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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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Fatima.
    Ses yeux noirs exprimaient du chagrin, mais aussi une ferme
résolution. Tous deux marchaient devant Aisha, qui n’avait plus prononcé un
seul mot depuis qu’elle s’était aperçue de son erreur au moment où ils
s’étaient échappés du massacre. Les demi-frères d’Hernando, geignant
constamment, s’efforçaient de suivre la cadence.
    Le jour se levait. Le soleil commença à éclairer montagnes
et ravins comme si rien ne s’était passé ; le froid et la neige
produisaient une telle sensation de pureté que le carnage de Juviles semblait
n’avoir été qu’une fantaisie macabre.
    Pourtant il avait été bien réel. Et Hernando avait réalisé
son objectif : sauver sa mère. Mais ses sœurs… Et Hamid ? Qu’était
devenu l’uléma ? Il serra l’épée qu’il portait à la ceinture et tourna la
tête vers Aisha : elle marchait tête baissée ; plus tôt, il l’avait
entendue sangloter, maintenant elle avançait simplement derrière eux. Il
profita également des premiers rayons de soleil pour examiner du coin de l’œil
sa nouvelle compagne : sa chevelure noire bouclée lui tombait sur les
épaules. Elle avait la peau sombre et les traits ciselés ; le corps d’une
fille qui a subi une maternité prématurée. Et elle marchait avec dignité,
malgré la fatigue. Fatima se sentit observée et elle se tourna vers lui pour
lui offrir un léger sourire illuminé par ces fantastiques yeux noirs fendus et
étincelants, qu’Hernando découvrit juste alors. Une bouffée de chaleur envahit
ses joues.
    Humam se mit à pleurer. Fatima berçait son fils sans cesser
d’avancer.
    — Arrêtons-nous pour qu’elle nourrisse le petit,
conseilla Aisha à l’arrière.
    Fatima acquiesça et tous s’éloignèrent du sentier.
    — Je suis désolée, mère, dit Hernando tandis que Fatima
s’asseyait pour allaiter Humam, flanquée des deux enfants ébahis.
    Aisha ne répondit pas.
    — J’ai cru… J’ai cru que c’était Raissa.
    — Tu m’as sauvé la vie, l’interrompit alors sa mère. La
mienne et celle de tes frères.
    Aisha laissa ses larmes couler. Elle attira son fils vers
elle et le serra dans ses bras.
    — Tu n’as pas à t’excuser…, sanglota-t-elle, toujours
en l’étreignant, mais comprends ma douleur pour tes sœurs. Merci…
    Fatima observait la scène, le visage sérieux. Humam tétait
avec appétit. Sur la poitrine découverte de la jeune fille, Hernando put alors
observer un bijou en or qui pendait à son cou : la jamsa, la main
de Fatima, le collier que les chrétiens leur interdisaient de porter, une
amulette qui protège du mal.
     
    Hernando et sa petite cohorte mirent toute la matinée pour
parcourir les presque trois lieues qui séparaient Juviles d’Ugíjar, la plus
importante localité chrétienne des Alpujarras, qui se trouvait aux mains des
Maures après une tuerie sauvage ordonnée par Farax. Elle était enclavée dans la
vallée du Nechite, un peu éloignée des contreforts de la Sierra Nevada, raison
pour laquelle son orographie n’était pas aussi accidentée que celle des hautes
Alpujarras ; il s’agissait d’un village riche en vignes et céréales, et
qui possédait des pâturages très étendus pour le bétail. L’armée d’Abén Humeya,
dès son arrivée, avait installé son camp. Ugíjar était une fourmilière.
    Le roi de Grenade logeait dans la maison qui avait appartenu
à Pedro López, le greffier principal des Alpujarras. Le bâtiment abritait une
des trois tours défensives que comptait la localité. Les tours étaient
disposées en triangle et une grande partie de l’armée était éparpillée à
l’intérieur. Hernando retrouva son troupeau de mules devant la tour de la
collégiale ; Ubaid surveillait l’aubère de son beau-père. S’il l’avait
craint auparavant, désormais il se sentait assez fort pour s’adresser à lui.
    — Et Brahim ? demanda-t-il au muletier.
    Ubaid haussa les épaules et cloua son regard sur Fatima.
Musa et Aquil voulurent s’approcher des mules, encore chargées du butin, mais
des soldats leur barrèrent le passage. Ubaid ne quitta pas Fatima des yeux,
même lorsque le petit Musa tomba à ses pieds, bousculé par les soldats qui le
repoussèrent loin du butin. La jeune fille, intimidée, s’accrocha à Hernando.
    — Qu’est-ce que tu regardes ? lança-t-il au
muletier.
    Ubaid haussa de nouveau les épaules, jeta un dernier regard lascif
à Fatima et cessa son harcèlement. Hernando

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