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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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chose.
    D’un pas décidé elle entra dans la maison. Hernando resta un
moment immobile, savourant le parfum de ces habits et de ce corps qu’il pouvait
si rarement serrer contre le sien.
    — Allez ! lui lança sa mère de l’intérieur de la
maison. Il y a beaucoup à faire et il est tard.
    Il déharnacha les bêtes, mit de l’orge dans les mangeoires
et Aisha lui apporta une bonne ration de pain, des œufs et une citronnade.
Mules et muletier mangèrent en silence. Assise au côté de son fils, Aisha lui
caressait les cheveux avec douceur en écoutant son récit des événements depuis
son départ de Juviles. Elle l’embrassa sur la tête lorsqu’elle l’entendit
raconter, la voix brisée par les sanglots, la mort de Gonzalico.
    — Il a eu sa chance, tenta-t-elle de le consoler. Tu la
lui as offerte. Nous sommes en guerre. En guerre contre les chrétiens :
nous souffrirons tous, n’aie aucun doute.
    Hernando finit de dîner et sa mère se retira. Il s’employa
alors à soigner les mules. Il les inspecta : repues, toutes, même les
nouvelles, se reposaient, cou penché et oreilles basses. Pendant un moment, il
ferma les yeux, vaincu par la fatigue, mais il s’obligea à se lever ;
Brahim pouvait le faire appeler à tout moment. Il ferra la bête qui en avait
besoin. Pendant la nuit, le martèlement résonna dans les vallons et les ravins
tandis qu’Hernando rectifiait le fer en métal doux sur l’enclume, pour parvenir
à lui donner une forme quasi quadrangulaire propre aux Arabes. Brahim insistait
pour qu’il conserve la technique arabe, rejetant les fers semi-circulaires des
chrétiens. Et Hernando était d’accord avec lui : le rebord saillant qui
restait sur les fers à cause des clous caractéristiques utilisés permettait aux
montures d’avancer en toute sécurité sur les chemins escarpés. Ensuite, une
fois la mule ferrée, et à l’inverse de ce que faisaient les chrétiens, il coupa
la partie du sabot qui dépassait du fer. Il termina de ferrer, contrôla les
sabots de toutes les autres mules et, à la fin, s’employa à soigner les plaies
de la bête désignée par lui au château. Il avait demandé à sa mère d’allumer le
feu avant d’aller se coucher. Il entra dans la maison sans se préoccuper de ses
quatre demi-frères et sœurs qui dormaient tous ensemble dans la petite pièce
servant à la fois de cuisine et de salle à manger. Bientôt ils récupéreraient
leurs chambres à l’étage, près de celle de leur mère et de Brahim, une fois que
les deux mille et quelques bourres de soie accrochées aux rangées de claies
disposées sur les murs seraient décoconnées ; en attendant, les cocons
devaient être fabriqués en silence, dans le calme, et ses frères et sœurs
devaient leur laisser leurs chambres. Il fit chauffer de l’eau et se mit à
cuire du miel et de l’euphorbe, qu’il laissa sur le feu pendant qu’il allait
masser avec l’eau chaude l’endroit où la mule était blessée. Il revint vers le
feu et ajouta à la décoction du sel enveloppé dans un linge. Quand il considéra
que le remède était prêt, il l’appliqua sur l’écorchure. Cette mule ne pourrait
pas travailler pendant plusieurs jours, ce qui déplairait à Brahim. Il
contempla les animaux avec satisfaction, remplit ses poumons de l’air glacé de
la montagne et porta le regard vers les sommets qui entouraient Juviles :
tous étaient dans l’ombre, sauf la colline du château, illuminée par l’éclat
des foyers. « Qu’en est-il d’Ubaid ? » s’interrogea-t-il en se
dirigeant vers l’étable pour dormir quelques heures.

 
8.
    Le lendemain matin, Hernando se leva à l’aube. Il fit ses
ablutions et écouta l’appel d’Hamid à la première prière du jour. Il s’inclina
deux fois et récita le premier chapitre du Coran et la prière du conut avant de s’asseoir par terre, s’appuyant sur le côté droit, pour continuer par
la bénédiction et terminer par le chant de la paix. Ses frères et sœurs,
également réveillés, essayèrent de l’imiter, balbutiant des prières qu’ils ne
maîtrisaient pas. Ensuite, il retourna soigner les plaies de la mule et, après
avoir déjeuné, se dirigea vers la maison d’Hamid. Il avait tant de choses à lui
raconter ! Tant de questions à lui poser ! Les chrétiens de Juviles
étaient toujours enfermés dans l’église au pain et à l’eau ; Hamid insistait
pour obtenir leur conversion à l’islam. Cependant, lorsqu’il

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