Les Thermopyles - La Plus Celebre Bataille De L'Antiquite
sur la puissance, de la discipline sur la force brute, de la ruse sur le nombre. D’aucuns considèrent le sacrifice de Léonidas et de ses compagnons d’armes comme l’acte fondateur du mythe spartiate. Le vainqueur des Thermopyles, à savoir Xerxès, est quant à lui honni et oublié. Le Roi des Rois en a lui-même conscience. En maquillant ses pertes et en exposant les corps des valeureux Grecs, il signe sa défaite morale. La dépouille même de Léonidas est outragée ; sa tête est tranchée et fichée au sommet d’un pieu ! Le comportement de Xerxès ternit à jamais son prestige. Aujourd’hui, deux mille cinq cents ans plus tard, seul le nom du héros vaincu est passé à la postérité. Le siècle de Périclès est aussi celui de Léonidas…
Première partie
Être Spartiate
« Mais que penser d’une femme de Lacédémone ? Elle avait envoyé son fils au combat. Elle apprend qu’il est tué : en le mettant au monde dit-elle, c’était bien mon intention d’en faire un homme qui n’hésiterait pas à mourir pour la patrie. »
Cicéron, Tusculanes, I. 42, 102.
Que penser d’un régime qui exclut régulièrement les étrangers, massacre périodiquement ses esclaves, supprime systématiquement ses handicapés, refuse l’emploi de l’or et de l’argent, institutionnalise l’enlèvement des femmes, enrégimente ses citoyens et sacralise la mort au combat ? A priori, rien ne prédispose Sparte à devenir l’une des cités-États les plus emblématiques de la Grèce antique. À l’orée du iv e siècle avant notre ère, sa victoire historique sur la démocratique Athènes en a fait pourtant la principale puissance militaire et politique de la Méditerranée. Aussi archaïque et brutale apparaît-elle, sa société a même perduré jusqu’au ii e siècle avant notre ère. En -146, Sparte tombe en effet sous le joug romain…
À la fois égalitaire, conservatrice, élitiste et militariste, la société spartiate est celle de tous les fantasmes, de tous les paradoxes, de tous les excès. « Sparte présente ainsi le paradoxe d’une société conservatrice et collectiviste qui cultive la valeur individuelle » souligne l’historien Edmond Lévy. Pendant près de quatre cents ans, la capitale culturelle, politique et religieuse de la Laconie a incarné l’idéal militaire du soldat antique, le triomphe de l’esprit civique sur l’individualisme forcené et l’emprise de l’État dans tous les domaines de la vie quotidienne. Le nom même de Spartiate est resté dans notre mémoire collective synonyme d’austérité, de rusticité et de dureté de la vie. Incontestablement, la bataille des Thermopyles résume à elle seule toute la philosophie de Lycurgue, le législateur mythique de la ville : vivre et mourir pour sa patrie. Être citoyen à Sparte, c’est avant tout combattre pour Sparte, et ce, quel qu’en soit le prix. Du berceau au tombeau, toute la vie des Spartiates est en effet régie par le culte de la guerre. Soldats avant d’être des hommes, les Spartiates diffèrent en cela radicalement de leurs rivaux argiens ou athéniens. Pris en charge par l’État dès l’âge de sept ans, les jeunes Spartiates sont élevés dans le culte de la guerre et de la compétition sportive. Sitôt sa prime enfance, le futur guerrier de Lacédémone est familiarisé avec toutes les vertus de l’héroïsme militaire. Au sein de cette société singulière exaltant les valeurs guerrières, le sens de l’honneur, le respect de la discipline et la dévotion à l’État priment sur toute autre considération…
L’embrigadement de la jeunesse est inséparable du sentiment d’insécurité dans lequel a toujours vécu la grande cité du Péloponnèse. Dans cette optique, Sparte n’hésite pas à exclure les étrangers, à exterminer les hilotes et à éliminer les plus faibles. Vivant en parfaite autarcie, Sparte se méfie des marchands, surveille de près ses esclaves et punit quiconque déroge aux règles strictes de l’État. Bannissant le travail manuel et la richesse matérielle, elle entend constituer une race supérieure d’hommes forgée dans le seul culte de la guerre, une société égalitaire et incorruptible où chaque citoyen dispose du même lot de terres, des mêmes meubles et des mêmes vêtements. On combat, on mange et on dort ensemble, quelles que soient les circonstances. La valeur d’un homme se mesure
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