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Mort d'une duchesse

Mort d'une duchesse

Titel: Mort d'une duchesse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elisabeth Eyre
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reçut,
seul, dans sa bibliothèque. Cosima avait l’allure d’un paquet enveloppé de soie
blanche, mais lorsque, par respect envers le duc, elle ôta son voile, les
quatre hommes eurent l’impression de voir la lune émerger d’entre les nuages.
    Cosima ne leva pas les yeux, de sorte que sa vision fut réduite
à une étendue de sol, deux longues robes de velours, du brocart, du tissage de
Flandres et des cordons de soie tressés, une chaussure brodée du duc dépassant
de la fourrure de son manteau, et les jambes de Leandro. La façon dont débuta l’entrevue
lui échappa.
    Son père et Bandini n’eurent pas cette chance. Ils eurent à
subir l’examen soutenu et, pendant un long moment, silencieux du duc.
    — À   genoux.
    Tous quatre obéirent instantanément à l’injonction ; les
articulations raidies des plus âgés furent aussi promptes que celles, plus
souples, des cadets. Cosima ressentit une impression de froid. Avec l’optimisme
de son jeune âge, elle avait fait confiance à Sigismondo et cru que tout était
résolu. Or il n’était pas là, et le visage du duc était glacial.
    — Nous vous avons mandés pour vous signifier que nous
connaissons toutes vos menées contre notre personne et notre État ; menées
qu’une intervention de dernière heure vous a empêchés de conclure.
    Les yeux du duc  – combien effrayants peuvent être des
yeux bleus ! – se tournèrent vers son père.
    — Vous, en nous désobéissant et en cherchant à nous
tromper, avez mis votre fille entre les mains de nos ennemis ; et pour la
sauver des conséquences de votre forfait, vous étiez prêt à ouvrir les portes
de la ville à ceux qui voulaient la mort de votre duc  – vous, un membre
de notre conseil, dont le devoir et la première préoccupation devraient être la
protection de l’État. Vous auriez mis Rocca sous la coupe de Castelnuovo.
    Jacopo parut sur le point de répliquer, mais le duc avait
déjà détourné le regard.
    — Vous, Bandini, étiez prêt à nous trahir, à donner la
moitié de votre fortune à ceux dont vous saviez qu’ils cherchaient la ruine de
Rocca. Vous, Leandro, avez désobéi à l’interdiction qui vous avait été faite.
    Dans votre vanité, vous avez imaginé que notre fille aurait
pu vous donner un rendez-vous.
    Tête baissée, Leandro vira à l’écarlate. « Quel toupet ! »
songea Cosima.
    — Vous avez violé nos consignes en pénétrant dans le
palais. Votre folie a forcé la main de votre père. Quant à vous, Cosima…
    Elle s’alarma. Qu’avait-elle fait de mal ? Qui la soupçonnait
d’avoir mal agi ?
    — Vous vous êtes prêtée aux manigances de votre père, vous
l’avez encouragé à désobéir à nos ordres. Vous lui avez obéi, à lui, et non au
père de votre cité ! martela-t-il avant de poursuivre : Vous êtes
tous coupables ; tous déloyaux et traîtres. Vous pouvez bien rejeter la
faute sur celui qui vous a manipulés ; moi, je vous dis que la faiblesse
de notre État, dont il s’est servi, était due à votre rivalité. Aucun traître
ne serait parvenu à ses fins sans l’occasion que lui ont fournie votre
indiscipline et la méconnaissance de vos devoirs.
    Il y eut un silence. Personne ne leva ni la tête ni les yeux.
    — Je m’adresse aux deux pères : envers qui se
situe selon vous le devoir de vos enfants ? Envers leurs amis, leurs
passe-temps, leurs querelles ? Ou envers vous ?
    Di Torre et Bandini marmonnèrent, finirent par acquiescer :
« Envers nous. »
    — J’en attends autant de vous envers moi.
    Cette fois, Bandini fut sur le point d’assurer le duc de sa
future loyauté, mais la voix rêche de celui-ci le fit taire.
    — Un traître qui m’était cher est à présent pendu par
des chaînes aux murailles de la ville.
    Cosima se remémora l’horrible description que lui avaient
faite les servantes du cadavre enduit de goudron et enchaîné.
    — Vous m’êtes bien moins chers que lui. Qu’espérez-vous
de moi ?
    Dieu du Ciel ! Cosima fut agitée de tremblements. À   travers
ses larmes, elle vit son père se jeter à plat ventre, bras tendus vers le duc.
    — J’implore votre miséricorde.
    Bandini se laissa à son tour tomber à terre. Cosima, affolée,
se demanda : « Devrais-je moi aussi… Ma robe… » Voyant Leandro
faire mine d’imiter les deux hommes, elle avait déjà les mains au sol lorsque
le duc leur ordonna de se relever.
    Son père et Bandini se redressèrent sur les

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