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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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militaires.
    – Impossible, mon cher capitaine ! tout à fait impossible !
    Tous les efforts de l’art ne peuvent l’emporter sur la nature. Songez donc qu’en pareil cas vous opérez une solution de continuité dans les artères, dans les nerfs, dans les muscles, dans les intestins, et ce qui est encore de plus grande conséquence, vous…
    – Assez ! assez ! docteur Sitgreaves ; je suis convaincu. Je vous assure que je n’ai pas la moindre envie d’éprouver cette solution de continuité qui, d’après ce que vous me dites, met en défaut l’art de la chirurgie.
    – C’est la vérité, mon cher Lawton ; et quel plaisir peut-on trouver à panser une blessure, quand on voit que toutes les lumières de la science sont insuffisantes pour la guérir ?
    – Aucun, sans doute.
    – Que regardez-vous comme le plus grand plaisir de la vie ? demanda tout à coup le docteur, dont cette nouvelle discussion avait complètement dissipé le mécontentement.
    – C’est une question à laquelle il peut être difficile de répondre.
    – Point du tout. C’est de voir… non ; c’est de sentir les ravages occasionnés par une blessure, réparés par les lumières de la science agissant de concert avec la nature. Je me suis une fois cassé le petit doigt de la main gauche avec intention, afin de réduire la fracture et d’en suivre la guérison. C’était une expérience faite en petit ; et cependant, mon cher Lawton, je me souviens encore avec transport de la sensation délicieuse que j’éprouvai quand les deux os se rejoignirent, et que je contemplai les effets admirables de l’art aidant ainsi la nature. Jamais, dans toute ma vie, je ne goûtai un si grand plaisir. Il aurait donc été encore bien plus vif s’il se fût agi d’un membre plus important, comme par exemple le bras ou la jambe.
    – Ou le cou ! ajouta le capitaine ; et comme ils arrivaient chez M. Wharton, la conversation en resta là. Personne ne se présentant pour les annoncer, le capitaine prit le chemin du salon, en ouvrit la porte, et s’arrêta surpris de la scène qui s’offrit à ses yeux. Le colonel Wellmere était penché vers Sara, dont les joues étaient couvertes de rougeur, et il lui parlait avec un feu qui fit que ni l’un ni l’autre ne s’aperçurent de l’arrivée des deux étrangers. Certains signes significatifs qui n’échappèrent pas à l’œil clairvoyant du capitaine le rendirent maître de leur secret, et il allait sortir de l’appartement aussi silencieusement qu’il y était entré, quand son compagnon, qui le suivait, avança brusquement, s’approcha de la chaise du colonel, lui saisit le bras comme par instinct, et s’écria :
    – Juste ciel ! un pouls vif et irrégulier, des joues pourpres, des yeux enflammés, ce sont de graves symptômes de fièvre, et l’on ne peut trop se hâter d’y porter remède. Et tout en parlant ainsi, le docteur, habitué à une manière sommaire d’opérer, prenait sa lancette, et faisait d’autres préparatifs qui annonçaient des intentions très-sérieuses. Mais le colonel Wellmere, se remettant de sa confusion et de sa surprise, se leva sur-le-champ, et lui dit avec un peu de hauteur :
    – Monsieur, c’est la chaleur de cet appartement qui m’a donné ces couleurs, et j’ai déjà trop d’obligation à vos talents pour vous causer un nouvel embarras. Miss Wharton sait que je me porte bien. Jamais je ne me suis trouvé si bien portant, jamais si heureux.
    Il prononça ces derniers mots d’un ton qui put être satisfaisant pour Sara, mais qui ajouta encore à l’incarnat de ses joues ; et Sitgreaves, dont les yeux suivirent la même direction que ceux de son malade, ne manqua pas de s’en apercevoir.
    – Votre bras, s’il vous plaît, miss Wharton, lui dit-il en s’avançant vers elle à la hâte, avec un salut respectueux ; les inquiétudes et les veilles ont produit leur effet sur votre santé délicate, et je remarque en vous des symptômes qu’il ne faut pas négliger.
    – Pardon, Monsieur, répondit Sara en se levant à son tour avec un air de dignité, la chaleur de cette chambre est étouffante ; je vais me retirer, et avertir miss Peyton de votre présence.
    Il n’était pas très-difficile d’en imposer à la simplicité du docteur ; mais Sara fut obligée de lever les yeux pour rendre à Lawton le salut qu’il lui fit en baissant la tête jusqu’au niveau de la main dont il tenait la porte ouverte pour la

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