Métronome
d’aujourd’hui, ce sont les grands groupes de l’industrie du luxe, ceux qui détiennent les cordons de la Bourse. En quête de souvenirs architecturaux du XX e siècle, on retiendra la façade Art nouveau du Claridge, aux numéros 74-76 ; celle de l’ancien Élysée-Palace, devenu une banque au 103 ; ou encore l’immeuble Art déco du Virgin Mégastore au 56-60.
Cela dit, la mise en place du RER, qui s’arrête à l’Étoile depuis 1970, a vaguement changé la donne en ce qui concerne les Champs. Depuis quarante ans, on vient facilement de banlieue errer en ces lieux. Résultat, le glamour chic et choc de l’avenue a perdu un peu son âme distinguée pour s’encanailler dans la fringue soldée et le fast-food.
Mais enfin, ils sont tous là, les Lancel, Lacoste, Hugo Boss, Oméga, Cartier, Guerlain, Montblanc… Ils brillent au firmament des Champs-Élysées comme une occupation triomphale de nouveaux potentats.
En 2006, Louis Vuitton a ouvert sur l’avenue, au n o 101, son espace repensé, objet de toutes les critiques pour la décoration de ses vitrines déjantées. Mais, crise ou pas, on y expose les originaux des valises et sacs les plus imités dans le monde. Et que dire du nouveau drugstore Publicis au 133, véritable institution depuis plus de cinquante ans ? Sa nouvelle architecture, tout en transparence et en courbes, typique de l’architecture de la fin du XX e siècle et du nouveau millénaire, laisse pour le moins perplexe…
De tous ces puissants, c’est à celui qui se fera le mieux remarquer pour épater ce nouveau Versailles dont la cour est rassemblée juste devant vous, à La Défense, autour de la Grande Arche, cet arc de triomphe des temps modernes, écho vaniteux à l’Arc de triomphe de Napoléon…
XXI e siècle
LA DÉFENSE
Le retour à la source
En descendant au terminus de la ligne n o 1, station La Défense, vous la verrez, la Grande Arche immaculée, cadre d’un vide sidéral, qui impose son architecture prétentieuse. Je sais, le XX e siècle n’a pas été tendre pour Paris : tour Montparnasse, Forum des Halles, voies sur berges, Front-de-Seine, Centre Pompidou, Opéra-Bastille, bibliothèque François-Mitterrand… Les verrues infligées à la capitale sont nombreuses et impressionnantes. La Grande Arche vient en 1989 mettre un point d’orgue au mauvais goût en imposant cette forme dans la perspective de l’Arc de triomphe.
Mon jugement est sans doute sévère. Qui sait si, dans cent ans, on ne viendra pas en pèlerinage à La Défense pour admirer, au même titre que l’Art nouveau ou l’Art déco, ces symboles de l’architecture de la seconde moitié du XX e siècle ? Peut-être se recueillera-t-on ici devant l’arc de triomphe des affaires et de la finance… C’est vrai, le quartier de La Défense n’a que cinquante ans, c’est le général de Gaulle qui décida sa construction dès 1958, sur les communes de Puteaux, Courbevoie et Nanterre, pour en faire le pôle économique et financier de la France des Trente Glorieuses. En regardant vers l’Arc de triomphe, vous verrez, au bout du parvis, un peu perdue parmi les constructions nouvelles, l’ancienne statue de la Défense, érigée en 1883 en hommage à la résistance des Parisiens lors de l’invasion prussienne de 1870. Le quartier lui doit son nom.
Au fond, plutôt que de verser dans un conservatisme un peu ridicule, je préfère accepter non pas les outrages mais les audaces architecturales de mon époque. Et puis, on le sait bien, le temps fera son œuvre, l’Histoire jugera, et sans doute mieux que moi ! Car en définitive ce sont là les futurs vestiges, les témoignages du siècle dans lequel je vis, et ils sont indispensables à Paris. D’ailleurs, le magnifique musée du quai Branly de Jean Nouvel, près de la tour Eiffel, a pour moi déjà trouvé sa place.
Maintenant, plus largement, on peut se poser la question fondamentale suivante : quel héritage le XXI e siècle transmettra-t-il aux générations futures ?
Pour le moment j’ai l’impression que, honteuses d’elles-mêmes, ces nouvelles superstructures saisissantes sont construites en matériaux éphémères ou jetables appelés à disparaître assez vite. De nombreux archéologues et architectes s’inquiètent d’ailleurs ouvertement de la courte espérance de vie des bâtiments modernes…
Quoi qu’il en soit, pour Paris, notre siècle sera celui d’une expansion vertigineuse. Ce sera le siècle du Grand
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