L'industrie de l'Holocauste Reflexion sur l'exploitation de la souffrance des juifs
déportés : « La morale ne peut pas être aussi flexible. » Cependant, tout de suite après la guerre de 1967, Dawidowicz devint un « fervent par-
20. Making It, New York, 1967, p. 336.
21. Breaking Ranks, New York, 1979, p. 335.
22. Robert I. Friedman, « The Anti-Defamation League Is Spying on You » , Village Voice, 11 May 1993. Abdeen Jabara, « The Anti-Defamation League: Civil Rights and Wrongs », Covert Action, Sum-mer 1993. Matt Isaacs, « Spy vs Spite », SF Weekly, 2-8 février 2000.
23. Elle Wiesel, Against Silence, choisis et publiés par Irving Abrahamson, New York, 1984, vol. I, 283.
tisan d'Israël », qu'elle célèbre comme « le modèle par excellence de l'image idéale du juif dans le monde moderne ^"^ ».
Une des attitudes favorites des sionistes revigorés par la guerre de 1967 était d'opposer tacitement leur soutien officiel à un état d'Israël prétendument assiégé à la lâcheté des juifs américains pendant l'Holocauste. En fait, ils faisaient exactement ce que les élites juives américaines avaient toujours fait: s'aligner totalement sur le gouvernement américain. Les classes instruites étaient particulièrement douées pour prendre des postures héroïques. Prenons, par exemple, le commentateur libéral de gauche, Ir-ving Howe. En 1956, la revue publiée par Howe, Dissent, condamnait « l'attaque alliée contre l'Egypte » comme « immorale ». Bien qu'Israël ait réellement été seul, à ce moment-là, on l'a accusé alors de « chauvinisme culturel », de « sens quasi-messianique de la destinée manifeste » et de « courant expansionniste souterrain" ». Après la guerre d'octobre 1973, au moment où le soutien des États-Unis à Israël était le plus fort, Howe publia un manifeste « empreint d'une anxiété intense » pour défendre l'état d'Israël isolé. Le monde non juif, se lamentait-il dans une parodie de Woody Allen, était submergé par l'antisémitisme. Même dans les quartiers chic de New York, se lamentait-il, « Israël n'était désormais plus chic » : à part lui, tout le monde se prosternait désormais devant Mao, Fanon et Che Guevara".
En tant qu'avantage stratégique américain, Israël faisait l'objet de critiques. Outre l'hostilité internationale grandissante provoquée par son refus de négocier avec les Arabes un accord conforme aux résolutions de l'ONU et par l'indécent soutien aux ambitions américaines mondiales dont il faisait preuve ", Israël devait aussi faire face à une opposition intérieure américaine. Dans les cercles dirigeants américains, les « ara-bistes » affirmaient que s'engager à fond pour Israël en ignorant les élites arabes, c'était saper les intérêts nationaux américains.
Certains affirmaient que la subordination d'Israël au gouvernement américain et l'occupation des états arabes voisins n'étaient pas seulement mal en soi mais égale-
24. Novick, The Holocaust, p. 147. Lucy S. Dawidowicz, The Jewish Présence, New York, 1977, p. 26.
25. « Eruption in the Middle East », Dissent, hiver 1957.
26. « Israël: Thinking the Unthinkable », New York magazine, 24 décembre 1973.
27. Norman G. Finkelstein, Image and Reality ofthe Israël-Palestine Conflict, New York, 1995, chapitres 5-6.
ment nocifs aux intérêts américains eux-mêmes. De plus en plus, Israël se militariserait et se séparerait du monde arabe. Pour les nouveaux « partisans » juifs américains d'Israël, cependant, ce discours relevait de l'hérésie : un Israël en paix avec ses voisins et indépendant ne présentait aucun intérêt ; un Israël aligné sur les courants du monde arabe en quête d'indépendance envers les États-Unis était un désastre. Une Sparte israélienne, dépendante du gouvernement américain, était seule envisageable, parce que c'est seulement dans ces conditions que les dirigeants juifs américains pouvaient servir de porte-parole aux ambitions impériales américaines. Noam Chomsky a suggéré qu'il serait plus juste d'appeler ces « partisans d'Israël » des « partisans de la dégénération morale et de la destruction ultime d'Israël^^ ».
Pour défendre leur avantage stratégique, les élites juives américaines « se sont souvenues » de l'Holocauste^'. La version officielle est qu'elles l'ont fait parce qu'au moment de la guerre de 1967, elles ont cru qu'Israël courait un danger mortel et ont été saisies par la peur « d'un second Holocauste ». Cette affirmation ne résiste pas à
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