s’obligeant à ne pas
courir.
    Ils l’attendaient quelques mètres plus loin, calle de Armas,
à peine éclairés tous deux par le reflet des bougies au pied d’une Vierge de la
Conception grandeur nature, qui se trouvait sur une belle grille ouvragée. La
rue était déserte. Juan le vit arriver. Hamid, non : il gardait la tête
basse, vaincu.
    Hernando s’arrêta devant lui et se contenta de lui prendre
les mains. Il ne parvenait pas à dire un mot. Sans dévier le regard du sol,
l’uléma observa les mains qui avaient saisi les siennes, puis les brodequins
qu’Hernando portait toujours depuis qu’il avait été nommé écuyer des écuries
royales. Ce matin même, il avait marché à ses côtés.
    — Hamid ibn Hamid, murmura-t-il, levant enfin le
visage.
    — Tu es libre, réussit à articuler Hernando.
    Et, avant que l’uléma puisse répliquer, il se jeta dans ses
bras et éclata d’un sanglot nerveux.
     
    Le lendemain matin, alors qu’Hamid se trouvait déjà aux
écuries, aux bons soins de Fatima, Juan et l’alguazil notifièrent devant le
greffier public l’acte de vente de l’esclave de la maison close dénommé
Francisco. Comme s’il s’agissait d’une simple et vulgaire bête, l’alguazil
précisa qu’il ne le vendait pas en bonne santé et détailla au greffe, un par
un, tous les

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